La Vierge de La Gleize : un témoin miraculé de l’Offensive des Ardennes


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La Vierge de La Gleize : un témoin miraculé de l’Offensive des Ardennes
Par Vincent COLSON
Publié le - Modifié le
5 min

Durant l’Offensive des Ardennes, l’église de La Gleize a été lourdement endommagée, mais une statue du XIVe siècle a traversé les combats presque intacte. Classée Trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles en 2013, la Vierge de La Gleize demeure un élément majeur du patrimoine local et un témoin des événements historiques qui ont marqué le village.

Les commémorations des 80 ans de l’Offensive des Ardennes se terminent… Beaucoup de villages ardennais ont pris le temps, l’espace de quelques heures ou de quelques jours, d’évoquer les événements tragiques subis par les civils et par les combattants : reconstitutions historiques pour et par des passionnés, discours protocolaires pour perpétuer le devoir de mémoire, interviews des derniers témoins directs des événements…

A La Gleize (Stoumont), l’histoire de l’église et de sa Vierge du XIVe siècle a été évoquée au cours d’une veillée pour la paix…

L'église de La Gleize lourdement bombardée

L'église de La Gleize a servi d'hôpital pour les blessés des deux camps pendant les combats. Cela n’a pas empêché que l’édifice soit bombardé : effondrement du clocher, murs transpercés par des obus… Ces tirs aveugles ont enseveli des blessés sous les décombres… D’autres ont parfois miraculeusement survécu comme ce soldat allemand revenu à La Gleize 50 ans après l’offensive pour apporter une bougie en signe de paix et de souvenir de ses amis décédés à ses côtés…

Dans un tel contexte, les dégâts matériels viennent au second plan… mais la reconstruction de l’église et la préservation de son patrimoine étaient nécessaires pour les villageois : reconstruire leur village et leur église, effacer les traces de ces moments tragiques pour mieux se relever et espérer en des lendemains meilleurs…L’église fut reconstruite en deux ans, de 1949 à 1951…mettant fin à la célébration des offices dans des baraquements en planches installés dès 1945 dans le jardin du presbytère, lui aussi partiellement démoli…

La statue de la Vierge réapparaît, presque intacte

Outre les murs, le mobilier de l’église a été particulièrement endommagé pendant l’Offensive mais, fort heureusement, une pièce majeure a été préservée : la statue de la Vierge datée de la première moitié du XIVe siècle… Cette statue avait été repérée après la « première » libération du village en septembre 1944 par un officier américain, Walter Hancock, qui était chargé de dresser la liste des œuvres d’art à protéger en priorité…

En février 1945, il se rend de nouveau à La Gleize pour constater les dégâts causés par l’Offensive et mettre à l’abri ce qui peut encore l’être… Voyant que la Vierge est intacte (à l’exception d’un éclat dans son voile), il décide de l’emmener à l’évêché à Liège… L’opposition ferme de quelques habitants l’en dissuada et la Vierge fut finalement mise à l’abri dans la cave d’une maison du village, jusqu’à la reconstruction de l’église en 1951… Elle est toujours présente aujourd'hui dans l’église : le village veille sur elle et Elle veille sur le village…

La statue de la Vierge sortie des décombres de l’église de La Gleize en février 1945. | DR

En 2013, la statue est classée "Trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles"

Indépendamment de sa valeur spirituelle, la statue de la Vierge a été largement étudiée et décrite par des historiens de l’art. Grâce aux démarches entreprises par la Fabrique d'Eglise Notre-Dame de l'Assomption de La Gleize, elle a pu être classée en 2013, avec le qualificatif de Trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Son classement a été justifié « en raison de ses hautes qualités esthétiques, de son raffinement et de sa représentativité d’un courant stylistique qui caractérise la production mosane au cours des premières décennies du XIVe siècle, sous l’influence de Paris ».  L’arrêté de classement précise encore que « si les œuvres de cette production ne sont pas rares, la Vierge de La Gleize est la plus raffinée d’entre toutes ».   

Spécialiste de l’histoire de l’art ou simple passant prenant le temps de l’observer, l’expression que dégage la Vierge de La Gleize ne laisse personne indifférent :

Marie,

Ton regard est porté sur le monde,
Toi qui ouvres ton cœur à tous,
Rends nous attentifs à ceux qui sont délaissés.

Ton geste rassure et réconforte,
Toi qui as été présente auprès de ton Fils jusqu’à sa mort 
sur la croix,
Aide-nous à consoler ceux qui souffrent et qui peinent.

Ton attitude invite au calme et au respect,
Toi, Marie, Reine de la Paix,
Aide-nous à devenir des messagers de cette Paix.

Les conflits actuels pas oubliés lors des commémorations

Les événements tragiques vécus par les villages ardennais et notamment La Gleize il y a 80 ans font inévitablement penser aux situations vécues par certains pays du monde aujourd’hui, dont l’Ukraine.

Lors de la veillée pour la Paix organisée à l’église de La Gleize, Le moment le plus chargé d'émotion a été la lecture d'un poème (*) en ukrainien et en français par Lesia et Eli, une maman et sa fille, membres d'une famille de 5 personnes arrivée à Malmedy en mars 2022... Les derniers mots de ce poème "Je veux vraiment vivre en paix, aujourd'hui, demain et toujours..." n'ont laissé personne indifférent... et résonnent particulièrement avec la devise « Pélerins d’Espérance » de cette année jubilaire…

Dessin de Mira, 8 ans

(*) « Je veux vraiment vivre en paix », de Nadiya Krasotkina (https://krasotkina.com/)

Vincent COLSON
(titre, chapeau et intertitres : CathoBel)


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