Les femmes, épouses, veuves ou mères de famille étaient-elles vraiment effacées et soumises ? Sur base des quelques documents écrits qui subsistent, des historiens montrent que les femmes savaient tirer leurs épingles du jeu pendant le Moyen Age.
« L’histoire connut alternativement des périodes où les femmes bénéficièrent de plus d’opportunités et des périodes où elles furent au contraire repoussées dans la sphère privée et les marges de la société. » L’ouvrage La femme dans la cité au Moyen-Age se conclut par ce constat.
L’équipe des auteurs, tous liés à la KU Leuven, se sont penchés sur les archives du 13ème au 15ème siècle pour retracer la vie quotidienne dans les Pays-Bas méridionaux (Belgique, Luxembourg et Nord de la France). Leur travail raconte le parcours de ces femmes de la naissance au mariage, au choix de vie religieuse, ou lors de l’héritage de leurs proches.
Trois questions à Jelle Haemers, l’un des auteurs
Ce professeur en histoire sociale et politique au Moyen-Age nous raconte la genèse de cet ouvrage:
« L’histoire du Moyen-Age nous intéresse. Autant le grand public connait les grands hommes comme les papes ou les ducs de Bourgogne. Nous voulions raconter davantage la vie des femmes de l’époque, pas seulement Jeanne d’Arc ou Marie de Bourgogne. »
Quelles ont été vos sources documentaires ?
» Nous avons écouté l’histoire de ces femmes au travers des documents écrits par elles-mêmes: les testaments, les contrats, etc. Ces documents donnent des informations sur leurs vies, sur le plan économique et financier, mais aussi côté vie privée. Nous avons beaucoup puisé dans les archives urbaines et dans les archives privées. Pour le chapitre concernant les béguines, nous avons trouvé des archives également. »
Qu’avez-vous découvert sur les béguines?
« Contrairement à ce qu’on croit souvent, les béguines ne vivaient pas à côté de la société du Moyen-âge, dans des communautés fermées. Elles ont décidé de rester en ville. Beaucoup de béguines étaient infirmières, d’autres enseignaient, d’autres béguines encore tissaient de la laine et des vêtements. Elles vivaient dans la société.
Toutefois, elles ont décidé de vivre en communauté pieuse, ‘mariées à Jésus-Christ’ comme on disait. Certes elles pouvaient quitter le béguinage [pour se marier par exemple], elles restaient libres de leur destin. »
En conclusion ?
« Nous vivons aujourd’hui dans une société où les hommes et les femmes ont plus ou moins les mêmes droits. Pourtant l’histoire des droits des femmes a connu des hauts et des bas. Nous nous rendons compte qu’au 14ème et 15ème siècle, les femmes disposent de nombreuses possibilités (commerce, patrimoine, etc) alors que ces droits sont restreints à partir du 16ème siècle. L’histoire n’est pas une évolution linéaire. A nous d’y être attentif! »
AFdB
📌 « La femme dans la cité au Moyen âge », Jelle Haemers, Andrea Bardyn et Chanelle Delameillieure (dir.), éditions Racine, 250 pages.
