La politique migratoire de l’Eglise a été au centre d’une journée de formation organisée par la commission interdiocésaine à la Migration Pro Migrantibus. Le cardinal Czerny, représentant du Vatican, appelle à une conversion des cœurs.
Le 23 janvier 2020 s’est tenue une journée de formation à l’initiative de la commission interdiocésaine à la Migration Pro Migrantibus, autour du thème « L’Eglise Catholique et la Politique migratoire et les Etats de l’Union Européenne ». Avec deux temps forts: l’intervention du cardinal Michael Czerny, sous-secrétaire Section Migrants & Réfugiés du Dicastère pour la promotion humaine intégrale au Vatican sur le thème « La politique migratoire de l’Eglise catholique et l’Union Européenne » , et celle de Suzy Serneels (Broederlijk Delen) intitulée « Le droit à ne pas devoir émigrer. L’Eglise catholique et ses partenaires en Afrique dans la lutte de prévention contre une migration forcée ».
Dans un premier temps, les participants se sont penchés sur la migration Nord-Sud, dont on ne connaît pas grand-chose, voire rien.. Car, « quand on migre vers le Sud, cela paraît normal », explique Suzy Serneels de Broederlijk Delen (équivalent flamand d’Entraide et Fraternité). Selon elle, les politiques migratoires en cours dans l’hémisphère Nord, sont éludées et leurs autres causes ne sont pas analysées en profondeur, ce qui fait porter aux migrants l’étiquette de ressortissants des pays pauvres, en guerre ou en proie à l’insécurité. Tout est par conséquent vu « sur le plan du sentimentalisme », remarque le cardinal Czerny qui juge « dangereux » de traiter ainsi le problème. Le Sous-secrétaire à la Section des migrants et des refugiés au Vatican prescrit « la conversion des cœurs pour assécher le marché de la traite des êtres humains ». Il rappelle qu’en 2015, le pape François a ainsi institué chaque 8 février, fête de Sainte Joséphine Bakhita, la Journée mondiale de prière contre la traite des êtres humains.
Intégration
La solidarité et la miséricorde sont l’autre solution aux migrations, selon le cardinal Czerny. « Jésus se présente lui-même comme le pèlerin n’ayant où reposer la tête », souligne-t-il. Sur un ton haut, un participant à la journée de formation soutient qu’il y a « 140.000 sans-papiers en Belgique qui ne veulent pas du tout s’intégrer ». Le cardinal Czerny répond en baissant la voix : « On ne peut pas justifier des attentes de cinq ans pour une réponse dans un pays riche avec une administration disposant de moyens. L’effort d’intégration doit se faire de part et d’autre. »
En fin de journée, Mgr Luc Van Looy évêque de Gand et référendaire à la Migration au sein de la conférence épiscopale belge, réitère cette nécessité d’efforts autant de la part des migrants que du pays d’accueil. Vu l’enrichissement mutuel au contact des uns et des autres. Mgr van Looy remarque par exemple qu’au sein de la population belge, « la foi revient au contact des migrants »
Pour la nouvelle année 2020, le plan pastoral de la Section migrants et des réfugiés du Vatican est axé sur les déplacés « climatiques » C’est une suite à l’encyclique Laudato Si’ du pape François. L’année dernière, on s’est davantage attardé sur les déplacés à l’intérieur de leurs propres pays. C’est en effet l’une des formes de migrations que relève Mme Suzy Serneels dont l’organisation s’implique dans le bien-être des communautés rurales en Afrique et en Amérique latine. Suzy Serneels lie les causes des migrations intérieures et extérieures en Afrique de l’Ouest à l’économie, la politique et l’environnement.
Elle prend l’exemple du Sénégal, d’abord à cause de la longue histoire de migrations de ce pays. Ensuite, les tomates du Sénégal ravitaillent le marché belge pendant l’hiver. Plus expérimentée pour la cueillette des tomates, la main-d’œuvre sénégalaise est très appréciée dans les exploitations d’Europe. Des potentialités peu valorisées en Afrique où « le développement du GSM est supérieur à l’agriculture et l’éducation », relève Mgr van Looy en se demandant si « l’Evangile est capable de résoudre le problème de la migration. »
Célestin Obama