Saviez-vous que l'abbaye de Gembloux fête cette année ses 1.100 ans d'existence ? Si moines et religieuses ont déserté les lieux depuis longtemps, l'abbaye poursuit son histoire avec la Faculté Agro-Bio Tech de l'ULiège.
C’est en 922 que saint Guibert fonde l'abbaye de Gembloux. Elle abrite alors une école monastique, ainsi qu’une église abbatiale. L’emplacement est choisi non seulement en raison de sa position stratégique le long de la chaussée romaine, de sa proximité d’un cours d’eau mais également pour la fertilité des terres limoneuses.
Des origines de l'abbaye à la création de l'Institut agricole
Peu d’éléments d’origine subsistent, a fortiori après les travaux d’aménagement en style néo-classique entrepris au XVIIIe siècle (1762-1785) par Laurent-Benoît Dewez. ''L’architecte a tout éliminé, sauf une salle souterraine (crypte ou cellier ?) sous le cloître et l’église. Les moines n’ont occupé les bâtiments actuels qu’une bonne vingtaine d’années. Au niveau de l’escalier d’honneur du palais abbatial, on retrouve sculptées deux tortues symbolisant la maxime adoptée par les moines ‘Festina lente’ (presse toi lentement - hâte toi sans te presser)" raconte Jacques Mignon, scientifique à la bibliothèque de Gembloux AgroBio Tech et vice-président du Cercle royal Art et Histoire de Gembloux.
À la suite de la Révolution française, l’abbaye et la ferme attenante sont vendues à un particulier. En 1814, les sœurs Notre-Dame s'installent dans l’ancien quartier des moines et y développent un enseignement pour les jeunes filles. En 1860, c'est l’Institut agricole d'Etat qui investit les bâtiments. Il s’agit en réalité d’un transfert de l’école agricole de Thourout, en Flandre occidentale, créée onze ans plus tôt et fermée en 1859 pour non renouvellement de bail. Les bâtiments de l’ancienne abbaye et ses terres sont d’abord loués avant d’être achetés par l’État belge en 1881.
Depuis toujours, une Faculté avec une ouverture internationale
Dès ses premières années, l’Institut agricole connaît un important rayonnement international. La proportion d’étudiants étrangers grimpe à un tiers des inscrits. Les missions scientifiques menées à l’étranger n’y sont pas étrangères. Tout en apportant leurs conseils aux cultivateurs belges, les chercheurs et enseignants de Gembloux s’intéressent aux régions tropicales.
Après avoir été un auditoire, une salle de conférence, la salle des chapitres est devenue le service des études de l’université. Quant au réfectoire et à la cuisine, ils ont été utilisés par les moines, ensuite par les petites sœurs, puis par l’internat.
À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, en 1946, l’ensemble a été remis en état, avec des vitraux récents. Chacun d’eux représente les armes des abbés qui ont dirigé l’abbaye. Les étudiants et les chercheurs passent encore dans ce cloître.
Dès les années septante, une question existentielle se pose. La Faculté doit-elle rester autonome ou être intégrée à une université? C'est en 2009 que la Faculté universitaire intègre l’Université de Liège. Chaque année, la Faculté accueille près de 1.500 étudiants, toutes formations confondues – de 49 nationalités différentes – parmi lesquels 47% de femmes.
Les fouilles se poursuivent dans les caves de l'abbaye
Classés, les bâtiments ont été préservés. "Nous sommes tenus d’en assurer la mémoire et la promotion'', souligne Jacques Mignon. Pour compléter l’ensemble, en 1992, ''l’acquisition de l’ancienne ferme de l’abbaye, restée propriété privée, a été faite, puis partiellement transformée au niveau de la grange en un magnifique auditoire de plus de 500 places'', décrit encore Jacques Mignon, qui ajoute : ''Il n’est pas toujours évident d’aménager des laboratoires dans des sites classés. Chaque projet demande de nombreuses années avant d’être finalisé, c’est probablement là l’une des principales contraintes. Toutefois, de la recherche de pointe a été et est encore réalisée dans les caves du XVIIIe siècle.''
Afin de disposer de davantage d’espace, un complexe de nouveaux bâtiments a également été construit et inauguré en 2018, à proximité des bâtiments historiques.
Angélique Tasiaux/ Sophie Delhalle
🗞 Cet article est extrait d'un dossier paru dans Dimanche n°8 du 27 février 2022