Découvrez la lettre de Mgr Delville et Mgr Van Hecke: « Quatre-vingts ans après le 8 mai 1945 : quelle paix pour aujourd’hui? »


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Découvrez la lettre de Mgr Delville et Mgr Van Hecke: « Quatre-vingts ans après le 8 mai 1945 : quelle paix pour aujourd’hui? »
Le mémorial du Mardasson témoigne de la reconnaissance de la population belge aux soldats américains qui, durant l'hiver 1944-1945, donnèrent leur vie lors de la bataille des Ardennes. © Adobe Stock
Par Jean-Pierre Delville et Lode Van Hecke
Publié le
4 min

Mgr Jean-Pierre Delville (Liège) et Mgr Lode Van Hecke (Gand), évêques référendaires pour les questions de société et de diaconie, co-signent une carte blanche à l’occasion de l’anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale en Europe : "Jésus nous invite à dépasser les logiques humaines de guerre et de puissance, sans les ignorer". Découvrez-la en intégralité ci-dessous.

Quatre-vingts ans après le 8 mai 1945 : quelle paix pour aujourd’hui ?

En ce 8 mai 2025, nous fêtons les quatre-vingts ans de la fin de la Deuxième Guerre Mondiale et de la victoire des Alliés sur le nazisme. La signature de la capitulation de l’Allemagne nazie a été faite à Reims le 8 mai 1945 et le 9 mai à Berlin. Elle a été préparée par les accords de Yalta (1945) , signés par les Alliés, en particulier les Anglais, les Américains et les Russes. C’est l’occasion pour nous tous de nous souvenir de ces événements et de nous engager résolument pour la paix. 

Les deux Guerres Mondiales, 1914-1918 et 1939-1945, ont semé la ruine et la désolation sur le continent européen et sur le reste de la planète. Le génocide des Juifs, la Shoah, entraînant six millions de morts, et les nombreuses victimes de la seconde Guerre mondiale parmi les populations de tous les pays ont montré jusqu’à quelle atrocité la guerre pouvait mener.

Ne pas humilier les vaincus

La stabilisation de la paix a été réalisée par la fondation de l’Organisation des Nations Unies (1945), et par la mise en place du Conseil de l’Europe (1949). L’Union Européenne a été fondée pour garantir la paix en Europe, sous la forme de la CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) en 1952. Cette construction a été élaborée par Robert Schuman, Konrad Adenauer, Alcide De Gasperi et Paul-Henri Spaak et définie par le Traité de Rome le 25 mars 1957. Il apparaissait clairement, au sortir de la Guerre 1939-1945, qu’il ne fallait pas humilier les vaincus.

On ne doit pas oublier l’élan historique qu’a donné la Déclaration de Robert Schuman du 9 mai 1950 : «La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent. La contribution qu’une Europe organisée et vivante peut apporter à la civilisation est indispensable au maintien des relations pacifiques».

La Communauté européenne est née d’un projet de paix qui a su réconcilier d’anciens ennemis, devenus frères. Un procès en béatification est en cours pour Robert Schuman.

Les matières premières : de la paix à la guerre

Alors qu’aujourd’hui la guerre fait rage en Ukraine, à l’Est de l’Europe, et dans bien des parties du monde, spécialement en Afrique et au Moyen-Orient. Alors que la paix civile est menacée et mise à mal dans nos sociétés, les paroles de Robert Schuman retrouvent toute leur actualité et résonnent comme un appel.

Comme le pressentait Robert Schuman, « l’Europe préfigure la solidarité universelle de l’avenir ». Ceci ne dilue ou ne dissout en aucune manière les nations particulières. La force de cette Europe, c’est son projet de solidarité qui ne pourra se réaliser que par l’implication des peuples, ce projet qui est la perpétuation de ses valeurs de fondation : la réconciliation, la paix, la stabilité à travers une solidarité entre tous.

La paix après la 2e Guerre mondiale a été établie en particulier sur le contrôle des matières premières. Il n’est pas anodin de constater que l’Union européenne a commencé comme Communauté européenne du charbon et de l’acier. Aujourd’hui à fortiori, le contrôle des matières premières et des métaux rares est à l’origine de différentes guerres. Mais c’est au détriment du contrôle de l’environnement et du climat. Il est de notre devoir de travailler pour un futur de paix, qui soit basé sur une recherche scientifique nouvelle et sur un sens des valeurs évangéliques de solidarité et d’empathie.

Dépasser les logiques humaines de puissance

De quelle paix parlons-nous ?

Le pape François a été un fervent défenseur de la paix dans le monde : « Toute guerre est une défaite. Tout est à gagner avec la paix », disait-il. François n’a-t -il pas planté un olivier de la paix en avec les responsables israéliens et palestiniens ? N’a-t-il pas baisé les pieds de dirigeants soudanais en guerre ?

Tout chrétien doit s’inspirer de Jésus, qui a dit : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix… Ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne » (Jean 14,27).  Cette paix nous la recevons de Jésus lui-même et nous l’échangeons durant les eucharisties. Jésus, dans l’eucharistie se fait serviteur et non maître. La vivons nous déjà nos vies ?

Jésus nous invite à dépasser les logiques humaines de guerre et de puissance, sans les ignorer.  Il invite à recevoir de lui une grâce pour construire la paix qui est don de vie et non de mort. « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Matthieu 5,9).

+ Mgr JP Delville, évêque de Liège, et Mgr L Van Hecke, évêque de Gand
(intertitres et chapô de CathoBel)


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