Serge Maucq est un prêtre au profil atypique. Ordonné il y a sept ans, après une carrière dans le monde de l’entreprise et dans la politique locale, il décide de se former au coaching. Aujourd’hui, Serge propose des formations où paroles bibliques et développement personnel entrent en dialogue.
Ancien directeur de Test-Achats, échevin d’Ellezelles pendant plus de dix ans, Serge Maucq est devenu prêtre en 2013. Avant d’être ordonné, il a vécu en communauté dominicaine avec cette envie de faire partie d’une famille, d’un réseau, mais aussi pour l’équilibre de la règle entre vie intérieure et extérieure, pour cette dynamique de recherche et de questionnement sur le lien entre Eglise et société. Une tradition liturgique et spirituelle à laquelle il est également désormais attaché.
Prêtre et coach
Prêtre diocésain, il est aussi coach personnel et dispense des formations. Serge assume totalement cette double étiquette de prêtre et de coach mais ne se revendique pas mentor et encore moins « gourou ». « Les gens me consultent comme coach, et il est clair que ma fonction de prêtre n’entre alors pas en ligne de compte, même si je pense que ce double statut doit rassurer certains. » L’homme ne regrette rien de son parcours; aujourd’hui c’est la joie du terrain et des célébrations en paroisse qui le porte. Son originalité attire et repousse, et si ses compétences constituent plutôt un atout, il n’a pas toujours été facile de les valoriser, en raison d’une certaine méfiance. Lui-même se définit comme un électron libre atypique, c’est dire!
A La Pairelle notamment, il propose une journée de formation intitulée « L’évangile comme coach »; « un titre racoleur mais vrai », nous confie-t-il, et totalement assumé. Cette réflexion est le fruit de la rencontre entre deux univers, celui de l’entreprise et de l’Eglise, « où la gestion des ressources humaines est largement sous-développée », alors qu’elle partage aujourd’hui les mêmes réalités que la première. « On est nommé à une fonction et il n’y a pas de suivi, ni d’évaluation en cours de route » regrette Serge Maucq. Très vite, il entreprend donc une formation en coaching dans une structure bruxelloise « Bouche à oreille ». Serge Maucq découvre alors surtout les sagesses orientales, la méditation zen, le mindfulness. Or, pourquoi aller chercher ailleurs ce ce dont nous disposons déjà? Arrivé au terme de sa formation, Serge doit choisir un thème pour animer un groupe en vue de l’obtention de son certificat. Audacieux, il choisit alors de croiser le coaching et l’Evangile. Avec la ferme conviction que « ça vaut la peine de faire se rencontrer les questions contemporaines avec la mine d’or qu’est l’Evangile. » C’est aussi en célébrant en paroisse et en préparant mariage et baptême que Serge Maucq comprend qu’il est temps de faire (re)découvrir la beauté des textes bibliques qui condensent tout de même quelques siècles de sagesse.
Paroles bibliques et développement personnel
Pour ce faire, Serge Maucq a donc mis sur pied il y a plusieurs années une formation avec cette approche originale de l’évangile comme coach. L’objectif est alors de croiser des techniques de développement personnel avec les textes évangéliques. Le public est majoritairement composé d’aumôniers, d’agents pastoraux ou d’équipes Notre-Dame. Mais la tranche d’âge qui intéresse le plus Serge, c’est celle du milieu de vie, quand beaucoup abordent ce virage décisif de leur vie, professionnelle ou familiale.
Certes, le but de cette formation n’est pas de dire « on se sauve soi-même », « tout est dans nos mains », reconnait Serge qui ajoute toutefois : « Notre religion est une religion de l’incarnation individuelle et de groupe, mais aussi « aide-toi et le ciel t’aidera », alors pourquoi nous priverions-nous de précieuses ressources dans le domaine des sciences humaines qui ont largement prouvé leur efficacité ? Si mon couple bat de l’aile, je peux prier, beaucoup, mais envisager de suivre une thérapie n’est pas contre-indiqué. Le prêtre a le droit de ranger dans sa boite à outils des techniques éprouvées. Car dans la vie pastorale ordinaire, elles peuvent aussi s’avérer d’une grande utilité. »
Trouver les mots/maux
Être coaché par l’évangile, c’est apprendre à choisir une page, à l’intérioriser, à la partager puis à la croiser avec son vécu personnel, qu’il soit douloureux ou joyeux. Oser adresser nos questions personnelles aux paroles d’évangile. Et puis, au final, n’en garder qu’un verset, celui qui nous touche le plus, l’écrire sur un bout de papier et l’épingler sur le frigo. Afin que cette parole nous rejoigne dans nos vies et habite notre quotidien. Souvent, ce sont les textes qui nous blessent qui peuvent le mieux nous aider. « L’Evangile peut aussi faire mal« , admet Serge, mais toujours pour notre bien.
Lors de cette formation, toujours animée en duo, point question de délivrer un enseignement mais de donner des outils à travailler soi-même pour atteindre une autonomie. La journée se partage entre temps de réflexion autour l’Evangile et de découverte des techniques de développement personnel, avec des échanges en groupe et des temps plus solitaires. Vous apprendrez, grâce au cadran d’Hoffman que ce qui vous énerve chez l’autre, c’est en fait ce qui vous manque. Pour les textes bibliques, Serge privilégie les paraboles, celles des talents ou du fils prodigue, car elles agissent comme des signes, portent en elles une symbolique forte, nous aident à mettre des mots sur ce qui ne va pas. Exactement ce vers quoi tend le coaching.
Jésus coach?
Le coach ne donne jamais son avis mais doit aider le coaché à poser un regard éclairant sur ce qu’il vit. Et Jésus ? Était-il un coach ? Peut-on dire qu’il a coaché ses disciples ? C’est en tout cas le propos d’un Jean-Philippe Augier, auteur en 2016 d’un ouvrage intitulé : « Comment Jésus a coaché douze personnes ordinaires pour en faire des leaders extraordinaires. » Serge nous rappelle que Jésus ne donne pas son avis non plus, il renvoie très souvent la question à son interlocuteur, « et toi que dis-tu ? » « Quand il trace des signes avec son doigt dans le sable devant la femme adultère, on ne sait pas ce qu’il écrit, et les questions sont toujours ouvertes, tout ça, c’est très coach« .
Certains peuvent se sentir déstabilisés, voire se montrer clairement hostiles face à cette approche ; d’autres, au contraire, comme en témoignent les retours auprès de Serge, en perçoivent les bénéfices et entreprennent, après avoir suivi la formation, soit une thérapie soit une autre formation, ayant reçu le goût d’apprendre et d’approfondir. Et c’est aussi le cas du coach, « le coach aussi doit être coaché« , c’est pourquoi Serge continue également de se former.
Prochaine formation « L’Evangile comme coach » à La Pairelle (Namur) le 12 décembre 2020.
Sophie DELHALLE