Dans une lettre, Placuit Deo, adressée ce jeudi 1er mars à tous les évêques catholiques, la Congrégation pour la doctrine de la foi revient sur « certains aspects du salut chrétien », à la lumière des défis posés par « les transformations culturelles’ d’aujourd’hui.
Placuit Deo (Il a plu à Dieu) est une longue lettre produite par l’un des plus importants Dicastères du Vatican, celui en charge de veiller à l’intégrité de l’enseignement dans l’Eglise catholique. A travers ce document, la Congrégation pour la Doctrine de la foi propose une réflexion aux évêques sur certains aspects du salut apporté par Jésus-Christ. Le texte rappelle d’abord en quoi consiste le salut chrétien, en citant le concile Vatican II: « les hommes, par le Christ, le Verbe fait chair, accèdent dans l’Esprit Saint auprès du Père et sont rendus participants de la nature divine (…). La profonde vérité (…) sur Dieu et sur le salut de l’homme, resplendit pour nous dans le Christ, qui est à la fois le Médiateur et la plénitude de toute la Révélation » (Dei Verbum n° 2).
La lettre indique ensuite que « l’’enseignement sur le salut dans le Christ demande à être toujours à nouveau approfondi« . Or, estime le document, certains aspects du salut chrétien « peuvent être aujourd’hui difficiles à comprendre à cause des récentes transformations culturelles« ; il convient donc d’éclairer ces aspects « dans le sillon de la grande tradition de la foi et en se référant particulièrement à l’enseignement du pape François« .
Individualisme et subjectivisme spirituel
Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui ont du mal à comprendre la foi chrétienne, en particulier lorsqu’elle « proclame Jésus comme l’unique Sauveur de tout l’homme et de l’humanité entière« . Placuit Deo deux raisons expliquant cette difficulté. D’une part, « l’individualisme centré sur le sujet autonome tend à voir l’homme comme un être dont la réalisation dépend de ses seules forces« . Dans cette conception, « la figure du Christ correspond plus à celle d’un modèle qui inspire des actions généreuses, avec ses paroles et ses gestes, qu’à celle de Celui qui transforme la condition humaine, en nous incorporant à une nouvelle existence réconciliée par l’Esprit avec le Père et entre nous« .
D’autre part, « on voit se diffuser la vision d’un salut purement intérieur, qui suscite peut-être une forte conviction personnelle ou le sentiment intense d’être uni à Dieu, mais sans que soient assumées, guéries et renouvelées nos relations avec les autres et avec le monde créé« . Dans cette perspective, « il devient difficile de saisir le sens de l’Incarnation du Verbe, qui L’a fait membre de la famille humaine, en assumant notre chair et notre histoire, pour nous les hommes et pour notre salut« . En d’autre termes: une forme de spiritualité se fait jour, dans laquelle on se centre sur sa relation « intérieure » à Dieu, purement subjective, sans que cela débouche sur des changements concrets dans notre existence.
Cette forme de spiritualité rappelle le gnosticisme de l’Antiquité, pour lequel le salut consistait à s’élever « par l’intelligence au-delà de la chair de Jésus jusqu’aux mystères de la divinité inconnue » (François, Lumen Fidei, n° 47). On prétend « libérer la personne du corps et du monde matériel, où ne se voient plus les traces de la main secourable du Créateur, mais seulement une réalité privée de sens, étrangère à l’identité ultime de la personne et manipulable au gré des intérêts de l’homme« .
« Comment« , poursuit le texte « le salut pourrait-il nous parvenir par l’Incarnation de Jésus, sa vie, sa mort et sa résurrection dans son véritable corps, s’il ne s’agissait que de libérer l’intériorité de l’homme des limites du corps et de la matière, selon la vision néo-gnostique » Face à ces tendances, la Lettre veut « redire que le salut consiste dans notre union avec le Christ qui, par son Incarnation, sa vie, sa mort et sa résurrection, a fait naître un nouvel ordre de relations avec le Père et entre les hommes, et nous a introduits dans cet ordre grâce au don de son Esprit, afin que nous puissions nous unir au Père comme fils dans le Fils, et devenir un seul corps dans ‘le premier-né de nombreux frères’ (Rm 8, 29)« .
C.H.
Liez l’intégralité de cette Lettre via le lien suivant: Placuit Deo
Photo: Mgr Luis Ladaria, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (capture Youtube)