La Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) s'est réunie en assemblée plénière extraordinaire du 15 au 17 février 2018. Dans une déclaration, ils rappellent que l’Eglise n’est inféodée à aucune organisation politique et font part de leurs préoccupations.
La crise politique que traverse la République Démocratique du Congo (RDC) s'aggrave chaque jour. Trois mois à peine après avoir tenu une assemblée plénière extraordinairee, les évêques congolais se sont à nouveau retrouvés du 15 au 17 février. A l'issue de cette assemblée, la CENCO a publié un communiqué dans lequel elle déclare d'emblée que ces "retrouvailles" ont eu lieu en raison "de la persistance et de l’aggravation de la crise sociopolitique du pays."
Le texte des évêques conholais poursuit en rappelant que "Corps du Christ, l’Eglise n’est inféodée à aucune organisation politique. Sa seule préoccupation, c’est de contribuer au bien-être du peuple congolais tout entier, à la sauvegarde et à la promotion de la dignité de la personne humaine, au respect de la vie, des libertés et des droits fondamentaux."
Constats douloureux
"Alors que nous sommes censés nous préparer à la tenue des élections en vue d’une alternance pacifique au pouvoir, nous sommes profondément inquiétés par des faits très graves et des attitudes hostiles", poursuit le texte. La CENCO dresse la liste de ce qu'elle nomme des "constats douloureux": la répression sanglante des marches pacifiques des 31 décembre 2017 et 21 janvier 2018, la campagne de dénigrement et de diffamation de l’Eglise catholique et de sa hiérarchie, l’extension inquiétante des zones d’insécurité dans le pays, l'application "sélective et biaisée" des dispositions de l’Accord de la Saint-Sylvestre conclu en 2016 et, enfin, la polémique autour de la "machine à voter". "Pourquoi tant de morts, de blessés, d’arrestations, d’enlèvements, d’attaques des paroisses et des communautés ecclésiastiques, d’humiliations, de tortures, d’intimidations, de profanations des églises, d’interdictions de prier?", s'interrogent les prélats. Ils réaffirment leur soutien et leur proximité au cardinal-archevêque de Kinshasa mettant en exergue une série de campagnes de dénigrement, voire de diffamation visant à affaiblir la force morale de l’Eglise. Les évêques y voient un objectif de "détourner l’attention du peuple de vrais enjeux". "Nous n’abandonnerons jamais notre engagement pour l’avènement d’un Etat de droit en République Démocratique du Congo."
Urgence d’aller aux élections en 2018
Les membres de la CENCO pointent du doigt la progression des zones d’insécurité dans différentes provinces, en se demandant à qui profite cette déstabilisation du pays, à ce stade du processus électoral? Et de rappeler que seuls les accords dits de la Saint-Sylvestre, conclus le 31 décembre 2016, doivent encadrer le processus électoral et ne pas passer outre. "S’obstiner sur cette voie ne peut que conduire à des élections contestables et à de nouvelles crises. Nous en appelons au sens de responsabilité de tous et de chacun." La CENCO réaffirme l’urgence d’aller aux élections en 2018 et demande avec insistance l’application intégrale et effective des dispositions en souffrance de l’Accord de la Saint-Sylvestre, notamment le parachèvement des mesures de décrispation du climat politique, la redynamisation de la CENI, les dispositions relatives au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC). Elle demande aussi aux autorités compétentes d'annuler les édits interdisant les manifestations pacifiques, et d'engager des poursuites judiciaires à l’encontre de ceux qui ont commis des actes délictueux à l’occasion des marches organisées par le Comité Laïc de Coordination (CLC).
"Au peuple congolais, la CENCO recommande de demeurer débout et vigilant, de prendre son destin en main notamment par la prière et par des initiatives de nature à barrer pacifiquement la route à toute tentative de confiscation ou de prise de pouvoir par des voies non démocratiques et anticonstitutionnelles. A la communauté internationale, la CENCO demande de continuer à accompagner la République Démocratique du Congo dans le processus électoral et à placer le bien du peuple congolais au-dessus de ses intérêts."
Les évêques congolais rendent aussi hommage aux morts, aux blessés, et expriment leur proximité et compassion aux familles éprouvées par la perte des leurs durant les marches du 31 décembre 2017 et du 21 janvier 2018.
J.J.D.