« La situation actuelle dans les prisons interpelle. » Baudouin Charpentier a tenu à s’exprimer dans un communiqué pour alerter les autorités, et il n’est pas le seul, sur la situation en milieu carcéral en ces temps de confinement. Que s’y passe-t-il? En quoi le confinement et la menace du covid19 ont-ils changé le quotidien dans les prisons? Quelles mesures à prendre?
« Le risque sanitaire est important pour les détenus et les agents et pour tous ceux qui se côtoient dans les établissements pénitentiaires. Notre pays doit agir en conséquence. Nous attendons du Ministre de la Justice et des autorités compétentes un signal fort et nous nous associons à toutes les requêtes qui vont dans ce sens. » Le vicaire épiscopale Evangile et Vie du diocèse de Liège a donc voulu joindre sa voix à celle d’autres acteurs, notamment des avocats, qui dénoncent la situation actuelle vécue dans les prisons. Certes, « la situation n’est pas nouvelle« , avance Baudouin Charpentier, voilà de (trop) nombreuses années que la surpopulation est une réalité dans les prisons belges avec un taux d’occupation atteignant les 10 000 détenus. « Alors que les gouvernements successifs s’engagent à réduire ce nombre« .
Pourtant, « des solutions existent, affirme Baudouin Charpentier. Certains pays l’ont fait en privilégiant par exemple des peines alternatives plus respectueuses des individus« afin de désengorger les prisons. Dans son communiqué, le vicaire écrit d’ailleurs : « D’autres pays ont déjà montré la voie. La libération de détenus non dangereux, après dépistage et l’assurance qu’ils sachent où aller, ferait diminuer de façon conséquente le nombre de prisonniers et contribuerait à exposer moins de personnes au risque de la pandémie. »
« Le confinement, les détenus connaissent, poursuit l’abbé, mais aujourd’hui, ils ne peuvent plus recevoir de visites de leurs proches, les aumôniers peuvent encore venir mais doivent se tenir derrière la porte des cellules. » Les sorties en préaux écourtées se font en plus petit groupe, une situation qui pourrait augmenter la tension déjà bien présente en milieu carcéral et déboucher sur des émeutes, comme cela a été le cas en Italie. « Même si on parle déjà de déconfinement progressif, la situation que nous vivons actuellement s’inscrira dans le long terme« .
Baudouin Charpentier pense aussi aux agents pénitenciers particulièrement exposés en cette période. » On ne peut pas ne pas évoquer cette situation dans les prisons qui restent des lieux de grande souffrance et d’exclusion. » Cette crise sanitaire est sans doute l’occasion, pour l’abbé, membre de la plateforme des sortants de prison, de revoir notre politique en matière de centres fermés mais aussi des sans-papiers. « Il est bon aujourd’hui de porter une attention particulière à cette problématique » insiste-t-il. Et de mettre un peu plus d’humanité dans les prisons, surtout en cette période, sachant que le « confinement renforcé » sera d’autant plus dur avec la belle saison qui s’annonce et la montée des températures.
Sophie DELHALLE