Si l’Europe politique semble vouloir s’écarter de ses racines chrétiennes, plusieurs pays européens sont historiquement placés sous la protection de Marie. Mais savez-vous lesquels?

Si la Vierge Marie est l’inspiratrice du drapeau européen*, elle ne fait cependant pas partie de ses « patrons ». L’Europe est placée sous la protection des saints Benoit, Cyrille et Méthode, et des saintes Brigitte de Suède, Catherine de Sienne et Thérèse Bénédicte de la Croix (plus connue sous son nom civil, Edith Stein).
Trois pays, trois histoires
Membres de l’Union européenne ou en passe de le devenir, certains pays sont placés sous le patronage de la Vierge Marie. Témoins d’une histoire et d’un passé marqués par le christianisme. Parmi eux, l’Estonie et la Vierge Marie, la France et Notre Dame de l’Assomption, le Portugal et Notre Dame de l’Immaculée Conception, ou encore la Hongrie et Notre Dame des Hongrois. CathoBel vous propose de faire arrêt en Albanie, au Luxembourg et en Slovaquie pour découvrir les liens qui les unissent à la mère de Jésus.
🇦🇱 Albanie : Notre Dame du Bon Conseil
L’Albanie n’est pas encore membre de l’Union européenne, elle a obtenu le statut de pays candidat en 2014. Le 19 juillet 2022, l’UE a officiellement ouvert des négociations d’adhésion avec l’Albanie.
La petite république des Balkans est placée sous la protection de Notre Dame du Bon Conseil dont le sanctuaire se trouve à Scutari. Ce sanctuaire a des origines lointaines, remontant jusqu’au VIe siècle. Une fresque y avait était peinte, représentant la Vierge à l’enfant.
Un héros national protégé par Notre-Dame

Lors de l’invasion turque au 15e siècle, le seigneur Georges Castriota Scanderbeg, devenue héros national, se confie à la protection de Notre Dame de Scutari et tient tête aux envahisseurs pendant vingt-cinq ans, on le surnomme l’athlète du Christ. Toutefois, Scutari tombe aux mains des musulmans en 1467.
Beaucoup d’Albanais prennent la route de l’exil. C’est pour cela que l’image de Marie de Scutari, Mère du Bon conseil, se retrouve dans l’église en construction des pères augustiniens à Genazzano, près de Rome.
Beaucoup de miracles se seraient produits en présence de l’image. Elle fut donc reproduite et on en trouva des exemplaires à Genève, au Mont Cassin et à Frosinone, puis à Madrid, à New York et ailleurs…
Notre-Dame du Bon Conseil, protectrice du pays
C’est en 1895 que les évêques albanais proclamèrent Notre Dame du bon conseil « protectrice de toute l’Albanie » et fêtée le 25 avril. L’Albanie fut déclarée indépendante en 1912.
En 1917, on reconstruisit l’église Notre Dame du Bon conseil à Scutari, précisément là où en 1467 était l’image de Notre Dame du Bon conseil avant d’être emportée à Genazzano en Italie.
Le 11 février 1943, face au spectre du communisme, Mgr Prennushi consacra la nation au Cœur Immaculé de Marie. Dans les années 1960, sous le régime communiste, le sanctuaire de Notre Dame du Bon Conseil fut rasé. Dès le lendemain de la chute du régime en 1990, les catholiques rebâtirent leurs églises.
Le pape Jean Paul II se rendit le 25 avril 1993 à Scutari en Albanie pour bénir la première pierre de la reconstruction du sanctuaire de Notre Dame du Bon Conseil, l’église « Zoja e Shkodres ».
🇱🇺 Luxembourg : Notre Dame des Affligés
Jusqu’à aujourd’hui, le pèlerinage de l’image – trois fois séculaire et miraculeuse – de la Consolatrice des Affligés constitue une des composantes fondamentales de la piété populaire luxembourgeoise. L’invocation de la patronne de la cathédrale, de la cité et du pays de Luxembourg est indissociable des nombreux pèlerinages de paroisses, de doyennés, de groupes de jeunes ou d’associations.
La vénération de la Consolatrice remonte au 17e siècle. A cette époque, le Duché de Luxembourg fait partie de l’entité des Pays-Bas espagnols.
Maintenir la foi face à la Réforme

L’invocation de la Consolatrice comme patronne de la Cité et du Duché de Luxembourg se développe pour maintenir la foi catholique face à la Réforme protestante. Pour les autorités publiques qui favorisent le pèlerinage, il s’agit avant tout de détourner les fléaux de la peste, de la famine et de la guerre.
Dès 1639, un premier « Livre des miracles » mentionne des prières exaucées et des guérisons qui ont lieu devant l’image. Comme l’invocation de la Consolatrice remporte un succès grandissant auprès de la population, on instaure cette même année une semaine consacrée plus particulièrement au pèlerinage lors duquel la statue de la Consolatrice est exposée pendant huit jours à l’église des Jésuites à l’intérieur de la cité.
Tradition renouvelée tous les ans
Cette translation de l’image miraculeuse, qui allait devenir une tradition annuelle, montre que le pèlerinage et la vénération de l’image sont inextricablement liés.
Après l’élection de la Consolatrice des Affligés comme patronne de la cité en 1666 et patronne-protectrice du Duché de Luxembourg en 1678, sa vénération ne cesse de se propager parmi la population.
Depuis 1794, la statue se trouve constamment dans l’ancienne église jésuite, devenue église paroissiale de la ville en 1778 et église cathédrale en 1870.
En 1922, la période du pèlerinage est étendue sur une quinzaine qui a lieu chaque année du 4e au 6e dimanche de Pâques. Elle va se confirmer et s’intensifier au cours de la Deuxième Guerre mondiale. L’image de la Consolatrice ainsi que son message de réconfort et d’espérance auraient contribué à renforcer le sentiment national et la conscience collective du peuple luxembourgeois.
🇸🇰 Slovaquie : Notre Dame des Douleurs de Sastin
Au-delà de son caractère strictement religieux, la fête de Notre-Dame des Douleurs est aussi un symbole de l’identité nationale slovaque. Les célébrations se tiennent du 14 au 16 septembre et rassemblent chaque année des dizaines de milliers de pèlerins.
Des guérisons par centaines
L’histoire du sanctuaire marial de Šaštín, ou basilique des Sept Douleurs de la Vierge Marie, débute au 14e siècle, lorsqu’une petite chapelle située à un carrefour du village reçut une statue de Notre-Dame des Douleurs avec le Christ mort sur ses genoux. Réalisée en bois de poirier de la région du Danube, elle a été commandée en 1564 par Angelika Bakičová, l’épouse du comte Imrich Czobor, souverain de la région de Šaštín, en réponse à un vœu.

La noble femme avait demandé l’intercession de la Vierge Marie pour que son mari, un homme irascible, change de caractère, et sa prière fut exaucée. De nombreux croyants s’arrêtaient pour prier devant la chapelle et la dévotion à la Pietà de bois ne cessa d’augmenter.
En 1710, suite à des rapports de guérisons prodigieuses, une commission d’enquête fut créée. Elle examina 726 cas, et le 10 novembre 1732, la statue fut déclarée miraculeuse.
Générosité impériale
L’année suivante, les religieux Paulins, désireux de construire une église de pèlerinage et un monastère attenant, demandèrent que la statue de Notre-Dame des Sept Douleurs leur fût confiée.
Les travaux de la nouvelle église commencèrent avec la pose de la première pierre le 16 juillet 1736, et se poursuivirent jusqu’en 1760, financés par les dons des fidèles et de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche.
La consécration eut lieu en présence de l’impératrice Marie-Thérèse et de son mari, l’empereur François Ier de Lotharingie et la statue de la Vierge Marie fut placée sur le maître-autel le 15 août. Le 8 septembre 1864, l’archevêque d’Esztergom, le cardinal Ján Scitovský, couronna la statue d’objets en or consacrés par Pie IX.
Première basilique de l’histoire du pays
C’est le 22 avril 1927 que Pie XI déclare Notre-Dame des Sept Douleurs patronne du peuple slovaque – alors intégré à la Tchécoslovaquie -, par le décret Celebre apud Slovaccham gentem. Le 23 novembre 1964, Paul VI élève l’église au rang de Basilique mineure. L’édifice devient ainsi la première basilique du territoire slovaque.
Le 6 juin 1987, Mère Teresa de Calcutta visite l’église, puis le 1er juillet 1995, c’est au tour de Jean-Paul II. Le Souverain Pontife polonais, en voyage apostolique en Slovaquie, célèbre la messe devant le sanctuaire en présence de plus de 200 000 fidèles. Le 15 septembre 2021, le pape François se rendait au sanctuaire national de Šaštín, situé à 70 km environ au nord de Bratislava.
* Parmi les projets présentés, c’est celui du fonctionnaire européen Arsène Heitz, fervent catholique, qui a été retenu : cercle d’étoiles sur fond azur. Il a reconnu bien plus tard qu’il avait tiré son inspiration de la médaille miraculeuse de la Vierge Marie, qui la représente entourée de douze étoiles d’or. Le bleu est également la couleur associée à la mère de Jésus.