Plus de quatre ans après les pogroms de 2008 qui ont ensanglanté l’Etat indien de l’Orissa, les chrétiens de cette région située au nord-est de l’Inde, au bord du Golfe du Bengale, vivent toujours dans la peur. Ils sont aujourd’hui encore victimes d’expropriations, de conversions forcées et de menaces de mort de la part des hindouistes. La situation est particulièrement inquiétante au Kandhamal, où les assassinats de chrétiens continuent d’être classés sans suite et les exactions commises en toute impunité.
Le 12 décembre dernier, une douzaine de maisons appartenant à des chrétiens aborigènes de la ville de Raikia dans le district du Kandhamal, ont été entièrement rasées sur ordre des autorités locales. L’explication officielle était que ces habitations se trouvaient sur le tracé d’une route en projet, mais les associations de défense des droits de l’homme et la communauté chrétienne de Raikia soutiennent qu’il s’agit d’un nouveau cas de corruption des fonctionnaires locaux. Les chrétiens expulsés ne nourrissent aucun espoir quant au dépôt éventuel d’une plainte au commissariat, la police locale ayant elle-même procédé à l’évacuation forcée, sans qu’aucun document officiel n’ait été fourni pour en justifier la légalité.
Dans le village de Midiakia, qui abrite différentes familles chrétiennes, catholiques, méthodistes ou baptistes, les violences antichrétiennes n’ont jamais cessé, aucun des responsables des massacres de 2008 n’ayant été arrêté. En juillet 2011, un pasteur, le Révérend Michael Nayak, a été tué lors d’une embuscade par des hindous radicaux. La police locale a classé l’affaire, comme à Raikia et dans tant d’autres localités du district où les hindouistes continuent de faire régner la terreur.
Selon un bilan effectué en août dernier par un collectif rassemblant des journalistes et des militants des droits de l’homme, dans le seul district du Kandhamal, au moins 10.000 personnes sont encore sans abri (sans compter les 150 familles provisoirement abritées dans des ghettos du gouvernement). Les quelques chrétiens revenus dans leurs villages sont toujours en butte aux menaces des hindouistes, subissent conversions forcées et expulsions illégales, sans avoir jamais touché les indemnités que le gouvernement de l’Orissa s’était engagé à leur verser auprès de l’Union indienne et de la communauté internationale.
A ce jour, pour plus de 2.433 personnes acquittées par les tribunaux spéciaux mis en place afin de juger les crimes commis en 2008, seulement 452 personnes ont été inculpées. Sur les milliers de cas de violences, qui avaient été recensés, moins de la moitié ont été retenus par la police et la plupart n’ont pu être jugés, les témoins s’étant désistés à la suite des menaces de mort proférées contre eux par les hindouistes.
Sajan K. George, président du Global Council of Indian Christians (GCIC), une ONG œcuménique qui défend en Inde les droits des chrétiens, ne cesse de dénoncer une « persécution incessante et pernicieuse » de l’ensemble des chrétiens du Kandhamal et exhorte à la création d’une commission impartiale qui mène des enquêtes sur les assassinats des chrétiens commis dans une indifférence générale.
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