L’Evangile de ce 14e dimanche du temps ordinaire (Année A) comprend quelques points de contact avec le Magnificat de la Vierge Marie, qui sont très intéressants et extrêmement révélateurs.
Tout d’abord, Jésus rend gloire à son père d’avoir révélé aux « petits » ce qu’il a caché aux savants et aux sages. Puis il invite chacun à prendre son joug sur ses épaules et à devenir son disciple car, dit-il, « Je suis doux et humble de cœur. »
Les petits, les humbles, ont une place toute spéciale dans l’Evangile. Le Père a pour eux un amour préférentiel. Marie est l’une d’entre eux, et elle le proclame au début du Magnificat: « Mon âme exalte le Seigneur… car il s’est penché sur l’humilité de sa servante. » Le mot utilisé ici est le même que celui que Jésus utilise dans l’Evangile d’aujourd’hui lorsqu’il dit qu’il est doux et « humble de cœur ». Et c’est encore le même mot que Marie utilise plus loin dans son Magnificat, lorsqu’elle dit que le Seigneur a renversé les puissants de leurs trônes et exalté les humbles.
Lorsque Jésus rend gloire à son Père pour avoir révélé aux petits les choses cachées aux sages, les petits dont il parle sont ses disciples. Et ils n’étaient pas de naïfs enfants. Ils étaient des hommes adultes qui connaissaient les façons de faire du monde: Matthieu, le collecteur d’impôts, savait faire de l’argent; Jude, le Zélote, connaissait l’art de la guérilla; Pierre, Jacques et Jean étaient des pêcheurs qui savaient guider leur barque sur le lac et jeter le filet. Ils avaient tout abandonné pour devenir des disciples de Jésus.
Lorsque celui-ci les invite – et nous invite – à la simplicité du cœur, il ne nous invite pas à une attitude infantile de spiritualité. Il nous invite à une forme très exigeante de pauvreté du cœur. Il nous invite à le suivre comme disciples et donc à abandonner toutes nos sécurités, et spécialement notre soif de pouvoir, de la même façon que ses disciples avaient tout abandonné pour le suivre.
La grande caractéristique de l’enfant est son impuissance. L’enfant peut être, à sa façon, aussi intelligent ou aimant qu’un adulte. Mais parce qu’il n’a pas encore accumulé de connaissances, de possessions matérielles et de relations sociales, il est dépourvu de pouvoir. Dès que nous devenons adultes, nous voulons exercer pouvoir et contrôle: sur nos propres vies, sur les autres personnes, sur les choses matérielles, et parfois même sur Dieu. C’est à cela que Jésus nous demande de renoncer lorsqu’il nous demande d’être comme de petits enfants.
Un exercice utile de connaissance de soi pourrait être d’examiner les diverses formes sous lesquelles s’exprime, dans les divers aspects de notre vie, notre soif de pouvoir, et comment nous défendons ce pouvoir. Contemplons alors notre Seigneur qui est venu non pas comme un roi puissant sur son trône, mais comme un prophète humble et sans pouvoir, sur un âne.
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