Le pape François a clôturé sa première Semaine sainte en tant que souverain pontife en donnant sa bénédiction « Urbi et Orbi » devant 250.000 fidèles ayant assistés à la messe de Pâques sur la Place Saint-Pierre. Il a appelé à la paix et invité les non-croyants « à faire un pas vers Jésus ».
Tous les yeux étaient donc tournés vers Rome et plus particulièrement vers le Vatican en ce jour de Pâques, pour y entendre le premier discours du pape François. Un souverain pontife qui, une nouvelle fois, a conquis les cœurs par son attitude de simplicité et de spontanéité.
Etre au service
Peu après la messe de la Résurrection, le pape a d’abord eu un geste inédit : il a salué un par un les cardinaux présents, avant de sillonner les allées de la place Saint-Pierre en « papamobile » ouverte, saluant les fidèles, souriant largement, brandissant parfois un pouce levé en signe d’approbation et s’arrêtant par moment pour embrasser un enfant ou même pour recevoir un maillot d’un joueur de football de son équipe préférée. Comment ne pas garder aussi en mémoire cette scène touchante du pape embrassant un jeune handicapé, dont le visage rayonnait littéralement de bonheur ?
Au-delà de ces gestes qui confirment la volonté du souverain pontife d’être proche du peuple de Dieu, on peut écrire que le pape François a vraiment marqué ces trois jours saints, incité l’Église à « sortir vers les périphéries du monde » -ce qu’il fait depuis le début de son pontificat – et invitant les jeunes à « ne pas se laisser voler leur espérance ». Clairement, le pape François montre qu’il considère que le ministère pétrinien est avant tout un service. Cela s’est illustré le Jeudi saint par le lavement des pieds des jeunes détenus du centre de détention pour mineurs Casal del Marmo, à la périphérie de Rome, dont ceux d’une jeune musulmane d’origine serbe. Une « première » puisque, habituellement, ce lavement des pieds est réalisé par le pape sur des prêtres à Saint-Pierre de Rome ou bien en la cathédrale du Latran. Il a aussi invité les prêtres à ne pas être tristes.
Appel à la paix et invitation aux non-croyants
Il faut aussi relever le message Urbi & Orbi, prononcé le dimanche de Pâques, après la messe. Là aussi, le pape a innové, gardant sa simplicité. Alors que tant Jean-Paul II que Benoit XVI avaient l’habitude de souhaiter une sainte fête de Pâques en plusieurs dizaines de langues, le pape François, s’exprimant seulement en italien, a d’abord souhaité « Bonnes Pâques » aux 250.000 fidèles réunis au pied de la loggia de la basilique et il a terminé son intervention par un surprenant « Bon appétit » !
Néanmoins, son discours préalable à la bénédiction a été très en phase avec l’actualité, peu réjouissante qui se déroule dans le monde, passant en revue tous les continents. Il a ainsi parlé de la crise économique des conflits au mail, en République Démocratique du Congo, en Centrafrique et au Nigéria, faisant allusion aux otages. Il a demandé pour qu’une solution politique soit trouvée en Syrie et pour que Palestiniens et Israéliens puissent vivre en paix. Enfin, il a appelé au calme entre les deux Corées, à la suite des récentes déclarations « guerrières » de Pyongyang.
Donner la priorité au Christ
Mais ce qu’on retiendra surtout, c’est qu’au cours du triduum pascal, outre ces gestes inédits, le pape François a insisté sur la priorité à donner au Christ, avec à la clé un appel incessant à Le suivre. Il a aussi rappelé que la Résurrection, est une « nouveauté ouverte à tous ».
Lors de la veillée pascale, samedi soir, le pape François a déclaré : « Accepte que Jésus ressuscité entre dans ta vie, accueille-le comme ami, avec confiance : Lui est la vie ! Si jusqu’à présent tu as été loin de Lui, fais un petit pas : il t’accueillera à bras ouverts. Si tu es indifférent, accepte de risquer : tu ne seras pas déçu. S’il te semble difficile de le suivre, n’aie pas peur, fais-lui confiance, sois sûr que Lui, il t’est proche, il est avec toi et te donnera la paix que tu cherches et la force pour vivre comme Lui le veut. » Un élément n’a pas échappé : le tutoiement. Les observateurs y voient le signe d’un pasteur personnellement engagé. Tutoiement qu’on a retrouvé dans le tweet envoyé le jour de Pâques.
Le pape François a répété : « Parfois, il nous semble que Dieu ne répond pas au mal, qu’il demeure silencieux. Mais en réalité, Dieu ne condamne pas, il aime et il sauve ». Il a également lancé à deux reprises durant ses jours,
Évoquant, durant la veillée pascale, l’attitude des femmes devant le tombeau vide, qui restent « hésitantes, perplexes, pleines de questions », le pape a lancé à deux reprises : « Nous avons peur des surprises de Dieu ; nous avons peur des surprises de Dieu ! Il nous surprend toujours ! » D’où son appel : « Ne nous fermons pas à la nouveauté que Dieu veut porter dans nos vies ! (…) Il n’y a aucun péché qu’il ne puisse pardonner si nous nous ouvrons à Lui. »
Un appel à la réforme discret mais fort
Dans un article, le correspondant à Rome du journal La Croix, Frédéric Mounier, aborde le fait que le pape a aussi fait clairement allusion aux besoins de réformes de l’Eglise, même si cela s’est parfois fait indirectement. Ainsi, le Vendredi saint, « c’est dans un silence du pape que s’est fait entendre un vif appel à la réforme », écrit-il. Lors de la célébration de la Passion du Seigneur, au cours de son homélie, le prédicateur de la Maison pontificale, le capucin Raniero Cantalamessa, seul à prendre la parole comme le veut la liturgie, s’est appuyé sur un texte de Franz Kafka, déclarant : « certains vieux édifices qui, au fil des siècles, pour s’adapter aux exigences du moment, se sont remplis de cloisons, d’escaliers, de petites salles ».
Et de poursuivre : « Le moment arrive où l’on s’aperçoit que toutes ces adaptations ne répondent plus aux exigences actuelles, qu’elles sont même un obstacle, et il faut avoir le courage d’abattre tout cela, et de ramener l’édifice à la simplicité et à la linéarité de ses origines. » Se tournant vers le pape, le prédicateur a conclu : « C’est la mission que reçut un jour un homme qui priait devant le crucifix de San Damiano : “Va, François, et répare ma maison.” », souligne encore F. Mounier pour qui, « l’allusion aux temps à venir du pape François était transparente ».
C’est donc par des paroles fortes, répétées à plusieurs reprises, que le pape François a voulu marquer ces jours de fête pascale. Dommage que notre RTBF nationale, plutôt que de reprendre ces mots significatifs pour l’avenir, ait préféré « casser » cette approche en faisant suivre la séquence sur la bénédiction papale d’un sujet sur la pédophilie dans l’Eglise belge, s’appuyant sur des déclarations fragmentaires, tirées de leur contexte, dites par notre archevêque lors du « Grand Jury Le Soir-RTBF » !
Jean-Jacques Durré
(c) Photo: La Croix