Le laboratoire de minéralogie de l’Université de Liège vient d’entamer l’étude de l’une des pièces maîtresses du Trésor de la Cathédrale à Liège.
C’est dans le cadre de son doctorat que Yannick Bruni va dresser l’inventaire des plus de 300 pierres précieuses serties dans le buste reliquaire de saint Lambert. Il nous explique qu’il y a probablement un diamant sur une bague, des améthystes et du cristal de roche, mais aussi des perles et peut-être des turquoises. La mission du jeune doctorant est donc de dresser la carte d’identité de toutes les pierres précieuses et d’en déterminer la composition exacte.
L’étude scientifique se fait in situ grâce à une technologie de pointe sous format portatif. « Nous utilisons deux types de matériel: un pistolet à rayons X qui permet de connaître la composition chimique (calcium, arsenic, fer…) et un diffuseur de rayons laser qui nous renseigne sur le type de pierre, si elle est naturelle ou non« , poursuit Yannick Bruni. Les vitrines du reliquaire ont été ouvertes pendant deux jours pour permettre aux scientifiques de réaliser leurs analyses qu’il faudra ensuite interpréter.
Cette pièce majeure du Trésor – avec le reliquaire de Charles le Téméraire – est le plus grand buste reliquaire de la période gothique tardif conservé en Europe. Cette pièce d’orfèvrerie en argent doré de presque deux mètres de hauteur a été réalisée vers 1512 à la demande du prince-évêque Erard de la Marck (1505-1538) pour contenir le crâne de saint Lambert. Elle est constituée de plaques d’argent fixées sur une structure en bois.
Le Professeur Hatert du Laboratoire de minéralogie a déclaré à nos confrères de RTC Télé Liège: « Notre but est bien entendu l’identification des pierres mais aussi de remettre les choses dans leur contexte historique, ce que l’on aimerait, à plus ou moins long terme, c’est de pouvoir définir le commerce des pierres précieuses à Liège à l’époque où le buste a été fabriqué. » Comment cela est-il possible à partir de données purement scientifiques? Réponse de Yannick Bruni: « on retrouve certains éléments chimiques en traces, typiques de certains gisements européens. On sait par exemple que le quartz du Portugal contient une certaine quantité de fer. »
Ce n’est pas la première fois que le Trésor de la Cathédrale collabore avec le service de minéralogie de l’ULg: « un mémoire de licence a déjà été consacré à l’étude d’une croix du 13e siècle conservée au Trésor« , nous précise Philippe George, conservateur du Trésor de la Cathédrale.
Le buste reliquaire de saint Lambert est encore exposé dans la cathédrale de Liège lors de célébrations exceptionnelles; la dernière sortie en date a eu lieu le 17 septembre (fête patronale) 2012 pour le 500e anniversaire de la réalisation de cette pièce majestueuse. « Le buste reliquaire est sorti hors de Belgique pour la dernière fois – et peut-être la première – lors de l’exposition « Trésor des cathédrales d’Europe Liège à Beaune », qui s’est tenue dans les hospices de Beaune en 2005« , comme nous l’explique Philippe George.
Le buste est en fait en très bon état. « Il a subi un lifting complet en 1971« , nous confie Philippe George. Pour cette restauration, le reliquaire avait été entièrement démonté; les restaurateurs avaient alors également procédé à l’inventaire photographique des pierres précieuses sans pousser plus en avant les investigations, ce dont se charge le Laboratoire de l’ULg pour les quatre prochaines années…
Sophie Delhalle