Le pape François a présidé ce lundi matin, 30 novembre 2015, l'ultime messe de sa tournée en Afrique. Plusieurs dizaines de milliers de Centrafricains étaient rassemblés au stade Barthélémy Boganda, du nom du père de l'indépendance centrafricaine.
Difficile de décrire l’enthousiasme qu’a suscité son arrivée au stade Boganda plein à craquer. Pourtant habitué aux bains de foule, le pape François semblait lui aussi impressionné par cette explosion de joie. Signe du climat de joie qui règne à Bangui, l’Imam Kobine Layama, le membre musulman de la plateforme interreligieuse a lui aussi été ovationné. La présidente Catherine Samba Panza et tous les membres du gouvernement de transition étaient présents. De nombreux fidèles s’abritaient du soleil de plomb sous des parapluies jaunes et blancs aux couleurs du Vatican. Certains chantaient en sango: le pape est venu à Bangui, tout le monde a pu le voir. Jusqu’au dernier jour, beaucoup ne croyaient pas que cette visite puissent avoir lieu en raison des risques sécuritaires.
Avant de commencer la célébration, le Saint-Père a béni une statue noire de la Vierge Marie, une Vierge africaine. Il tenait en guise de crosse une simple croix également en bois d’ébène, un de ces bois précieux, richesse du pays. Cette croix lui avait été offerte la veille par la communauté de la cathédrale de Bangui. Sur le plan liturgique, l’accent a été mis sur l’inculturation. Pour cette messe, le folklore centrafricain s’est déployé dans toute sa richesse, danses, chorégraphie, rythme, percussions, instruments typiques. Avant la lecture de l’Evangile, un tam-tam a résonné pour prévenir qu’un message fort allait être délivré, la Bonne Nouvelle. Au son des cors traditionnels, l’Evangéliaire a été porté en procession dans une pirogue enveloppée d’un drapeau du Vatican, rappelant symboliquement l'arrivée des premiers missionnaires dans le pays. A l’intérieur se trouvait un enfant. A l’offertoire, chaque diocèse a porté des dons typiques à l’autel, des fruits, des peaux d’animaux, une crosse en bois.
La pédagogie de la prière et de la réconciliation
Dans son homélie, prononcée en italien mais traduite simultanément en sango, la langue locale, François a invité la foule à rendre grâce au Seigneur, entre autres, «pour l’audace qu’il met en nos âmes de vouloir créer des liens d’amitié, de dialoguer avec celui qui ne nous ressemble pas, de pardonner à celui qui nous a fait du mal, de nous engager dans la construction d’une société plus juste et plus fraternelle où personne n’est abandonné. En tout cela, le Christ ressuscité nous prend par la main, et nous entraîne à sa suite. Et je veux rendre grâce avec vous au Seigneur de miséricorde pour tout ce qu’il vous a donné d’accomplir de beau, de généreux, de courageux, dans vos familles et dans vos communautés, lors des événements que connaît votre pays depuis plusieurs années.» Mais François a rappelé que la miséricorde et la réconciliation ne doivent jamais être considérées comme des acquis définitifs, car elles relèvent d'un combat spirituel du quotidien: «Tout baptisé doit sans cesse rompre avec ce qu’il y a encore en lui de l’homme ancien, de l’homme pécheur, toujours prêt à se réveiller à la suggestion du démon - et combien il est agissant en notre monde et en ces temps de conflits, de haine et de guerre -, pour l’entraîner à l’égoïsme, au repli sur soi et à la méfiance, à la violence et à l’instinct de destruction, à la vengeance, à l’abandon et à l’exploitation des plus faibles…»
«Nous savons aussi combien nos communautés chrétiennes, appelées à la sainteté, ont encore du chemin à parcourir. Certainement, nous avons tous à demander pardon au Seigneur pour trop de résistances et de lenteur à rendre témoignage de l’Evangile. Que l’Année Jubilaire de la Miséricorde, qui vient de commencer dans votre pays, en soit l’occasion», a-t-il insisté.
Dans son discours de remerciement, l'archevêque de Bangui, Mgr Dieudonné Nzapalainga, a remercié le pape pour ces journées «inoubliables, inscrites assurément dans notre cœur, et dans l'histoire de notre pays, le début d'une ère pour tout le peuple centrafricain.» Après la cérémonie, le pape François a offert un ostensoir à chacun des évêques centrafricains, pour inviter chaque diocèse à l'adoration perpétuelle. Une dame âgée a offert au pape une marmite traditionnelle, avec de la terre à l'intérieur, et le pape l'a bénie, bénissant ainsi, symboliquement, la terre de la Centrafrique.
Par ailleurs, en ce jour de la fête de la saint André, le pape François a tenu, «du cœur de l'Afrique», à saluer le patriarche de Constantinople, Bartholomée 1er. «Je lui formule des vœux de bonheur et de fraternité, et je demande à Dieu de bénir nos Eglises soeurs», a déclaré le pape François à la fin de cette messe qui clôture cette première tournée africaine.
Retour à Rome
Après une courte cérémonie protocolaire à l'aéroport international M'Poko de Bangui, et un ultime salut à la présidente centrafricaine Catherine Samba-Pamza, le pape François s'est envolé vers 12h30 vers Rome où il devrait atterrir vers 18h45.
C'est donc le terme d'un voyage de six jours qui l'a conduit au Kenya, en Ouganda, et en République centrafricaine, qui s'est finalement déroulé dans de bonnes conditions de sécurité. Selon la tradition des voyages pontificaux, le pape devrait tenir une conférence de presse dans l'avion. Ce voyage constituait le 11e déplacement à l'étranger du pape François, et au total, le 148e voyage apostolique d'un souverain pontife, depuis que Paul VI a inauguré cette tradition en 1964.
Radio Vatican (Romilda Ferrauto, envoyée spéciale à Bangui)