"Nous n’avons pas d’armes, mais nous croyons dans la douce et humble force de la prière", a dit le Pape François lors de la cérémonie de clôture de la 30ième rencontre interreligieuse "dans l’esprit d’Assise", ce mardi 20 septembre dans la ville de Saint François.
"Comme chefs religieux, nous sommes tenus à être de solides ponts de dialogue, des médiateurs créatifs de paix." Mais le pontife romain s’est aussi adressé aux responsables politiques de ce monde et les a appelés "à ne pas se lasser de chercher et de promouvoir des chemins de paix en à regarder au-delà des intérêts de parti et du moment."
Le Saint Père a évoqué tous ceux qui "souffrent de guerres souvent oubliées" et "la douleur de la guerre dans les yeux des réfugiés", les familles dont la vie a été bouleversée par la guerre et "les enfants qui n’ont rien connu d’autre dans la vie que la violence. Eux savent bien, souvent mieux que les puissants, qu’il n’y a aucun avenir dans la guerre, et que la violence des armes détruit la joie de la vie." Pour s'exclamer avec conviction: "Ne nous lassons donc pas de répéter que jamais le nom de Dieu ne peut justifier la violence. Seule la paix est sainte, pas la guerre!"
Le Pape François a développé le mot ‘paix’ en quatre étapes. Car, a-t-il, "le mot est si simple, et en même temps difficile. Paix veut dire ‘pardon’, fruit de la conversion et de la prière qui, au nom de Dieu, rend possible de guérir les blessures du passé. Paix signifie ‘accueil’, disponibilité au dialogue, dépassement de fermetures qui ne sont jamais stratégies de sécurité mais ponts sur le vide. Paix veut dire ‘collaboration’, échange vivant et concret avec cet autre qui est don et non problème, qui est un frère avec qui nous pouvons chercher à construire un monde meilleur. Paix enfin signifie ‘éducation’: apprendre chaque jour l’art difficile de la communion, acquérir la culture de la rencontre et purifier la conscience de toute tentation de violence et de raidissement, car celles-ci sont contraires au nom de Dieu et à la dignité de l’homme."
Avant la cérémonie de clôture de cette journée de merveilleuses rencontres et gestes de mutuel respect, les leaders religieux du monde entier ont prié pour la paix. Les traditions religieuses sont diverses, "mais la différence n’est pas pour nous un motif de conflit, de polémique ou de froide distance", comme l'a rappelé le pape Bergoglio. "Nous n’avons pas prié aujourd’hui les uns contre les autres, comme c’est malheureusement arrivé parfois dans l’Histoire. Sans syncrétisme et sans relativisme, nous avons en revanche, prié les uns à côté des autres, les uns pour les autres. Nous avons prié pour que les consciences se mobilisent pour défendre la sacralité de la vie humaine, pour promouvoir la paix entre les peuples et pour sauvegarder la création, notre ‘maison commune’."
Cette ‘maison commune’ était aussi au cœur de l’intervention du Patriarche œcuménique Bartholomée Ier. "Justice veut dire une économie mondiale renouvelée, attentive aux besoins des plus pauvres", a rappelé le premier des patriarches orthodoxes. "Nous devons davantage observer la condition de notre planète, la sauvegarde de son milieu naturel, qui est non seulement l’œuvre de Dieu pour les croyants mais aussi la ‘maison commune’ pour tous. Justice veut dire sauvegarder les traditions culturelles, religieuses, artistiques de chaque peuple de la terre. Elle signifie avoir la capacité de solidarité ; cela n’est pas égale à une simple assistance, car il s’agit de faire nôtre le besoin, la souffrance et la joie de l’autre."
Ceci n’était pas la première allocution du Patriarche œcuménique à Assise, car Bartholomée Ier a reçu hier matin le doctorat ‘honoris causa’ à l’université voisine de Perugia et a été fêté pour le 25ième anniversaire de son ministère hier après-midi. Et à chaque fois, il a mis en évidence la collaboration des religions avec le monde laïque: "En tant que croyances, en tant que cultures laïques, en tant qu’êtres humains, ensemble nous devons faire de nouveaux gestes." En effet, le Patriarche a demandé que, "à notre retour chez nous et en ce moment historique précis, toute famille religieuse et toute culture fasse une autocritique et une introspection. Nous devons être capables de nous demander où nous avons commis des erreurs, où nous n’avons pas été suffisamment attentifs, pourquoi sont nés les fondamentalismes. Nous devons être capables de les isoler, de les purifier, et de les transformer en richesse pour tous."
Les victimes de la guerre et du terrorisme étaient évidemment au centre de cette rencontre d’Assise, tout comme les réfugiés. Le Pape François a déjeuné ce midi avec une vingtaine de réfugiés venus d’une part de la Syrie part les ‘corridors humanitaires’ de Sant’Egidio et d’autre part de la Lybie. Et le Patriarche Syro-orthodoxe Ignace Ephrem II Karim d’Antioche a été acclamé quand il a brandi la photo des deux évêques d’Alep, Gregorios Yohanna Ibrahim et Paul Yazigi, pris en otage depuis plus de trois ans maintenant. Enfin, une minute de silence pour les victimes de la guerre et de la violence et la lecture par une jeune bouddhiste nippone de "l’Appel pour la Paix" de cette 30e rencontre ""dans l’esprit d’Assise", l’évêque auxiliaire de Münster, Mgr Stefan Zekorn, a invité les participants pour la rencontre de l’année prochaine dans les villes de Münster et Osnabrück en Allemagne.
De notre envoyé spécial à Assise, Benoit Lannoo.