Le pape François s’est exprimé pendant près d’une heure, le 25 septembre 2018, dans l’avion de retour de son voyage aux pays baltes. Le pontife est notamment revenu sur “l’accord provisoire” avec la Chine, certifiant que la nomination des évêques dans ce pays serait faite par le successeur de Pierre, après un “dialogue”.
Chine, course aux armes, abus sexuels… Les sujets n’ont pas manqué lors de la traditionnelle conférence que tient le pape dans l’avion qui le ramène des voyages effectués à l’étranger. Le souverain pontife répond aux journalistes. Mais, cette fois, les questions n’ont pas seulement abordé le voyage dans les pays baltes du pape.
Sur l’accord“provisoire” signé avec la République populaire de Chine au sujet de la nomination des évêques, François a précisé qu’il s’agit d’un processus qui se déroule depuis des années, un dialogue entre la commission vaticane et la commission chinoise pour organiser la nomination des évêques. « Vous savez que quand se fait un accord de paix ou une négociation, les deux parties perdent quelque chose. C’est la règle, les deux parties. Et on avance. Ceci est allé de l’avant, deux pas en avant, un en arrière, deux en avant, un en arrière, puis des mois ont passé sans se parler. C’est le temps de Dieu qui ressemble au temps chinois, lentement, ceci est la sagesse, la sagesse des Chinois. Et les évêques qui étaient en difficulté ont été étudiés au cas par cas. Et les cas des évêques sont arrivés à la fin, les dossiers de chacun, sur mon bureau. C’est moi qui ai été le responsable à signer. Le cas des évêques. Ensuite le cas de l’accord est revenu, les avis sur mon bureau, on se parlait, je donnais mes idées, les autres discutaient et allaient de l’avant »,a indiqué François.
Et d’ajouter: « Je pense à la résistance, aux catholiques qui ont souffert, c’est vrai. Et ils souffriront. Il y a toujours de la souffrance dans un accord. Mais ils ont une grande foi, ils écrivent, font arriver des messages que ce que dit le Saint-Siège, ce qui dit Pierre, c’est ce que dit Jésus. La foi de martyr de ces gens aujourd’hui va de l’avant. Ce sont des grands. »
« Si un seul prêtre a abusé d’un enfant, c’est monstrueux »
Sur la course aux armes et les menaces sur les frontières, le pontife a qualifiéles dépenses mondiales en armes de « scandaleuses ».« On me disait qu’avec ce qui se dépense en armes en un mois, on pourrait donner à manger à tous les affamés du monde pendant un an. Je ne sais pas si c’est vrai. C’est terrible. L’industrie et le commerce des armes, aussi la contrebande des armes, est une des corruptions les plus grandes. Et devant cela, c’est la logique de la défense. David a été capable de vaincre avec une fronde et cinq petites pierres. Mais aujourd’hui, il n’y a pas de David. »
Le sujet auquel le pape François n’a pu échapper est évidemment celui des abus sexuels commis par des clercs. Le pape avait abordé ce douloureux problème avec les jeunes lors de son voyage. « Les jeunes se scandalisent de l’hypocrisie des grands, des guerres, de l’incohérence, de la corruption. Et dans la corruption entre ce dont vous parliez, les abus sexuels. Il est vrai qu’il y a une accusation contre l’Eglise, on le sait tous, on connaît les statistiques. Je ne les dirai pas. Mais si un seul prêtre a abusé d’un enfant, c’est monstrueux. Cet homme, choisi par Dieu pour emmener les enfants vers le Ciel. Je comprends que les jeunes se scandalisent de cette corruption si grande. Ils savent que cela a lieu partout. Mais dans l’Eglise, c’est plus scandaleux car elle doit conduire les enfant à Dieu et non les détruire. Les jeunes cherchent à se frayer un chemin avec l’expérience. Quand j’étais avec les jeunes aujourd’hui, c’était très clair : Ils veulent de l’écoute. Ils ne veulent pas de formules toutes faites, ils ne veulent pas d’un accompagnement directiviste. »
Le pape a reconnu que « dans les temps anciens, on cachait ces choses. On les cachait aussi à la maison, quand les oncles violentaient la nièce, quand le papa violentait ses enfants. On les cachait, car c’était une grande honte. C’était la façon de penser des siècles passés, ou du siècle passé. Il y a un principe qui m’aide beaucoup pour interpréter l’histoire. Un fait historique s’interprète avec l’herméneutique de l’époque dans laquelle il a eu lieu. Pas avec une herméneutique d’aujourd’hui transposée. L’exemple de l’indigénisme. Tant d’injustices, de brutalité, mais on ne peut interpréter avec l’herméneutique d’aujourd’hui. Nous avons une autre conscience. »
François retient de son voyage en Lituanie, Lettonie et Estonie, la lutte pour maintenir l’identité. Il faut rappeler que ces pays ont longtemps vécus sous le joug de l’ancienne URSS. « Il la faut très forte et vous avez cela, vous avez une identité forte. Une identité qui s’est faite dans la souffrance, dans la défense, dans le travail, dans la culture. »
Et de s’interroger: que faire pour défendre l’identité ? « Le recours aux racines, cela est important. C’est une chose ancienne, mais c’est une chose qui doit être transmise. L’identité s’inscrit dans l’appartenance à un peuple et l’appartenance à un peuple doit être transmise. Les racines doivent être transmises aux nouvelles générations. Et cela avec l’éducation et le dialogue, surtout entre vieux et jeunes, et [ainsi] on peut transmettre cela. Et vous devez le faire. Car votre identité est un trésor. Ainsi – chaque identité est un trésor – conçue comme un appartenance à un peuple. »
D’autres thèmes ont encore été abordés par le souverain pontife comme la torture, la cruauté et la prison ou encore la haine de la foi et la transmission, ainsi quesur les migrants et l’ouverture.
Cath.ch/Imedia