Dans un article publié les 23-24 juin derniers, L’Osservatore Romano juge que si la communauté internationale veut atteindre les objectifs de développement durable (ODD) pour les enfants d’ici 2030, elle devra mettre les bouchées doubles.
Le quotidien du Saint-Siège revient sur le dernier rapport de l’Unicef intitulé « Progrès pour les enfants à l’ère des ODD », diffusé en mars dernier mais que l’organisme a reproposé à l’attention des Etats, le 22 juin. Ce rapport du Fonds des Nations unies pour l’enfance porte sur les objectifs de développement durable (ODD) pour les enfants d’ici 2030. Un des premeurs éléments interpellant qui en ressort est que les chiffres souvent repris sont en fait partiels. En effet, l’organisation onusienne met en évidence le fait que l’on manque de données pour évaluer les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs fixés par la communauté internationale. Selon l’Unicef, quelque 520 millions d’enfants fantômes ou invisibles échappent aux statistiques. Des enfants qui vivent dans 64 pays dont on a aucune données pour les deux tiers d’entre eux. Par ailleurs, environ 650 millions d’enfants vivent dans des pays où au moins les deux tiers des ODD sont hors de portée à moins de faire des progrès accélérés.
Mortalité infantile
Le rapport de l’Unicef passe en revue les progrès des droits de l’enfant au travers de cinq critères : la santé, l’éducation, la protection contre la violence et l’exploitation, un environnement sûr et des possibilités égales. Concernant la mortalité infantile, les prévisions de l’Unicef indiquent que, d’ici à 2030, si les tendances actuelles se confirment, 10 millions d’enfants de plus mourront de causes évitables avant leur cinquième anniversaire. En revanche, si l’objectif du développement durable de l’ONU est suivi, ce taux de mortalité baissera à moins de 25 décès tous les 1.000 enfants nés. A noter que plus de la moitié de ces décès surviennent en Afrique subsaharienne et pratiquement un tiers dans le sud de l’Asie.
Une des pistes pour diminuer la mortalité infantile serait d’améliorer l’assistance à l’accouchement. Le rapport indique qu’une naissance sur cinq a lieu dans des pays où des progrès sont nécessaires pour arriver à couvrir tous les besoins sanitaires avec un personnel qualifié. « Si rien n’est fait dans ce domaine, environ 11 millions d’enfants naîtront, par exemple en Afrique de l’Ouest et centrale, sans le support d’un praticien qualifié. Pour que cela change d’ici 2030, l’ensemble de la région devra étendre cette couverture six fois plus vite que la moyenne annuelle actuelle de changement », peut-on lire.
Autre fléau: la grossesse des adolescentes. Si le taux de natalité est passé de 56 naissances pour 1.000 chez les adolescentes de 15-19 ans en 2000 pour atteindre 44,1 pour mille en 2015, il reste nénamoins très élevé dans certaines parties du globe. En Amérique latine et dans les Caraïbes, ler taux de natalité chez les adlescentes est de 64 naissances pour 1.000 filles, et en Afrique subsaharienne, il est deux fois plus élevé que la moyenne mondiale. L’Unicef oprécise que la grossesse d’une adolescente peut être très problématique sur le plan physique mais également social et économique. En 2015, les problèmes de santé maternelle et d’accouchement, tels qu’une hémorragie, une septicémie ou une obstruction pendant le travail, étaient la principale cause de décès chez les jeunes-filles âgées de 15-19 ans : 10 sur 100.000 dans ce groupe d’âge dans le monde et près de 36 sur 100.000 dans les pays africains à bas ou moyen revenu.
Des progrès inégaux
Le rapport met aussi en evidence le mariage des enfants: de façon générale, ces mariages ont baissé au cours dix dernières années. Mais, selon l’Unicef les progrès sont trop lents pour mettre fin à ce phénomène d’ici 2030. L’agence de l’ONU rappelle qu’il faut près d’un siècle pour éliminer cette pratique au niveau mondial, et estime donc qu’il faudra un demi-siècle pour atteindre leur plus haut niveau enregistré au cours de cette décennie. Les projections de l’Unicef indiquent que, d’ici à 2030, plus de 150 millions de filles deviendront des épouses avant 18 ans.
Malgré des progrès inégaux, l’accès mondial à l’eau et aux services hygiéniques et sanitaires s’est considérablement amélioré ces dernières années, révèle encore le rapport. Entre 2000 et 2015, le nombre de personnes n’ayant pas accès à l’eau potable de base est passé de 1,2 milliard à 844 millions, tandis que le nombre d’êtres humains n’ayant pas accès aux services hygiéniques de base est passé de 2,5 milliards à 2,3 milliards.
Dans la préface de ce rapport, Henrietta Fore (photo), directrice générale de l’Unicef, indique que le rôle de son agence est de « fournir aux enfants et aux jeunes d’aujourd’hui les services, les compétences et les opportunités dont ils ont besoin demain pour construire un avenir meilleur pour eux-mêmes, pour leurs familles et leurs sociétés« . Il faut agir « rapidement », poursuit-elle, car d’ici 2030, si rien n’est fait, plus de 31 millions d’enfants souffriront de malnutrition chronique et se verront privés de la possibilité de réaliser leur potentiel, alors que 22 millions d’enfants abandonneront l’éducation préscolaire.
Il y a deux ans, les pays membres des Nations Unies s’éaient engagé à suivre un agenda ambitieux pour donner à chaque enfant sa meilleure chance dans la vie, avec une analyse pointue des données pour tracer la voie à suivre. Mais si, comme le mentionne le rapport de l’Unicef, les données sont manquantes, c’est sur ce point qu’il faut mettre la priorité. De nombreux pays ne disposent pas des informations nécessaires pour évaluer s’ils sont ou non sur la bonne voie. En d’autres termes cela veut dire que « les enfants du monde entier comptent sur nous, et nous on ne peut pas tous les compter », rappelle l’Unicef.
Le pape François a dénoncé à maintes reprises la situation dans laquelle vivaient des millions d’enfants à travers le monde. Le mois dernier, il avait « tweeté »: «Les enfants doivent pouvoir jouer, étudier et grandir dans un environnement serein ». Dans un autre tweet publié en avril à l’occasion de la journée mondiale contre l’esclavage des enfants, le souverain pontife écrivait: « Qui prend soin des petits est du côté de Dieu et l’emporte sur la culture du déchet. Libérons les enfants de toute forme d’exploitation ». A plus d’une occasion, François a condamné le travail qui asservit les enfants, dénonçant un « fléau », un « phénomène ignoble », qui affecte dans leur dignité les plus petits, qui les prive du droit à une enfance paisible, faite d’éducation, d’amour familial et de scolarité. Et il a souvent rappelé que le monde ne pouvait rester indifférent face à la pauvreté, aux sévices, à la manultrition, la misère et le manque de formation qui frappent des enfants.
J.J.D. (avec Aleteia et Vatican News)
© Photos: Unicef