Les origines de l'Assomption, qui sera fêtée ce 15 août dans toute l'Eglise à travers le monde, sont très obscures, car on n'en trouve aucune mention dans le Nouveau Testament. Mais ce qui est sûr, par contre, c'est qu'elle fut une fête bien avant de devenir un dogme dans l'Église catholique.
Très tôt, les chrétiens ont eu le pressentiment que la Mère de Dieu, du fait de son rôle primordial dans l'histoire du Salut, ne pouvait pas avoir connu la corruption de la mort. Cette intuition – qui sera ensuite approfondie par les Pères de l'Église, et plus particulièrement saint Jean Damascène – trouve son origine dans un texte apocryphe du milieu du Ve siècle. Celui-ci rapporte la mort de la Vierge Marie à Jérusalem, entourée des Apôtres, son désir de quitter la terre pour rejoindre son Fils, ses funérailles solennelles, puis la venue du Christ pour la ramener à la vie et l'emporter au ciel. Un schéma que l'on retrouve surtout sur les icônes byzantines, mais aussi sur de nombreux tympans de cathédrale, tels celui de Senlis, le plus ancien de France.
Méfiance des théologiens
Il faut toutefois attendre le VIIe siècle pour voir cette fête mariale héritée de l'Église d'Orient arriver à Rome, grâce au pape Théodore (642-649), originaire de Constantinople. Elle porte d'abord le nom de Dormition de Marie, puis celui de Repos de Marie (Pausatio), et enfin, vers 770, celui d'Assomption. En 813, le Concile de Mayence la rend obligatoire à tout l'empire franc. En 847 une octave est jointe à cette solennité par le pape Léon IV, et en 863, le pape Nicolas Ier plaça la fête de l'Assomption au même plan que les fêtes de Noël et de Pâques.
Toutefois, l'Assomption en tant que doctrine ne semble pas prendre en Occident, où les textes sur lesquels elle repose sont alors vus avec méfiance. Il faudra une pseudo-lettre de saint Augustin – il est dans les mœurs de l'époque de publier de tels documents – pour renverser le courant et entraîner, au XIIe et au XIIIe siècle, Albert le Grand, Bonaventure et Thomas d'Aquin à l'affirmation de l'assomption corporelle de Marie.
Sous la caution de ces théologiens prestigieux, la culture populaire put alors développer certaines formes plus expressives de foi en l'honneur de l'Assomption de Marie, même si ce n'est qu'au XVIIe siècle qu'apparurent les premières processions en France. En 1637, le roi Louis XIII, qui désespérait de ne pas avoir d'enfant, demanda effectivement à chaque paroisse de son royaume d'organiser une procession le 15 août en l'honneur de la Vierge Marie. Il espérait ainsi obtenir de Dieu la grâce d'avoir un héritier. Un an plus tard, son vœu était exaucé puisque naissait Louis Dieudonné, mieux connu sous le nom de Louis XIV. Ce qui ne fit qu'accroître l'importance de cette fête.
Pression populaire
L'Église catholique ne ressent pas pour autant le besoin d'ériger en dogme cette croyance. C'est seulement après la proclamation par Pie IX du dogme de l'Immaculée, dans le grand courant de dévotion mariale du XIXe siècle, que des pétitions commencèrent à affluer à Rome pour que soit officiellement défini le dogme de l'Assomption. De 1854 à 1945, huit millions de fidèles, 1.322 évêques et 83.000 prêtres, religieux et religieuses écrivirent au pape en ce sens. Pie XII finira par en faire un dogme de la foi catholique, en 1950
Pascal ANDRÉ