Retrouvez le commentaire de l’évangile du 2e dimanche de Carême C par le frère Laurent Mathelot : « La transfiguration »


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Retrouvez le commentaire de l’évangile du 2e dimanche de Carême C par le frère Laurent Mathelot : « La transfiguration »
La Transfiguration, par Giovanni Bellini. Huile sur panneau, vers 1478-1479. Museo e Real Bosco di Capodimonte.
Par Laurent Mathelot
Publié le
3 min

Le récit de la Transfiguration, tel que rapporté par Luc, est une composition remarquable.

Cette œuvre déborde de symboles juifs et chrétiens, tissant des liens subtils avec l’Ancien et le Nouveau Testament. Sa richesse est si graphique qu’on est tenté de n’y voir qu’un texte symbolique, dépourvu de réalité tangible. Quelques éléments sautent aux yeux:

  • La lumière qui émane du Christ, rappelant celle de Moïse redescendant du Sinaï après avoir contemplé Dieu;
  • Moïse et Elie, figures de la Loi et des Prophètes, annonçant leur accomplissement en Jésus;
  • La voix divine, identique à celle du baptême, qui résonne à nouveau;
  • L’écho de Souccot, la fête des Tentes, célébrant à la fois l’aide de Dieu durant l’Exode et la récolte de la Terre promise.

Ainsi ancré dans les Ecritures et la tradition juive, ce passage pourrait être une anticipation littéraire de la Résurrection, une clé offerte au lecteur pour comprendre ce qui suivra. On pourrait alors le réduire à une image, une leçon visuelle. Rien ne se serait produit: ni transfiguration physique devant Pierre, Jacques et Jean, ni voix céleste, ni apparition de Moïse et Elie. Ce ne serait qu’une métaphore forte, inventée par Luc, pour parler de l’au-delà de la mort. Vous pouvez y croire: une belle image, rien de plus.

Considérant que là où l’herbe est plus verte, le ciel s’illumine, une autre lecture émerge. Ce récit traduirait la vision intérieure des disciples face à Jésus en prière. On sait que la joie colore notre vision du monde plus vivement - un fait étudié en psychologie - tandis que la tristesse l’assombrit. En observant la sérénité du Christ communiant avec son Père, les apôtres auraient vu la scène rayonner, reflétant leur propre émerveillement. Le Christ, contemplé en Dieu, éclaire notre regard. Cette interprétation, déjà moins symbolique, ancre le texte dans une expérience réelle: la prière transforme notre perception. Certains lieux saints, certaines âmes en prière, ne dégagent-ils pas une aura lumineuse?

Reste l’interprétation littérale qui voit dans la Transfiguration une métamorphose concrète. La science observe effectivement que la prière ou la méditation modifie le cerveau, comme le montrent les scanners de moines. Le terme grec, "métamorphosis", suggère une transformation physique du Christ sous les yeux des disciples, altéré par la prière. Cela dépasse le regard: quelque chose a changé en lui.

Ce sens littéral heurte notre rationalité moderne. Admettre que l’Esprit Saint transforme la chair défie la science. Pourtant, nier cette action revient à rejeter les guérisons surnaturelles et la résurrection des corps, pourtant essentielles au mystère de l’Incarnation.

Chaque lecture - préfiguration de notre résurrection, reflet de notre rayonnement en Dieu, ou métamorphose par la prière - ouvre une porte vers notre propre transfiguration en Christ. Ainsi, deux questions se posent: Comment la prière marque-t-elle ma vie, mon esprit, mon corps? Que change physiquement en moi l’intimité avec Dieu?

Frère Laurent MATHELOT, o.p.

Catégorie : Sens et foi

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