Au lendemain de la victoire d'Emmanuel Macron, Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille, était interviewé par Radio Vatican. Il analyse le vote des Français et estime que le succès du 8e président de la Ve république française passera par la baisse du chômage.
Le président de la Conférence des évêques de France, dont la tâche sera de rassembler les catholiques qui, à l’image de la France, sont sortis divisés de cette élection présidentielle, souhaite à Emmanuel Macron de réussir pour le bien de la France. "Sinon, ça serait catastrophique. Les tensions sont telles…", indique-t-il.
Il souhaite aussi que le pays retrouve une certaine sagesse. "Nous avons conscience qu’il ne faut pas mettre notre pays dans une situation ingouvernable. Donc il faut que le président et son gouvernement puissent travailler." Pour autant, Mgr Pontier estime que les prochaines élections législatives sont aussi faites pour rééquilibrer… "C’est un moment où nous exprimons des points particuliers auxquels nous tenons et que nous avons désignés dans la phase antérieure."
Avec cette élection, on assiste à une mutation de la société française ?
C’est une mutation de la société. En tout cas, le fait qu’il y ait eu beaucoup de votes blancs - plus que d’habitude, bien plus que d’habitude - montre cette insatisfaction et montre cette mutation. C’est-à-dire qu’un certain nombre de concitoyens français ont préféré le vote blanc, ne voulant pas se décider entre ces deux candidats et ayant été marqués profondément dans leurs projets à eux.
S’il y avait une échelle de valeurs, si vous deviez nommer des priorités, quelles seraient-elles ?
Le chômage, le chômage, le chômage. Lutter contre le chômage et donner du travail à tous parce que, sûrement, c’est ce qui est le plus destructeur pour les personnes, les familles, pour les perspectives, les projets et en particulier par rapport aux jeunes qui ne voient pas (d’horizon)… Ils ont un horizon bouché !
Dans ces circonstances, il y a une confiance qui est détruite et il s’agit de retrouver la confiance, et on retrouvera cette confiance par des actes qui produisent des fruits, et des fruits pour tous, y compris pour les plus fragiles. Manifestement, ce point-là est le plus important.
Autre enjeu de l’élection, l’Europe. Vaut-il mieux rester au sein de l’Union européenne ou faut-il penser à en sortir ?
Je ne suis pas un politologue averti, mais je pense qu’il faut rester dans l’Europe et continuer à donner à cette Europe des moyens de gérer l’entité européenne dans le respect de chaque peuple, bien sûr, et en même temps en créant un ensemble cohérent et porteur de fruits pour tous.
Il faut qu’on mette en place des mécanismes de confiance et parallèlement des mécanismes sur les points, comme la fiscalité ou les salaires, qui ont un écart trop grand entre les pays… avec le défi également de l’accueil des étrangers au regard de la situation mondiale actuelle.
Emmanuel Macron dit vouloir rassembler les Français. Est-ce que l’Eglise va tenter de rassembler les catholiques ?
Le combat des idées divise souvent et tandis que l’initiative dans l’action rapproche, et c’est sûrement cette piste là qu’il nous faut regarder. Mais il n’est pas étonnant que les catholiques soient divisés. Ils appartiennent à tous les milieux sociaux, à toutes les cultures. Et donc, à l’image de la France, ils sont divisés mais il y a quand même des barrières que nous ne pouvons pas franchir si l’on veut rester catholique. Des barrières issues de l’Evangile sur le respect de l’homme, sur le respect de la vie, l’accueil de l’étranger, la justice sociale, la recherche de la paix. Et on voit bien que c’est au niveau européen que ces choses, pour nous, commencent. On commence par réussir cette Europe et après on joue la solidarité avec les autres pays c’est évident.
Recueilli par Jean-Charles Putzolu
(photo Ciric)