Les 300 personnalités invitées par Benoît XVI à la rencontre interreligieuse d’Assise (Italie), le 27 octobre 2011, ont souligné que la religion ne devait pas être instrumentalisée à des fins violentes, ni être la cause de conflits. " La croix ne signifie pas croisade", a rappelé l'un d'eux.
Le patriarche œcuménique orthodoxe de Constantinople a exprimé, le 27 octobre 2011, ses craintes pour les communautés chrétiennes du Moyen-Orient:"Dix ans après les événements dramatiques du 11 septembre et à l’heure où les ’printemps arabes’ n’ont pas mis fin aux tensions intercommunautaires, la place des religions dans les fermentations du monde reste ambiguë", a déclaré le patriarche dans la basilique Notre-Dame-des-Anges d’Assise. "Nous continuons, en effet, à craindre la marginalisation accrue des communautés chrétiennes du Moyen-Orient". Le responsable orthodoxe a lancé un appel à se "lever contre la déformation du message des religions, de ses symboles par les auteurs de la violence". Bartholomée Ier a souligné la nécessité d’"envisager l’autre comme sujet de relation et non plus comme objet d’indifférence. Car c’est de l’indifférence que naît la haine, c’est de l’indifférence que naît le conflit, c’est de l’indifférence que naît la violence". "En tant que responsables religieux, notre rôle est de faire la promotion du dialogue et de montrer, par notre exemple quotidien, que nous ne vivons pas uniquement les uns contre les autres, ou encore les uns à côté des autres, mais bien les uns avec les autres", a-t-il affirmé.
Le patriarche de Constantinople s’est également élevé contre "les voix de ceux magnifiant le protectionnisme. Car la mondialisation porte dans son sillage un courant relativiste engendrant par opposition des replis communautaires et identitaires dans lesquels se cache l’inimitié".
A sa suite, d’autres leaders religieux ont pris la parole. Aux yeux du rabbin David Rosen, "pour beaucoup, dans le monde, la paix est une nécessité pragmatique" et il ne faut pas "minimiser la bénédiction que représente pour notre monde un tel pragmatisme".
Le pasteur Olav Fykse Tveit, secrétaire général du Conseil œcuménique des Eglises (COE) a souligné que la croix des chrétiens ne signifie pas "Croisade", "mais que c’est un signe de la façon dont l’amour de Dieu embrasse chacun, même l’autre". Il a assuré que le COE s’engageait à "travailler à une paix juste à Jérusalem". Jérusalem, a-t-il expliqué, "est la ville qui par son nom est appelée à donner une vision de paix, mais qui au cours de l’histoire est devenue si souvent un lieu de conflit". Elle est aussi, a-t-il déploré, "un puissant rappel de la façon dont les meilleurs choses peuvent aussi se tourner vers le pire".
Au cours de son intervention, l’archevêque de Canterbury, l’anglican Rowan Williams, a assuré que les leaders religieux n’étaient pas réunis à Assise autour d’un "dénominateur commun minimum, mais pour élever la voix depuis les profondeurs de (leurs) traditions, dans toute leur singularité, de façon à ce que la famille humaine puisse être plus pleinement consciente de quelle sagesse il y a à puiser dans la lutte contre la folie d’un monde encore obsédé par la peur et les soupçons, encore amoureux de l’idée d’une sécurité basée sur une hostilité défensive".
"L’homme ne fait pas l’histoire, mais l’histoire c’est nous”, a affirmé enfin la philosophe et écrivain française d’origine bulgare Julia Kristeva, seule femme et seule non-croyante à prendre la parole devant le pape. Elle a ensuite mis en garde contre l’homme, désormais capable de "détruire la terre et lui-même au nom de ses croyances, religions ou idéologies". "La rencontre de nos diversités ici, à Assise, témoigne que l’hypothèse de la destruction n’est pas la seule possible", a assuré Julia Kristeva. "L’ère du soupçon ne suffit plus", selon la philosophe, pour qui il faut passer à "l’ère du pari", afin que l’homme puisse "poursuivre longtemps son destin créatif".
photo : (c) kerknet/Sir/Siciliani Gennari
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