Quatre jours après le départ du pape François, qui n'a pas abordé la question pendant son séjour au Brésil, la présidente Dilma Rousseff a promulgué une loi visant à protéger les victimes de violences sexuelles. L'Eglise catholique n'est pas contente: elle y voit un premier pas vers une légalisation plus ample de l'avortement.
Lors des élections présidentielles de 2010, au terme desquelles elle a été élue, Dilma Roussef, pourtant athée, s'était engagée à ne pas dépénaliser l'avortement, autorisée au Brésil uniquement en cas de viol (jusqu'à huit semaines de grossesse) ou quand la vie de la mère est en danger. Mais le 1er août dernier, quatre jours après le départ du pape, elle a promulgué une loi visant à protéger les victimes de violences sexuelles. A première vue, rien de vraiment blâmable, sauf que cette mesure rend obligatoire le traitement d'urgence des victimes de violences sexuelles dans les hôpitaux publics (et gratuits) et leur accès à des médicaments pour empêcher la grossesse non désirée, comme la pilule du lendemain.
Une premier vers une dépénalisation élargie
Pour la direction de la Conférence nationale des évêques du Brésil, le point le plus polémique du projet est la mesure dénommée "prophylaxie de la grossesse". Associer la grossesse à une maladie qui doit être évitée est effectivement, à leurs yeux, inadmissible. Ils y voient un premier pas vers une dépénalisation élargie de l'avortement.
Certaines Eglises évangéliques avaient même annoncé qu'elles feraient campagne contre Mme Rousseff lors de l'élection présidentielle d'octobre 2012, si elle n'opposait pas son véto aux aspects les plus controversés, mais cette dernière n'a absolument pas tenu compte de leurs mises en garde.
Viols en hausse de 157% en trois ans
Pour l'auteur de cette loi, Iara Bernardi, députée du Parti des Travailleurs, "c'est une question de santé publique et de défense des droits de l'homme". Il est vrai que le Brésil a fait face, ces trois dernières années, à une augmentation de 157% de nombres de viols dans le pays et qu'il a été recensé une moyenne de 16 viols par jour en 2012 rien que dans l'Etat de Rio de Janeiro. Il y aurait actuellement au Brésil 12.704 personnes détenues en prison pour viol, 8.005 pour attentat à la pudeur et 665 pour corruption de mineurs. L'exploitation sexuelle des enfants est également une des problématiques majeures du pays.
Pascal ANDRE