France : décès de Simone Veil


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France : décès de Simone Veil
Par Christophe Herinckx
Publié le - Modifié le
4 min

Figure marquante de la vie politique française, Simone Veil est décédée ce vendredi 30 juin à l’âge de 89 ans. Rescapée de la Shoah, ministre centriste, académicienne, elle est connue principalement pour la "loi Veil", adoptée en 1974, dépénalisant l'avortement sous certaines conditions en France.

Simone Veil, née Jacob, naît le 13 juillet 1927 à Nice, au sein d’une famille juive et laïque. Toute la famille sera déportée en 1944, dans différents "camps de la mort". Elle-même sera déportée dans le camp d'Auschwitz, à l'âge de 16 ans, avec sa mère et l'une de ses soeurs. Seules les trois sœurs en réchapperont.

Entrée en politique en 1974, elle fut la première femme à devenir ministre d'Etat en France, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, et dans le gouvernement de Jacques Chirac. Femme charismatique et de convictions, alliant fermeté et liberté de parole, elle demeurera, jusqu'à sa mort, l'une des personnalités préférées des Français.

En 1946, elle rencontre Antoine Veil, futur directeur général de la compagnie aérienne UTA, à Sciences-Po. Le couple donnera naissance à trois fils, dont le célèbre avocat Jean Veil. L'un d'entre eux, Nicolas, est décédé en 2002. Son époux est mort en avril 2013.

Magistrate, Simone Veil rejoint l’administration pénitentiaire en 1956, puis s’occupe des problèmes d’adoption. Sa maison est déjà un salon politique, où se côtoient gaullistes et centristes.

C’est à la chancellerie qu’elle est repérée par l’influente Marie-France Garraud, qui la recommande à Jacques Chirac. Elle deviendra alors ministre de la santé, où elle s'engagera dans une bataille pour la dépénalisation de l’avortement.

La "loi Veil"

Faisant face à l'opposition d'une partie de la droite française, Simone Veil parviendra à faire voter cette loi de libéralisation de l'avortement, sous certaines conditions. Cette loi, pour laquelle elle s'est engagée avec conviction, avait été voulue par le président de la République Valéry Giscard d’Estaing (1974-1981). Elle subira de violentes attaques, mais ne cédera pas.

Si ce combat qu'elle a mené avait un ressort essentiellement féministe - elle était marquée par la problématique des avortements clandestins - , et a abouti à ne plus assurer la protection inconditionnelle de l'embryon humain, la "loi Veil" concevait cependant la possibilité de l'avortement comme un dernier recours et une exception, dans des conditions strictement déterminées. "C'est toujours un drame et cela restera toujours un drame. C'est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s'il admet la possibilité d'une interruption de grossesse, c'est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme", a déclaré Simone Veil en 1974.

En 2014, cette loi a été révisée, conduisant à supprimer la notion de "détresse", et à rendre l'avortement accessible à toutes les femmes (mineures comme majeures), pratiquement sans conditions, jusqu'à la douzième semaine de grossesse. Certaines voix ont affirmé que Simone Veil n'approuvait pas cette évolution, d'autres ont prétendu le contraire... L'Histoire permettra peut-être de trancher cette question.

Longévité

Si elle ne brigua jamais la magistrature suprême en France - elle-même se déclara "trop indépendante pour cela" -, elle n'en occupa pas moins de hautes responsabilités politiques, notamment au niveau de l'Union européenne. En juin 1979, Simone Veil est élue présidente du Parlement de Strasbourg, jusqu’en 1982. De 1984 à 1989, elle est à la tête du groupe libéral, démocratique et réformateur.

En 1993, sous la "cohabitation" de François Mitterrand avec Jacques Chirac, elle redevient ministre d’Etat, chargée des Affaires sociales, Santé et Ville. En 1997, sous la présidence de Jacques Chirac cette fois, elle préside le Haut conseil à l’intégration et en 1998, elle siège au Conseil constitutionnel, jusqu’en 2007. Cette année-là, elle soutiendra la candidature de Nicolas Sarkozy, mais sans se départir d'une réelle distance critique.

Personnalité féminine préférée des Français, selon un sondage de 2014, elle a été élue en 2008 à l’Académie française, devenant alors la sixième femme à rejoindre les "Immortels".

Profondément marquée par sa déportation à Auschwitz, dont elle avait fait un récit émouvant dans son autobiographie, Une vie (2007), elle était devenue présidente de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, dont elle était restée présidente d’honneur.

C.H., avec lavenir.net

Photo: wikipedia.org


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