Le lundi 28 août, un comité de citoyens a commémoré le 75e anniversaire des rafles contre les Juifs dans le quartier anversois de Zurenborg. Quelque 150 personnes y ont participé.
Les organisateurs de cette manifestation ont dressé deux constats. Les razzias du 28 août 1942, durant lesquelles un millier de Juifs a été rassemblé, entre autres dans la cour de récréation de l’école de la Grotehondstraat, pour partir en camions le lendemain et en général ne jamais revenir, n’étaient pas le travail des nazis, mais bien de policiers belges. Secundo: ni l’Etat belge, ni la Communauté flamande, ni la ville d’Anvers n’ont pris l’initiative pour organiser cette commémoration de ces événements tragiques. Pour éviter que le devoir de mémoire fasse défaut, c’est donc un petit comité de citoyens qui l’a organisé sous la forme d’une promenade dans les rues concernées par les razzias d’antan.
« La mémoire de la Seconde Guerre mondiale fait défaut dans notre pays », explique l’historien Herman Van Goethem, auparavant directeur de la Caserne Dossin à Malines et entretemps recteur de l’Université d’Anvers. « En France, le Président Emmanuel Macron a tenu un grand discours à l’occasion du 75e anniversaire de la Rafle du Vélodrome d’Hiver en juillet dernier. Chez nous,rien », ajoute-t-il, rappelant que non seulement les nationalistes flamands et les rexistes ont participé aux rafles anti-juives, mais aussi les autorités et de simples citoyens. « Mais, tant en région francophone qu’en Flandre, nous ne sommes pas prêts de regarder en face cette page sombre de notre histoire », juge l’historien
Ne jamais oublier
A Anvers, les rafles ont commencé le 14 août 1942 mais une opération importante qui s’est déroulée le 27 août a été un fiasco pour les nazis, grâce à un policier qui avait averti la population dans les rues visées. C’est pourquoi les occupants allemands avaient exigé le lendemain que les services d’ordre belges arrêtent au moins mille Juifs. Le bourgmestre d’Anvers ainsi que le commissaire de police de l’époque ont veillé và ce que cet ordre soit scrupuleusement exécuté. Et si seule la « violence contre les biens » avait été permise, quelques officiers sur le terrain ont laissé éclater leurs sentiments antisémites contre ceux qui étaient pourtant leurs concitoyens et voisins juifs… souvent d’ailleurs des réfugiés et de pauvres immigrés.
« Ma fille va rentrer en classe dans les jours à venir et elle va jouer sur cette même cour de récréation », a déclaré Matthieu Marin du comité « Curieus Zurenborg », organisateur de la modeste manifestation de commémoration. « Nous ne pouvons jamais oublier ce qui s’est passé ici, afin d’éviter que l’Histoire se répète! », a-t-il ajouté.
Le dimanche 3 septembre, Bruxelles commémorera aussi ce douloureux 75e anniversaire des rafles nazies contre la population juive. A 18 heures, au coin des rues des Tanneurs, du Miroir et des Brigittines, on inaugurera un square dédié à Herschel Grynszpan, un jeune résistant juif. Diverses cérémonies marqueront cette journée du souvenir, qui se terminera à 20h30 en l’église de la Chapelle avec un exposé du cardinal Jozef De Kesel, archevêque de Malines-Bruxelles.
Benoit Lannoo
© Photos: Jan Somers