Cérémonie d’ouverture des JO : trois prêtres belges donnent leur avis


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Cérémonie d’ouverture des JO : trois prêtres belges donnent leur avis
Par trois prêtres
Publié le - Modifié le
5 min

Lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques, un tableau vivant semblant imiter la Cène a déclenché un flot ininterrompu de réactions et critiques. Après quelques jours de recul, trois prêtres belges donnent leur avis sur la scène litigieuse.

C'est d'abord le père Cédric Claessens, curé dans l'unité pastorale des Sources Vives (Ixelles) et ancien champion de BMX, qui prend la plume pour nous inviter à rester "bons, doux et humbles de cœur… mais pas naïfs".

L'abbé Philippe Mawet estime lui que nous vivons dans un monde "qui confond liberté et absence de limites".

Enfin, le père Patrick Denis, curé belge officiant dans une paroisse française, s'interroge sur l'image que notre Église renvoie à la société.

Restons bons, doux et humbles de cœur… mais pas naïfs

Une opinion du père Cédric Claessens, curé dans l'unité pastorale des Sources Vives (Ixelles) et ancien champion de BMX

Je vous écris pour vous dire que j’ai été moi-même attristé par cette cérémonie que j’ai trouvée, sur certains plans, extraordinaire et, sur d’autres, de bien mauvais goût. Non seulement sur « la Cène » ou sur « le repas des dieux de l’Olympe » mais aussi pour d’autres thématiques comme « liberté » qui était une promotion de l’excès. Je suis, moi-même, un ancien sportif (BMX) et un passionné de sports notamment des jeux olympiques où ma nièce va concourir aux épreuves de BMX race. Je me réjouissais d’autant plus de voir cette cérémonie! Quelle déception...

Alors oui, Jésus accepte les pêcheurs et les prostituées à sa table (heureusement pour nous tous!) toutefois le tableau ne donnait pas ce message mais tout le contraire: le beau, le bon et le bien n’en faisant pas partie. D’ailleurs faire l’apologie de la décadence avec les dieux de l’Olympe est tout aussi antinomique avec les valeurs du sport. Que ce soit avec ce tableau ou d’autres, j’ai trouvé un message bien trop présent sur l’exagération des plaisirs et des libertés prônant les vices plutôt que les vertus. Dire autre chose serait (me semble-t-il) méconnaître la culture qui nous environne et les volontés politiques actuelles. Les chrétiens, musulmans, juifs, laïcs et personnes de bonne volonté ont raison de lever la voix pour dire « non » à cette promotion de liberté sans vérité alors que toutes sortes de violences dont les violences sexuelles sont présentes et dénoncées, à juste titre, ces derniers temps.  

Vive le sport!

Que le Seigneur vous bénisse 

Cédric Claessens

Nous vivons dans un monde qui confond liberté et absence de limites

Une opinion de l'abbé Philippe Mawet, curé pendant 25 ans à Woluwe-Saint-Pierre

L'arrogance serait-elle devenue à ce point banalisée pour qu'elle soit aujourd'hui devenue un moyen d'expression comme un autre ? La provocation , avec ses degrés d'arrogance, mesurée ou sauvage, devrait-elle être acceptée comme un genre artistique incontournable ?

Ces questions -parmi d'autres- font partie des réactions que le spectacle d'ouverture des Jeux Olympiques de Paris a pu susciter et amplifier. C'est vrai - et il faut le souligner avec force - que ce fut un spectacle de grande qualité et de belle créativité. Certes, l'art n'existe que s'il ouvre des chemins. Et la dérision , et souvent même l'auto-dérision, sont des clés indispensables pour ne pas devenir les éternels grincheux de toute nouveauté.

Cela veut-il dire que tout est permis ? Cela veut-il dire qu'il n'y a  pas ( ou plus) de limite... même à la liberté d'expression ? C'est bien là, me semble-t-il, la vraie question.  Nous vivons dans un monde qui confond liberté et absence de limites là où l'expérience humaine et la réflexion nous font comprendre que ce sont les limites elles-même qui sont les berges incontournables entre lesquelles peuvent couler les eaux de la liberté. Certes, ces limites peuvent évoluer mais sans ces limites, ce sont les eaux stagnantes de la médiocrité qui ne sont retenues par aucune berge de quelque ordre que ce soit.

Sans doute existe-t-il encore quelques consensus , comme par exemple la pédophilie, dont l'Eglise ne cesse d'être accusée par ceux qui en deviennent les inquisiteurs revêtis de toutes les vertus sociétales et contemporaines. Peut-être la parabole de la paille et de la poutre pourrait-elle inspirer et revenir à la mémoire de ces censeurs... sans pour autant, bien sûr, devenir l'alibi ou l'excuse de ces comportements intolérables et inadmissibles. 

Je ne suis pas certain que ceci nous éloigne des questions posées par ce tableau des "festivités"(!) présenté lors de l'inauguration des Jeux Olympiques de Paris. Où sont, en effet, aujourd'hui les limites communément admises et qui deviennent à la fois le tableau de bord et la boussole de nos sociétés ? Sans doute nous faut-il aujourd'hui naviguer  dans une société qui, à l'image des eaux polluées du fleuve parisien, nous obligent à ne pas plonger tête baissée dans un milieu devenu souvent inhospitalier  mais à garder la tête hors de l'eau pour maintenir le cap que trop de pollutions nous empêcheraient d' apercevoir ou de rejoindre.

Gardons au cœur et en mémoire la magie et le génie d'un spectacle hors du commun. Que l'extravagance , audacieuse ou sulfureuse, de ce tableau des festivités ne nous empêche pas de reconnaître la beauté et la grandeur artistique de ce qui a été présenté. Que la flamme olympique s'élève au-dessus de tous les égarements qui sèment la division pour ne retenir que les encouragements qui conduisent à la communion.

Philippe Mawet

Comment la société perçoit-elle notre Église ?

Une opinion du père Patrick Denis, curé de la paroisse Sainte Croix Centre Meuse (diocèse de Verdun, en France)

A propos de la polémique autour du tableau pouvant évoquer la Cène lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, Isabelle Saint-Martin relève dans l’édition du 29 juillet de La Croix qu’une partie du public pouvait ne pas avoir le référentiel nécessaire. C’est effectivement le principal reproche qui peut être fait à ce tableau. Mais plutôt que de se contenter de critiquer et céder à la tentation de se voiler la face, ne peut-on oser y lire une forme de parabole pouvant nous ouvrir à un regard inversé sur notre Eglise. Car qu’en perçoit la société - en tout cas française ? Une église noire ou grise, en tout cas sans beaucoup de couleur, d’un seul genre, où ses représentants officiels se fondent de plus en plus dans une uniformité un peu ennuyeuse, avec toujours  cette difficulté d’appréhender la sexualité.

Simple suggestion.

Patrick Denis

👉 Retrouvez également sur ce sujet : l'édito de Vincent Delcorps, rédacteur en chef de CathoBel

Catégorie : Opinions

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