En ce mois de novembre 2018, l’Eglise catholique en Belgique publie son tout premier rapport annuel. Fruit de deux années de travail, ce document présente un portrait vivant de l’action de l’Eglise dans notre pays, chiffres à l’appui. Un exercice de transparence inédit.
Que fait l’Eglise? Cette question, beaucoup de personnes, chez nous, se la posent. On sait bien sûr qu’il existe un "culte catholique", avec des eucharisties dominicales et plusieurs années de catéchisme pour préparer les enfants à recevoir des sacrements. On a aussi, généralement, une vision très hiérarchique de l’Eglise, qui apparaît souvent comme une institution très centralisée.
Le premier rapport annuel sur "l’état" de l’Eglise catholique en Belgique, qui paraît en cette fin novembre 2018, suggère une tout autre réalité. A côté de la vie liturgique de l’Eglise, réelle et bien vivante, à côté de son organisation hiérarchique et diocésaine, une réalité insoupçonnée s’y dévoile: des milliers de personnes, dont un très grand nombre de bénévoles, s’engagent au quotidien dans le service des plus pauvres, des malades, des réfugiés, à travers une multitude d’associations, d’initiatives et de projets locaux.
Né d’une volonté de transparence des évêques de Belgique, ce rapport a été préparé, pendant près de deux années, par un comité de pilotage. Son objectif: présenter les personnes qui sont l’Eglise en Belgique, et qui font que l’Eglise en Belgique rend de nombreux services à notre société. Composé de quelques membres de l’Eglise – dont Mgr Herman Cosijns et le Père Tommy Scholtes, respectivement, secrétaire et porte-parole francophone de la Conférence épiscopale – et de collaborateurs scientifiques, ce comité a collecté de nombreuses données chiffrées qui concernent l’année 2016.
Quelques chiffres
Comment ces données ont-elles été récoltées, et à qui sont-elles destinées? "Nous avons envoyé un questionnaire très concret aux diocèses et à de nombreuses organisations", explique Stéphane Nicolas, spécialiste des statistiques et co-rédacteur du rapport. "Il était difficile d’avoir des données exhaustives, nous avons donc fait le choix de présenter des projets pour illustrer des thèmes. Nous avons également laissé une place à des témoignages de personnes qui travaillent sur le terrain. Le rapport est destiné au grand public, mais il a été réalisé en faisant appel à toute la rigueur scientifique sous le contrôle d'universitaires."
De fait, le rapport ne présente pas de données chiffrées sur tous les aspects de la vie de l’Eglise, mais fournit des chiffres sur un certain nombre d’entre eux. Ainsi, la première partie du rapport nous apprend qu’en Belgique, 52,76% de la population belge se déclarent catholiques, et 9,42% catholiques pratiquants, ce qui correspond à 1.071.853 personnes.
Si ces chiffres proviennent d’études statistiques, toutes les autres données ont été directement récoltées par le comité de pilotage du rapport. On découvre ainsi que 163.360 bénévoles sont actifs dans les 3.846 paroisses que compte notre pays. Un chiffre impressionnant. Ces bénévoles assurent nombre de missions essentielles dans l’Egise d’aujourd’hui: accueil, catéchèse, participation à la liturgie, gestion administrative…
Autres chiffres significatifs: en 2016, il y avait 2.774 prêtres diocésains, 2.205 prêtres d’un ordre religieux ou d’une congrégation, et 601 diacres permanents. En 2016, 50.857 baptêmes, 41.060 confirmations et 7.859 mariages sacramentels ont été célébrés. Et le troisième dimanche du mois d’octobre 2016, 286.393 personnes ont participé à une eucharistie. Tous ces chiffres sont-ils exacts? Stéphane Nicolas précise: "A côté des chiffres certains comme ceux concernant les prêtres, les diacres, les sacrements, etc, les chiffres concernant les activités dans le secteur de la solidarité sont a minima, car ils ne couvrent que les activités recensées, et ce recensement est loin d'être exhaustif."
Un portrait diversifié
Certains chiffres sont donc moins exhaustifs. Ainsi, on ne trouve pas de statistiques globales relatives au nombre de personnes qui travaillent dans des institutions de santé catholiques, ni un tableau complet du nombre de ces institutions elles-mêmes. Par contre, on trouvera le nombre précis des aumôniers d’hôpitaux par diocèse et, en guise d’illustration, on lira qu’environ 14.000 personnes travaillent dans des institutions gérées par les Frères de la charité.
Cette "méthode" de présentation permet de montrer un portrait très diversifié de l’Eglise belge. Loin d’être un document froid et rébarbatif, ce rapport 2018 transmet une image vivante de l’action de l’Eglise – comprise en un sens très large. D’accès facile et agréable, le document présente des textes courts et clairs sur les différentes initiatives abordées, avec parfois un mot d’explication sur des réalités ecclésiales typiques. Ces textes sont illustrés par de nombreux témoignages, avec une mise en page agréable.
Dans une deuxième partie, beaucoup plus courte, le rapport présente des éléments relatifs au patrimoine et à l’organisation de l’Eglise en Belgique. On y découvre que la Belgique francophone compte 2.550 églises, et la Flandre 1.746 et que, entre 2012 et 2016, 75 bâtiments d’église ont été désaffectés. On y rappelle aussi, en passant, que les biens d’église n’appartiennent plus à… l’Eglise depuis la Révolution française de 1789, mais que le "Concordat de 1801" lui accorde des subventions publiques en guise de réparation…
A noter, en particulier, que le rapport communique des données relatives au financement de l’Eglise en Belgique. Une première à cette échelle. Outre les rémunérations des "ministres du culte", pris en charge par l’Etat fédéral, l’Eglise est financée par le biais des fabriques d’église – également une institution publique –, et de l’association des œuvres paroissiales (A.O.P.). Celle-ci centralise collectes, contributions et autres dons. Un dernier chiffre: le budget global de fonctionnement des évêchés et du centre interdiocésain s’élevait, pour l’année 2016, à 26.296.161 euros.
A l’avenir, la Conférence épiscopale devrait publier un tel rapport chaque année, ce qui devrait permettre d’établir certaines comparaisons instructives.
Christophe HERINCKX