Après ses premières journées mondiales de la jeunesse à Rio au Brésil, le pape François a donné, dans le vol de retour pour Rome, sa première conférence de presse. Face à 70 journalistes accrédités à bord, et ce malgré sa fatigue, le pape Argentin est resté plus d’une heure et quart debout à répondre, l’une après l’autre, aux questions d’actualité. Controverses, confidences, un challenge réussi haut la main pour cet homme de 76 ans, à 40.000 pieds au-dessus de la mer.
Si le pape jésuite ne s’est pas attardé sur les questions concernant l’avortement ou le mariage homosexuel, les renvoyant d’un simple mais ferme « Vous connaissez la position de l’Église« , il s’est en revanche étendu sur la place des homosexuels et sur le rôle des femmes dans l’Église.
A propos du lobby gay…
« On écrit beaucoup sur ce lobby gay, je ne l’ai pas encore trouvé. Je n’ai encore rencontré personne au Vatican qui me montre sa carte d’identité avec écrit ‘gay’. On doit distinguer le fait d’être homosexuel, et le fait de faire partie d’un lobby, car les lobbies ne sont pas bons », a-t-il affirmé, alliant humour et sérieux. »Si une personne est homosexuelle, qui suis-je pour la juger ? Le Catéchisme dit de ne pas marginaliser ces personnes. Le problème n’est pas d’avoir cette tendance, nous devons être frères, le problème est de faire des lobbies, lobbies des affaires, lobbies politiques, lobbies des francs-maçons, c’est cela le problème le plus grave« .
« Une Eglise sans femmes c’est comme le collège apostolique sans Marie »
Sur le rôle des femmes dans l’Eglise, le pape est revenu sur les textes de Paul VI. « Paul VI a écrit quelque chose de très beau sur les femmes, mais je crois que l’on doit aller plus loin dans l’explication du rôle et du charisme de la femme. On ne peut imaginer une Eglise sans femmes actives. Le rôle de la femme dans l’Eglise n’est pas seulement la maternité, la mère de famille, il est plus fort, c’est celui de l’icône de la Vierge, celle qui aide à faire grandir l’Eglise« . Il a constaté également qu’une théologie profonde de la femme dans l’Eglise n’avait pas encore été réalisée. « Nous avons seulement dit : la femme peut faire ceci, elle peut faire cela. Elle fait l’enfant de chœur, elle lit une lecture, elle fait la présidente de Caritas, mais il y a plus, il faut une profonde théologie de la femme ». Quant à l’ordination de femmes à la prêtrise, le pape François a rappelé que « la porte avait été fermée par Jean-Paul II« .
« Il y a des saints à la Curie ! Et puis il y a l’un ou l’autre personnage moins saint, et ce sont eux qui font le plus de bruit ! »
Pour le pape, la réforme de la curie romaine ne signifie pas le rejet de ceux qui y travaillent. « Il y a des saints dans la curie« , a-t-il relevé, admirant des cardinaux qui « aident les pauvres de manière cachée« , ont de « petits appartements« , refusant qu’un scandale cache la forêt de « gens loyaux« . « S’il y a de la résistance, je ne l’ai pas encore vue« , a-t-il lancé, tout en préférant « un collaborateur disant qu’il n’est pas d’accord, qu’un disant bien à tout« .
Le mystère de la valise noire…
Andrea Tornielli, du quotidien La Stampa, a interrogé le pape sur la petite valise noire qu’il portait tout le temps avec lui pendant ce voyage. Pourquoi la porte-t-il personnellement et que contient-elle ? François, très amusé, a assuré qu’elle « ne contenait pas les codes de la bombe nucléaire !« . « J’ai tout simplement toujours agi de la sorte : quand je voyage, je porte mes affaires. Et dans la valisette, j’ai mon rasoir, mon bréviaire, mon agenda, un livre à lire (cette fois un livre sur Sainte Thérèse, que je vénère). Quand je voyage, je porte mon bagage, c’est normal« .
Confidence pour confidence, le pape a des fourmis dans les jambes !
Le pape a fait de nombreuses confidences très personnelles durant cette conférence de presse « aérienne ». Comme celle de se sentir enfermé au Vatican. « Si vous saviez combien de fois j’ai eu envie d’aller dans les rues de Rome, et en ce sens je me sens un peu en cage. Mais les hommes de la Gendarmerie vaticane sont bons, je leur suis reconnaissant, maintenant ils me font faire un peu plus. J’aimerais aller dans la rue, mais je comprends que ce n’est pas possible !« .
L’affaire papamobile « dé-blindée »…
Le Pape est revenu sur l’organisation du voyage au Brésil, et a abordé les problèmes posés par les questions de sécurité, qui préoccupaient à juste titre les organisateurs. « Aucun incident n’est survenu à Rio. Avec un peu moins de sécurité, j’ai pu me trouver au milieu des gens, les embrasser, les saluer, sans voitures blindées« . François a reconnu que « le risque existe toujours qu’il y ait un fou qui fasse quelque chose, mais il y a aussi le Seigneur, non ?« , interpellant ainsi les 70 journalistes à bord. « Établir un espace de blindage entre l’évêque et le peuple représente une vraie folie, et moi je préfère la folie d’être dehors, en prenant des risques. Oui cette folie d’être dehors, la proximité, nous fait du bien à tous« .
AL/Radio Vatican/ La Croix