Ce samedi les membres du Processus Kimberley se réuniront pour décider de son avenir. Si les propositions des ONG sont à nouveau ignorées, l’institution pourrait voir davantage d’observateurs de la société civile se retirer définitivement.
Mis sur pied en 2003, le processus de Kimberley avait illustré le combat de la lutte contre les « diamants de sang », en inspirant notamment le film Blood Diamond. A l’époque, ce mécanisme international de certification de diamants était jugé pionnier en la matière. Il visait à garantir aux consommateurs que leurs bijoux ne financent pas des conflits à travers le monde. Pourtant, selon la commission Justice & paix, une quinzaine d’années plus tard, le processus est en passe de disparaître, asphyxié par le blocage de certains Etats membres, pourtant signataires.
« Les membres de la Société civile ont mis sur la table une série de pistes pour renforcer le Processus. Il est maintenant crucial que des mesures ambitieuses soient adoptées, pour mettre réellement un terme à l’arrivée des diamants de sang sur le sol belge », estime Timur Uluç, chargé de plaidoyer au sein de Justice et Paix,. Les ONG exigent plus de transparence au sein du système de certification, mais également l’établissement d’un secrétariat permanent pour renforcer la structure du processus de Kimberley.
Des ONG lassées
Initialement, le Processus Kimberley cherchait à rassembler toutes les parties autour de la table: états, entreprises et ONG. Progressivement, ces dernières se sont toutefois retirées des discussions, déçues par la lenteur des avancées et l’inertie générale. Si les fraudes ont évolué, la définition de « diamants de conflits », reprise dans le Processus Kimberley demeure quant à elle statique. Sa portée limitée ne semble plus pouvoir répondre aux défis contemporains. « Le mécanisme de certification des diamants ne parvient pas, sous sa forme actuelle, à mettre fin aux nombreux problèmes liés au secteur diamantaire. Les rapports font état de contrebandes, de flux financiers illicites, d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent», affirme Gino Brunswijck, chercheur au sein du Réseau international Foi et Justice Afrique-Europe (AEFJN).
Avec le passage de plus de 80% des diamants bruts mondiaux et de 50% des diamants polis, Anvers demeure la plaque tournante mondiale de la pierre précieuse. Si la Belgique en retire de facto une place centrale dans le commerce des diamants, le vice-Premier ministre Didier Reynders préfère focaliser l’attention sur les Emirats arabes unis : « La Belgique milite pour des règles du jeu équitables et attire l’attention d’autres centres de négoce, comme Dubaï, sur les obligations du processus de Kimberley », avait-il déclaré en Commission « Relations extérieures » de la Chambre, en juillet dernier. En 2016, c’est pourtant la somme de 48 milliards d’euros qui a transité par le centre diamantaire anversois, « ce qui laisse une marge de manœuvre à la Belgique en termes de régulation de la chaîne d’approvisionnement », juge Justice & Paix.
J.J.D. /cp