Lundi 25 novembre, le président russe Vladimir Poutine s’est rendu au Vatican pour parler du conflit syrien et du sort des chrétiens d’Orient. Deux sujets qui préoccupent le pape François. Par contre, il n'a pas été question des relations entre l’Eglise orthodoxe russe et l’Eglise catholique.
La rencontre du président russe Vladimir Poutine et du pape François, le 25 novembre dernier au Vatican, n'est pas historique. Seule celle de Gorbatchev et de Jean-Paul II le 1er décembre 1989 le fut. Depuis, les présidents russes visitent les papes avec régularité. Ainsi, le président Poutine a déjà rencontré Jean-Paul II à deux reprises, en 2000 et en 2003, au cours de ses précédents mandats, ainsi que Benoît XVI en 2007. Ce dernier s'est également entretenu avec le président Medvedev en 2009, année de l’établissement de relations diplomatiques complètes entre les deux Etats. Par contre, c'est la première fois que le pape argentin rencontrait le chef du Kremlin.
Remerciements pour la lettre
Lors de cet entretien, qui a duré 35 minutes et a été suivi d'une entrevue avec le secrétaire d'Etat Pietro Parolin, le président Poutine a remercié l'évêque de Rome pour la lettre qu'il lui a envoyé début septembre contre le projet franco-américain d'une intervention militaire en Syrie. Le pape y invitait les Etats membres du G20 à "abandonner la poursuite futile d'une solution militaire" au conflit. Une lettre que les médias russes ont largement mise en valeur pour mieux justifier la position russe, mais aussi pour présenter Moscou comme dernier rempart des chrétiens contre les extrémistes musulmans. Poutine renoue ainsi avec une tradition, présoviétique, de protection de la Terre sainte. Ce qui séduit fortement les chrétiens de cette région du monde, de plus en plus déçus par l'Occident.
Toujours à propos de la crise syrienne, les deux hommes ont profité de cette première rencontre pour appeler de nouveau les Etats à trouver "une solution qui privilégie la voie de la négociation et implique les différentes composantes ethniques et religieuses, en reconnaissant leur rôle indispensable dans la société." "La situation critique des chrétiens dans plusieurs régions du monde, la promotion des valeurs de la dignité de la personne, la protection de la vie humaine et de la famille" ont également été abordées lors des discussions, précise le communiqué du Saint-Siège.
Un geste symbolique, mais pas d'invitation
La visite du président Poutine a eu lieu à un moment où les relations entre l'Eglise catholique et l'Eglise orthodoxe russe s'affichent au beau fixe. Mais s'il a transmis au pape les salutations du patriarche orthodoxe de Moscou, le chef du Kremlin n'a pas officiellement évoqué les thèmes œcuméniques avec son interlocuteur, ni formellement invité le pape à visiter la Russie. Dans un geste symbolique manifestant la communion entre les deux Eglises, le président russe et le souverain pontife ont toutefois embrassé tour à tour une icône de la Madone de Vladimir. Il s'agit de la reproduction d'une des trois icônes les plus connues du pays, que le président russe a offerte au pape. Celui-ci a pour sa part offert au président russe une mosaïque représentant les Jardins du Vatican.
Une rencontre entre le pape et le patriarche Kirill n'est donc toujours pas à l'ordre du jour. Le prétexte, toujours invoqué, est la question ukrainienne. Dans ce pays, a effectivement resurgi en 1989, une Eglise greco-catholique, dite "uniate", pratiquant une liturgie orthodoxe mais liée à Rome. Ce qui agace prodigieusement Moscou. Le second prétexte, également évoqué avec constance côté russe, est qu'une telle rencontre entre le pape et le patriarche, pour hautement symbolique qu'elle soit, ne servirait à rien, si elle n'était pas suivie d'effets. Les Russes voient donc ce sommet comme un couronnement, le Vatican plutôt comme un commencement.
Les références orthodoxes du pape
Pourtant, le pape François a déjà fait plusieurs fois référence, depuis le début de son pontificat, aux Eglises orthodoxes, à propos de leur synodalité, de la beauté de leur liturgie et de leur pastorale du mariage en cas d’échec. Le fait que le pape se présente d’abord comme évêque de Rome plaît aussi beaucoup à l’Eglise russe.
Pascal ANDRE (avec La Croix et Radio Vatican)