La sempiternelle question du célibat des prêtres est revenue dans l’actualité suite à un interview du futur secrétaire d’État du Saint-Siège, Mgr Pietro Parolin, paru dans un journal vénézuélien. Du coup, on spécule beaucoup sur les intentions du pape François…
Actuellement nonce apostolique au Venezuela, Mgr Parolin (notre photo) a donné, avant sa prise de fonction à Rome le 15 octobre prochain, une interview au quotidien vénézuélien El Universal. Et à la question de savoir si le célibat est un dogme intouchable, il a bien évidemment répondu que ce n’était pas un dogme de l’Église et que par conséquent, « il peut être discuté parce que c’est une tradition ecclésiastique. » Précisant que l’on peut « parler, réfléchir et approfondir ces thèmes qui ne sont pas définis dans la foi et penser à quelques modifications », Mgr Parolin a cependant insisté sur le fait que « toutes ces décisions doivent être prises dans le but d’unir l’Eglise, pas de la diviser ». « C’est un grand défi pour le pape », a poursuivi l’ecclésiastique.
Ordonner des hommes mariés
Beaucoup se sont « emballés » à cette réponse, y voyant une ouverture future de la part du Vatican sur la possibilité du mariage des prêtres. On en n’est sûrement pas encore là. Selon le Père Tommy Scholtes, du service interdiocésain de presse et d’information, c’est plutôt la possibilité d’ordonner des hommes mariés qui est ici en jeu et non pas la possibilité que des prêtres se marient. Dans le journal « Le Soir », l’attaché de presse de la Conférence épiscopale reste cependant dubitatif sur le fait qu’une telle possibilité puisse être la solution au problème des vocations. « La majorité des évêques pensent que le problème de la vocation et de la prêtrise est d’abord un problème de foi de la société en Occident. Certains hommes mariés pourraient penser à l’ordination si c’était possible. Mais ne nous faisons pas non plus trop d’illusions en croyant que c’est automatiquement la solution à la question des vocations. »
Cet avis reflète la pensée de Mgr Léonard qui, lui non plus, n’est pas réticent à une discussion afin d’autoriser les hommes mariés à accéder à la prêtrise. Dans son nouveau livre intitulé « A mes séminaristes », qui paraîtra au printemps 2014, l’archevêque de Malines-Bruxelles estime qu’il existe de bons arguments pour ouvrir cette discussion, mais que le manque de prêtres n’en fait pas partie. Et si réforme sur la question il y a, elle ne devra « en aucun cas ternir l’envie et la valeur du célibat », précise Mgr Léonard.
Le célibat, une règle depuis le XVIe siècle
Le célibat des prêtres est au départ une tradition dans l’Église d’Occident que le concile de Trente (XVIe siècle) a établie en règle. Depuis Vatican II, quelques cardinaux ont parfois invité à voix haute à une évolution de cette discipline, mais aucun des derniers papes n’a laissé le moindre doute sur une possible révision de cette obligation. L’abbé Gabriel Ringlet parle même de problématique « verrouillée » jusque-là. Et c’est pourquoi il voit dans les propos du futur « premier ministre » de la Curie, un réel tournant du Saint-Siège sur la question. « En lisant la déclaration nuancée de Mgr Parolin dont on dirait qu’elle prépare le terrain en vue d’une vaste discussion à laquelle seraient sans doute associés les évêques – par exemple un synode sur la question – je me demande si la première étape ne sera pas d’accepter que des hommes mariés deviennent prêtres. Ce serait un premier pas qui appellerait les autres… » explique-t-il dans « Le Soir ».
Quant à au pape François, du temps où il était archevêque de Buenos d’Aires, il s’était dit favorable au maintien du célibat, « parce que, sur dix siècles, on a eu plus d’expériences positives que de défaillances (…). Mais cela peut changer », concluait-il*, condamnant toute « double vie ».
Pierre GRANIER
*In « Sur la terre comme au ciel », livre d’entretiens publié en 2010 – Robert Laffont