En ce début d’année, la Conférence épiscopale s’est réunie pendant plusieurs jours pour réfléchir à l’avenir de l’Église belge pour la prochaine décennie. Un exercice complexe que nous avons proposé aux invités de « Décryptages ».
À quoi voulez-vous que l’Église catholique belge ressemble dans les dix prochaines années ? Une vaste question que se sont posés les évêques, mais aussi le frère Laurent Mathelot, prêtre dominicain, et Manu Van Lier, journaliste pour CathoBel. Tous deux, invités dans Décryptages cette semaine, ont partagé leur point de vue.
Une Église humble plutôt que modeste
Dans le compte-rendu de la rencontre des évêques, le porte-parole néerlandophone de la Conférence épiscopale, Geert De Kerpel, fait part, d'une réflexion spirituelle sur la situation de l'Église à laquelle se sont sont prêtés les évêque belges. L'un des mots clés était la "modestie". Laurent Mathelot regrette l'emploi de ce terme. "Pour moi, il y a quelque chose dans la modestie qui touche à l'effacement. Je préfère le terme ‘humilité’, qui est pour moi la simple reconnaissance de ce qu'on est." Pour lui, la modestie signifie ne pas dire pour ne pas choquer, être dans la retenue.
Manu Van Lier partage cet avis en soulignant qu’il faut "que l’Eglise se détache de cette tradition dominante, parfois moralisatrice aussi, pour trouver une nouvelle manière de toucher les cœurs, de transmettre son message et ses valeurs." Que ce soit par modestie ou avec humilité, il est essentiel aujourd’hui de reconnaître ses failles et ses faiblesses. L’Eglise a, selon lui, de nombreux chantiers à aborder, notamment en matière de fonctionnement, de pratique religieuse ou d’éducation à la foi.
Mettre en avant le positif
Être humble et modeste, c’est une chose, mais cela ne doit pas pour autant conduire à vivre caché. En réalisant le même exercice que les évêques, Manu Van Lier et Laurent Mathelot s’accordent sur un point : s’il y a eu de nombreux scandales ces dernières années, il y a aussi beaucoup de positif.
Pour illustrer son propos, Manu Van Lier prend l’exemple des abbayes trappistes. "Elles génèrent beaucoup d’argent grâce à la vente de leurs produits. Ce qu'on met moins en avant, c'est que cela permet vraiment une aide sociale dans la région où elles sont implantées. Ce genre d'exemple, il faut le mettre davantage en avant et ne pas être modeste par rapport aux actions positives qui profitent à toute la société."
Changer le discours
Pour Laurent Mathelot, "il faut véritablement parler autrement". Dans les homélies, il est nécessaire de quitter le discours moralisateur pour revenir à "une nourriture spirituelle. L’Eglise est, pour moi, la meilleure réponse aux grandes inquiétudes de ce temps. Face aux perturbations climatiques, aux grandes anxiétés et aux angoisses, l’Eglise a un véritable rôle à jouer."
Il ne s’agit pas, selon lui, de produire de grandes théories écologiques, par exemple, mais plutôt de montrer des exemples concrets d’une vie écologique. "Il faut que l’Église soit inspiratrice pour que nos églises se remplissent." Manu Van Lier complète cette pensée en rappelant qu’il faut aller chercher les gens là où ils se trouvent. De manière générale, il faudrait repenser la façon de communiquer. "La synodalité, c’est notre manière de faire réseau social", conclut Laurent Mathelot.
Un renouvellement porteur d’espoir
Le changement de discours pourrait bien accompagner les nouvelles nominations d’évêques. Mgr Harpigny, évêque de Tournai, et Mgr Warin, évêque de Namur, attendent le nom de leur successeur. Quant à Mgr Delville, évêque de Liège, il atteindra bientôt l’âge de la retraite. "Nous sommes à un changement de génération", commente Laurent Mathelot.
Ces évêques appelés à être remplacés dans les dix prochaines années "ont certainement encore de très bonnes idées à donner", estime Manu Van Lier. Mais ce renouvellement à venir "va apporter un certain dynamisme, des visions différentes et, peut-être, l’espoir est à trouver aussi dans ce rafraîchissement des idées".
Retrouvez toutes les réflexions de Laurent Mathelot et Manu Van Lier dans Décryptages de ce 24 janvier 2025.