On le sait, hélas, nos lieux de cultes se vident de leurs fidèles; ce n’est pas nouveau. Mais savez-vous qu’ils se vident également de leur mobilier? Actes volontaires ou involontaires, la vente, notamment sur le web, et la disparition du patrimoine religieux sont des phénomènes de plus en plus répandus à contrer d’urgence.
Il n’est pas rare, si vous surfez sur des sites d’achats et de ventes de seconde main, d’y trouver un répertoire ayant trait au patrimoine religieux. Ainsi, des chaises d’églises, des ornements liturgiques, des tableaux et autres statuaires se retrouvent fréquemment mis en vente sur le web. Dernièrement, sur un de ces sites commerciaux, on a pu lire l’offre particulière d’un habitant d’Asquillies, dans l’entité de Quevy, venant d’acheter l’église pour en faire son habitation et revendant vitraux, cloches, et même charpente du clocher, sur le web… D’autre part, en se baladant sur des brocantes le dimanche matin, on peut constater des faits similaires: le mobilier religieux se vend comme du pain.
Mais quelle est l’origine…?
Comment ces objets que nous ne pouvions admirer jadis qu’au sein de nos églises se retrouvent-ils sur les étals des marchands? Plusieurs explications sont possibles. Tout d’abord, il y a les vols. Perpétrés dans les édifices religieux, ces vols de mobiliers sacrés se multiplient. Ce sont ces objets dérobés que l’on peut retrouver dans les brocantes ou chez les antiquaires. Antiquaires peu scrupuleux d’ailleurs qui doivent bien se douter que les achats qu’ils font dépendent de larcins antérieurs. La dispersion du mobilier religieux sur les marchés entraîne la quasi impossibilité de retrouver ce mobilier et de le restituer à ses églises.
Deuxièmement, il y a la désaffectation des lieux de culte. Peu nombreux, les lieux de culte désaffectés sont parfois mis en vente comme de simples maisons. Leur mobilier peut alors aussi se vendre (cfr. notre habitant de Quevy). On voit ainsi arriver sur le Net une offre d’un type nouveau: l’immobilier et le mobilier religieux. Leur reconversion est quelque fois surprenante: hôtel-restaurant dans une église de Malines, centre de bien-être à Marche-en-Famenne ou encore future librairie dans l’église Saint-Jacques de Namur.
Enfin, il y a ce manque de rigueur (certains diront ce manque de moyens et de temps…) qui fait que le patrimoine religieux n’a plus été répertorié depuis plus de vingt ans. Obligatoires pourtant ces inventaires! Ce vide administratif laisse donc libre cours à toutes sortes d’abus, d’omissions, de fraudes peut-être…?
Les choses bougent…
L’évêché et l’Université de Namur ainsi que l’IRPA (Institut Royal du Patrimoine Artistique) ont décidé de prendre le taureau par les cornes en organisant un cycle de formation en « gestion et conservation du patrimoine mobilier religieux ». Et cela intéresse le public! Plus de 150 inscriptions déjà. La première journée de formation s’est tenue le samedi 22 mars dernier.
Notions d’architecture religieuse avec l’origine et la fonction des éléments de mobilier, décryptage de l’iconographie chrétienne, aspects législatifs avec les droits et les devoirs des fabriques, analyse du statuaire, des textiles liturgiques, du vitrail, de la peinture, de l’orfèvrerie. Un panel impressionnant de renseignements et d’informations qui devraient rendre à notre patrimoine religieux, riche et unique, toutes ses lettres de noblesse.
Sylviane BIGARÉ
Photo: Un détail de la chaire de vérité de l’église Saint-Loup à Namur.
Réaction de l’abbé Fernand De Lange
A la suite de la publication de cet article, l’abbé Fernand De Lange a tenu à réagir en apportant quelques précisions importantes.
« L’article ci-dessus donne à penser que le mobilier a été dispersé pour se retrouver sur le marché. Il n’en est rien!
La Fabrique d’église a suivi les instructions de l’évêché en cas de désaffectation d’une église. Tout le contenu de l’église a été disposé dans d’autres églises. Ne restaient que les vitraux sans valeur et les deux cloches que l’Administration communale a laissées ».
Nous remercions l’abbé De Lange pour ces précisions.