Mardi 17 octobre, à Liège, pour la sortie de son livre « A la recherche de sens : 200 noms de dieux », l’auteur, Jean Olivier, était accompagné d’Edmond Blattchen et Jacques Dochamps, respectivement présentateur et réalisateur de la célèbre émission de la RTBF.
Passionné par l’émission « noms de dieux » dont il découvre le premier numéro sur le petit écran de sa maman, Jean Olivier entame en 2012 la rédaction d’un essai à l’occasion du vingtième anniversaire du programme. Il connaissait Edmond Blattchen depuis le début des années 1980. Une solide amitié doublée d’une évidente complicité s’est installée entre les deux hommes. Jean Olivier nous explique ne pas avoir écrit un livre sur la religion, ni un livre sur la recherche de Dieu mais bien un livre-hommage à l’émission culte de la RTBF, sorte d’anthologie destinée à un large public. « J’ai voulu rendre hommage à cette aventure exceptionnelle. Je suis très heureux de la présentation dynamique qui a été choisie et qui permettra aux enseignants de l’utiliser pour leur cours. » Ce livre est aussi lié à un projet citoyen participatif plus vaste. Chaque lecteur est invité à réaliser « son » noms de dieux » (en respectant les cinq chapitres de l’émission), exercice auquel s’est d’ailleurs livré l’auteur et à découvrir dans l’ouvrage, et à l’envoyer à la Bibliothèque liégeoise Ulysse Capitaine qui créera un fonds spécial pour collecter et inventorier les fiches reçues.

Jean Olivier, auteur
Comme l’explique Jean Olivier, « ce livre n’a pas été un travail, je me suis amusé à voir et revoir les émissions pour prendre des notes. C’est devenu une passion, une addiction. Mon idée en écrivant ce livre était aussi de donner du sens à la vie, de lui donner une valeur ajoutée. La question qui personnellement me taraude est la suivante : est-ce que l’univers peut avoir une conscience ?» C’est pourquoi l’auteur s’est tourné vers le neurologue Steven Laureys qui a accepté d’en rédiger la préface.
L’ouvrage aux multiples entrées se compose de l’essai rédigé sur la présentation et l’analyse de l’émission, suivi de l’anthologie des 200 invités reçus par Edmond Blattchen. Le livre contient également une biographie du présentateur et du réalisateur de l’émission, Jacques Dochamps. Enfin, il comprend une liste alphabétique des invités et un glossaire permettant de naviguer dans le vocabulaire parfois pointu utilisé lors des témoignages.
Pour Jacques Dochamps, « ce livre est un guide formidable pour parcourir les 200 émissions. Nous souhaitions rendre accessible l’ensemble des émissions à tout le monde mais personne n’était intéressé par ce projet et nous n’avions pas la force de déplacer des montagnes. Puis un homme est arrivé (ndlr: regard vers Jean Olivier)… comme Zorro… sans se presser, et il a rendu ce rêve possible. » Edmond Blattchen l’admet sans détours : « Le 26 avril 2016, Jean m’a sauvé la vie. »
Pour le présentateur, les téléspectateurs ne sont pas de simples consommateurs mais bien des citoyens responsables et il nous engage à suivre l’invitation de Jean Olivier à réaliser « notre « noms de dieux ». « Dans ce projet, vous y avez votre place, prenez-la ! »
Retour sur 24 années de rencontres

Edmond Blattchen
La première émission « noms de dieux » a été diffusée le 14 janvier 1992. L’invité était Bernard-Henry Levy. Jacques Dochamps et Edmond Blattchen avait obtenu un contrat pour cinq émissions. Il y en aura donc 200 sur près d’un quart de siècle d’antenne. Le décor minimaliste s’est imposé en raison d’un budget très limité. Dès le départ, l’idée était de produire une émission de collection, de référence qui témoignerait de l’état de la pensée philosophique, spirituelle, au tournant du 21e siècle d’où le format inchangé pendant toutes ces années de diffusion. « Nous devions offrir le même espace, la même forme, une sorte de cérémonial identique à tous nos invités. » explique Jacques Dochamps. Edmond Blattchen reçoit un seul invité en plateau pour lui permettre de développer sa pensée. Certaines personnalités ont refusé de participer à l’émission.
Parmi la centaine de lecteurs venus assister à la présentation liégeoise de l’ouvrage, se trouvaient d’anciens invités comme Pierre Somville, doyen émérite de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’ULiège, Lucien François, juriste spécialisé en philosophie du Droit, ancien membre de la Cour constitutionnelle, et Monseigneur Aloïs Jousten, évêque émérite de Liège, qui avait été reçu un an après sa prise de fonction à l’évêché de Liège. Dans un esprit pluraliste qui fut la marque de fabrique de l’émission, Edmond Blattchen et Jacques Dochamps avaient dressé ensemble une grille idéale d’invités. « Il a fallu parfois des années pour pouvoir recevoir un invité d’envergure. Je pense au Dalaï Lama ou Jean d’Ormesson. Nous étions aussi liés à des contraintes d’enregistrement – nous n’avions pas le choix des dates – qu’il fallait conjuguer avec l’agenda chargé de nos potentiels invités. » explique Edmond Blattchen.

Jacques Dochamps
De confidence en confidence, nous apprenons que lors de la préparation de ses émissions, le journaliste liégeois « se ferme dans sa bulle » les jours précédant l’enregistrement pour pouvoir « entrer dans la conscience des invités » selon les mots de Jacques Dochamps qui ajoute avec un sourire : « Il est alors presque en transe ». Jean Olivier nous lit un message envoyé par son ami Edmond pour comprendre son état d’esprit : « Je suis dans les nuages. Je suis dans le moment magique de la préparation. C’est enivrant, passionnant, ludique et tellement humain. […] Ce voyage de lui [l’invité]à moi, de moi à lui. […]»
De son aveu propre, Edmond Blattchen regrette de ne pas avoir pu clôturer l’aventure « noms de dieux » avec … le pape François ! Jacques Dochamps, pour sa part, estime qu’ils ont manqué les jeunes. « On n’a pas réussi à leur parler. Aujourd’hui, si je pouvais choisir un 201e invité, je ferais venir le chanteur Grand Corps Malade ou Abd Al Malik. » Et de confier sur son itinéraire personnel : « J’ai beaucoup plus désappris que je n’ai appris avec cette émission. Il y a plus de vides dans ma vie aujourd’hui que de certitudes mais cela la rend plus intéressante et difficile.»
Cette soirée était aussi l’occasion pour Edmond Blattchen d’adresser ses remerciements à son ami Jean « citoyen curieux et curieux citoyen », au public présent, à tous ceux qui ont soutenu l’aventure « noms de dieux » et en premier Robert Stéphane, fondateur de la RTB Liège en 1963, sans qui rien n’aurait été possible.
Toutes les informations sur le livre, son auteur et plus encore, sur le site recherchedesens.be
Sophie Delhalle