Le Belge Guérin Van de Vorst filme la réinsertion à travers le parcours de Ben, fraîchement sorti de prison. Converti à l’islam suite à son passage derrière les barreaux, Ben tente de renouer avec son fils de dix ans.
La question de la reconstruction après l’incarcération pose toujours débat. Sans véritable assistance, certains détenus parviennent à remonter la pente tandis que d’autres replongent. Le réalisateur belge Guérin Van de Vorst livre une vision sans parti pris à travers l’histoire de Ben (Vincent Rottiers), incarcéré durant trois ans suite à un cambriolage. Le jeune homme a plutôt bien rebondi après sa libération: il a retrouvé un boulot dans un garage grâce à un ami, il a déniché un appartement et espère bien renouer avec Samir, son fils de dix ans pour l’instant très distant. Son ex-compagne, désormais en couple avec un homme de bonne situation, ne l’entend pas de cette oreille. Elle lui interdit d’approcher Samir, même quand il s’agit de parler à travers les grilles de l’école. Il est vrai que le comportement de Ben est inquiétant depuis qu’il s’est converti à l’islam sous l’influence de Mustapha, son nouveau mentor…
Tourné à la façon d’un documentaire, La part sauvage ne donne pas une leçon mais ouvre des pistes de réflexion. Le film décrit les différentes étapes du parcours de l’ex-détenu, avec ses hauts et ses bas, ses hésitations, son manque de repères, son impuissance et sa volonté d’aller de l’avant. L’intrigue est centrée sur deux thèmes en particulier: la relation entre un père et son fils et la tentation de l’islamisme. Rien n’est expliqué avec des gestes brusques ou des mots violents, la mise en scène, toute en finesse, est ponctuée de nombreux dialogues centrés sur les relations humaines.
Tourné à Bruxelles
L’autre intérêt du film, hormis le thème, c’est son ancrage belge. La part sauvage a été tournée à Bruxelles, principalement dans le quartier du canal, à la frontière entre Molenbeek et le centre de Bruxelles, mais également dans le quartier de Stockel à Woluwe-Saint-Pierre. Mais La part sauvage vaut surtout le détour pour les questions d’actualité qu’il soulève: la marginalité, le besoin de se raccrocher à la religion pour trouver des repères, le déterminisme, la paternité… Le réalisateur Guérin Van de Vorst, déjà à l’origine de courts-métrages et de documentaires, signe donc ici un tout premier film plutôt réussi, même s’il souffre de quelques faiblesses au point de vue du scénario. Certaines séquences auraient pu en effet être ajoutées pour apporter du corps et du sens à l’intrigue. C’est un détail. Le mérite revient également à Vincent Rottiers, jeune acteur français déjà vu dans Le monde nous appartient et Dheepan, qui porte le film dans le rôle de Ben. Signalons également la présence de la jeune Salomé Richard ainsi que Walid Afkir (le mentor), apparu notamment dans le film Amour, réalisé par Michaël Haneke. Guérin Van de Vorst est un réalisateur à suivre.
Géry BRUSSELMANS