Ce lundi 9 septembre a eu lieu la rentrée académique du Grand Séminaire francophone interdiocésain, à Namur. A cette occasion, l'abbé Joël Spronck, recteur du Séminaire, a adressé un discours aux évêques présents, aux formateurs, aux séminaristes et à leurs familles. Il a notamment insisté sur les "défis des prêtres aujourd'hui".
Cette année, le "Séminaire de Namur", qui est plus exactement le Grand Séminaire francophone interdiocésain de Belgique, accueille trois nouveaux séminaristes et deux étudiants religieux. Onze séminaristes diocésains sont donc désormais en formation au Séminaire - 6 autres poursuivant leurs études au Séminaire Redemptoris Mater du néo-catéchuménat.
C'est avec eux que le Séminaire a fait sa rentrée ce lundi 9 septembre. Mais également en présence de trois évêques - Mgr Luc Terlinden de Malines-Bruxelles, Mgr Pierre Warin de Namur et Mgr Guy Harpigny de Tournai -, des formateurs et formatrices, des professeurs et de toute l'équipe du Séminaire.
Dans son discours d'accueil, le recteur, l'abbé Joël Spronck, a notamment partagée une réflexion sur les défis du ministère presbytéral aujourd'hui. Une réflexion en quatre points qui apporte des éléments de réponses aux nombreux débats actuelles autour du ministère du prêtre, chez nous et ailleurs.
L'identité du prêtre
Dans un premier temps, Joël Spronck est revenu sur la question de l'identité du prêtre. Aujourd'hui, on oppose souvent deux conceptions de cette identité. Pour une approche "socio-fonctionnelle", le prêtre se définit par une fonction de service à la communauté. Le point de vue "ontologico-sacramentel", quant à lui, comprend ce service s'enracine dans l'être même du ministre, par le sacrement de l'ordination.
Or, pour le recteur du Séminaire, ces "deux approches ne s’excluent pas ; au contraire, elles s’articulent
et se corrigent mutuellement ! L’approche fonctionnelle évite de verser dans une sacralisation
outrancière (qui peut dégénérer en cléricalisme et en autoritarisme) et rappelle la dimension
intrinsèque de service de la communauté". De son côté, l’approche ontologique donne à ce service son véritable fondement : "c’est le Christ, dans la puissance de l’Esprit, qui agit à travers ses ministres – et permet ainsi d’éviter une dérive fonctionnaliste dans la compréhension du ministère des prêtres, qui oublierait toute dimension spirituelle ou mystique de celui-ci". Bref, il s’agit de conjuguer les deux aspects. le prêtre, par son ordination, est un signe sacramentel du Christ, qui agit au nom du Christ-Tête de l'Eglise - sans s'identifier purement et simplet au Christ...
Le presbytérat et les autres ministères
Un deuxième défi est lié à la diversification des ministères au sein de l'Eglise depuis 60 ans. Aujourd'hui, le prêtre ne concentre plus en lui la totalité du ministère, du service, mais de nombreux ministères laïcs participent aujourd'hui à la vie et la la mission de l'Eglise. Se pose dès lors la question : comment articuler ces différents ministères ? Autre question posée par l'abbé Spronck : "Quelle est la spécificité théologique des ministères ordonnés, par rapport aux ministères institués ? Est-ce la présidence des communautés ecclésiales et de l’Eucharistie (in persona Christi Capitis) ?" Le pouvoir de gouvernement, de juridiction, ne doit-il pas aussi être repensé, élargi, alors que, jusqu'ici, il était exclusivement réservé aux évêques et aux prêtres ?
Le célibat des prêtres
Troisième défi relevé : le célibat des prêtres, qui "est indéniablement une richesse de la Tradition latine qu’il serait dommageable de perdre", dit Joël Spronck. "Doit-il pour autant être obligatoire ou faut-il le laisser au choix ? La question est récurrente." Certes, "le célibat consacré – qui est un charisma (1Co 7,7) – 'n’est pas
exigé par la nature du sacerdoce… mais il a de multiples convenances avec le sacerdoce'" (cf. Presbyterorum Ordinis, 16).
Même si, aujourd'hui, la vie consacrée est en crise et qu'elle suscite l'incompréhension, le recteur du Séminaire n'est "pas sûr que ce soit actuellement le bon kairos [moment, Ndlr.] pour changer la discipline sur ce point. L’obligation, la loi a une vertu 'pédagogique' (Ga 3,24), surtout quand le bien auquel elle conduit est obscurci. Ce serait en tout cas grave que cet état de vie disparaisse complètement dans notre Eglise".
Quoiqu'il en soit, avant d'envisager tout changement sur ce point, "il faudrait sans doute d’abord revaloriser le sens même du célibat consacré comme imitation de Jésus (...) comme consécration à Dieu et à son Église, et surtout comme attente et espérance eschatologique" de la vie future. "Pour notre monde et notre histoire qui risquent de se clore dans leur immanence et leur auto-suffisance, le célibat consacré joue le rôle d’indicateur de Transcendance", précise Joël Spronck. Mais à côté de ce point de vue théologique et spirituel, il est essentiel que les personnes consacrées puissent vivre leur célibat de manière humainement équilibrée.
Vers des pôles missionnaires
Un dernier défi pour les prêtres, mais aussi pour tout la communauté ecclésiale, est la présence missionnaire au milieu du monde. Pour atteindre cet objectif, on paraît s'orienter vers la création de "pôles missionnaires". Ecoutons une dernière fois l'abbé Spronck, à ce propos. "Nous sommes passés successivement des 'paroisses' aux 'secteurs paroissiaux', puis aux 'unités pastorales' pluricampanaires… Aujourd’hui, on s’oriente vers des 'espaces' ou des 'pôles missionnaires' de vie chrétienne. Ces pôles ne couvriront plus nécessairement tout le territoire, mais pourront être des 'phares', des points de repère, où une communauté (réunissant divers états de vie, ministères, charismes) se réunira autour de l’Évangile, pour prier et célébrer l’Eucharistie, pour vivre la charité envers le prochain, et les plus pauvres, pour
annoncer la Parole de Dieu. L’important n’est pas d’être nombreux, mais signifiants."
Christophe HERINCKX