Chien de la casse explore l’amitié entre deux jeunes vivant dans un village du sud de la France. Une passionnante étude de caractère.
Un petit village du sud de la France, à la nuit tombée. Sur une place, une bande de jeunes. Parmi ceux-ci, Dog et son ami d’enfance Mirales. Depuis qu’ils se sont rencontrés sur les bancs de l’école, ils ne se lâchent plus. Ils passent la majeure partie de leurs journées à traîner dans les rues et à jouer à la Playstation. C’est qu’il n’y a pas beaucoup de choses à faire dans ce petit village aux ruelles étroites et maisons en pierre. Il n’y a pas beaucoup d’avenir non plus, surtout pour Mirales qui rêve d’exercer ses talents de cuisinier dans une grande ville. Dog, lui, veut entrer dans l’armée, mais ça ne plaît pas à son ami, son "frère", comme ils disent.
Sa frustration, Mirales la décharge sur Dog en le taquinant. Il le bouscule, lui lance des défis, se moque de son côté "brut de décoffrage". Dog reste stoïque, il a l’habitude et semble être imperméable. Cet équilibre va être perturbé par l’arrivée au village d’une jeune fille, Elsa. Elle [immédiatement avec Dog qui se met à délaisser son ami pour passer du temps avec elle. Mirales, évidemment, n’apprécie pas Elsa qui le remet à sa place quand il va trop loin dans ses taquineries. Ils vont devoir cohabiter car on peut difficilement éviter de croiser quelqu’un dans un petit village comme le leur.
Prisonniers d’une routine
On parle régulièrement de la jeunesse qui peuple les banlieues. Au cinéma particulièrement, ils sont représentés sous un angle peu flatteur. On dépeint la violence, les bandes criminelles et autres dealers de drogue. On parle aussi de la campagne et de la ruralité. Mais c’est souvent pour mettre l’accent sur les anciens ou sur le côté ressourçant de la vie en dehors des grandes villes. On voit ainsi rarement les jeunes qui vivent dans ces villages. Chien de la casse explore donc un terrain nouveau en suivant ces deux amis d’enfance. Le réalisateur, Jean-Baptiste Durand, dont c’est le premier film, parvient à saisir l’ambiance de ces villages où le calme et la tranquillité peuvent devenir un frein à l’épanouissement. Sa caméra s’attarde sur un banc, sur ces étendues à perte de vue, sur ces rues désertes. Dog et Mirales semblent prisonniers. Ils discutent de tout et de rien, se charrient. On les voit exécuter leur routine, encore et encore. Mais cette observation est loin d’être pesante ou ennuyante.
Les dialogues de Chien de la casse sont en effet extrêmement bien ciselés. La même précision a été appliquée à la composition des deux personnages principaux. Ce sont des amis mais Mirales domine Dog, il le bouscule parfois de façon méchante. Ce qui ne fait pas de lui un monstre, car on comprend qu’il est mal dans sa peau. Ce jeune homme est même attachant, on le voit attentionné envers son chien ou sa maman. Mais il est maladroit et souffre de faire partie de ce milieu rural qu’il juge sans intérêt.
Chien de la casse est donc une étude de caractère nuancée. Elle se penche sur un milieu et des individus, sans jugement, pour nous parler d’amitié, de loyauté et de relations humaines, avec une touche de quête de soi. Complexe, intéressant et touchant!
Elise LENAERTS