Lors d’un colloque à Rome organisé par l’université américaine de Georgetown, le patriarche chaldéen Louis Sako s’est inquiété de l’émigration des chrétiens d’Irak. Il souhaiterait que l’Église produise un document sur la liberté religieuse « dans un langage compatible avec l’islam ».
Dix ans après la chute de Saddam Hussein et l’invasion américaine, le constat est sans appel. La reconstruction achoppe, les violences se multiplient et l’avenir demeure plein d’incertitudes. Quant aux chrétiens, ils sont plus d’un million à avoir pris le chemin de l’exil, à cause des actes de terreur perpétrés contre eux par des groupes extrémistes islamiques. Ceux qui ont choisi de rester – ils ne seraient plus aujourd’hui que 250.000 – vivent dans des ghettos et n’osent plus professer publiquement leur foi.
Une situation qui alarme tout particulièrement Sa Béatitude Louis Sako, patriarche de Babylone des Chaldéens. Il suggère donc à l’Eglise de produire « un nouveau document, (…) expliquant dans un langage compatible avec l’islam la magnifique doctrine de la liberté religieuse » telle qu’elle a été formulée durant le concile Vatican II. Il reconnaît toutefois que ce ne sera pas évident vu les divergences qui restent fondamentales entre chrétiens et musulmans quant au statut de la Parole de Dieu ou à l’indépendance de la conscience.
Pas de démocratie sans respect des minorités
Pour le père Emmanuel Pisani, dominicain et enseignant l’islamologie à l’Institut catholique de Paris, la proposition de Mgr Sako a le mérite de souligner « le lien intrinsèque entre démocratie et liberté religieuse« . Parce que, poursuit-il, dans une démocratie, la majorité respecte les droits de la minorité, l’acceptation du pluralisme, qu’il soit politique, religieux ou autre, lui est inhérent. Elle serait d’ailleurs une chance pour les musulmans eux-mêmes, fait-il remarquer, car elle leur permettrait de gérer leurs conflits internes, que ce soit entre chiites et sunnites, ou entre courants du sunnisme. « Toutefois, pour qu’un tel texte soit recevable« , conclut le religieux, « il faudrait qu’il soit cosigné par des chrétiens et des musulmans. »
(D’après La Croix)