
(De droite à gauche): Mgr. Delville, Mgr Bonny et Mgr Michel Santier, évêque français de Créteil. © Sant’Egidio
Mgr Johan Bonny, évêque d’Anvers et Mgr Jean-Pierre Delville, évêque de Liège, ont participé à la Rencontre pour la paix organisée par la communauté Sant’Egidio, qui avait lieu cette année à Münster et Osnabrück.
« Ce que j’ai apprécié cette année », confie Mgr Delville, « c’est le lien avec l’actualité mondiale. Je pense en particulier au débat sur les enjeux de l’accueil des migrants et des réfugiés, au témoignage du Patriarche orthodoxe d’Antioche et de tout l’Orient, par rapport aux souffrances des chrétiens au Moyen-Orient, mais aussi au panel sur le terrorisme, où le Procureur fédéral belge, Frédéric Van Leeuw (photo ci-dessous), a évoqué le background de grand nombre des jeunes islamistes qui ont commis récemment des attentats ».
En effet, la plupart de ces terroristes étaient très jeunes et, comme les auteurs des attentats de Barcelone, ne sont jamais partis combattre en zone djihadiste. « Comment se fait-il que des jeunes hommes et femmes d’ici aient pu si rapidement embrasser de tels idéaux destructeurs? », s’est interrogé le procureur Van Leeuw. « Ils appartiennent à la génération WhatsApp, Telegram, Facebook, Instagram… Ce sont des gens à la recherche du bonheur, leurs désirs trop souvent noyés dans une société de consommation qui leur laisse continuellement un goût de trop peu. C’est la génération qui aime présenter sa vie sur la Toile, celle du selfie où le « Moi » est au centre et le reste du monde à l’arrière-plan »?
Toujours la même chose ?
Lors d’une évaluation de trente ans de rencontres « dans l’esprit d’Assise », l’année dernière à Anvers, Mgr Johan Bonny a fait le constat que le dialogue interreligieux avait peut-être atteint un certain plafond. « Ne fait-on pas toujours la même chose avec les mêmes gens, déjà conquis à la cause de la paix? », avait-il déclaré. Pour son confrère liégeois, il est heureux « qu’on fasse toujours la même chose, entre autres prier ensemble pour la paix. Par ailleurs, le fait de toujours revoir en partie les mêmes personnes a une grande valeur. Par l’amitié croissante, la compréhension mutuelle se renforce. Je fréquente aussi des conférences internationales ‘ordinaires’, comme par exemple une conférence de l’Unesco à Genève. Le dynamisme de l’amitié y est souvent beaucoup moins grand ; les participants y font leur intervention et puis rentrent chez eux », estime Mgr Delville.
Lors des rencontres pour la paix de Sant’Egidio, ce sont surtout les moments de partage entre les conférences, débats et panels qui comptent. Sans oublier la prière. Celle, œcuménique, dans le Dom d’Osnabrück mardi soir, était particulièrement intense. « Et puis, les nouveaux venus y sont accueillis très chaleureusement ; un musulman qui participait pour la première fois à cette rencontre pour la paix, m’a confié: ‘On me sourit, on me parle, je me sens chez moi’, explique l’évêque de Liège. Au fil des ans, la création, de ce réseau d’artisans de paix est en effet fondamentale. « J’ai encore une fois appris à apprécier davantage des gens que je n’avais pas encore rencontré dans ce contexte d’échanges amicaux, comme par exemple l’archevêque de Bordeaux, le cardinal Jean-Pierre Ricard, ou encore le Président des protestants de France, le pasteur François Clavairoly », conclut Mgr Delville.
Rappelons que le pasteur Clavairoly est parvenu, avec la conférence des évêques de France et Sant’Egidio, à lancer, il y a quelques mois, les « corridors humanitaires » en France. Cinq familles ont entretemps été accueillies dans l’Hexagone… Un exemple à suivre en Belgique ?
Benoit Lannoo