Les gardiens de prison sont en grève depuis plus d'une semaine. Ils protestent contre le manque de personnel et les économies imposées par le gouvernement. Ils ont rencontré ce lundi le ministre de la Justice Koen Geens, mais le blocage persiste et les conditions de détention, déjà intenables dans certaines prisons, s'aggravent dans les établissements pénitentiaires du pays. Une situation qui pose question en termes de droits humains...
Une semaine de grève, cela représente une semaine sans préau, sans visite, sans douche pour les détenus, une situation qui devient insupportable. Déjà, plusieurs détenus se sont rebellés dimanche soir à la prison de Tournai. La situation est donc très tendue et le directeur de la prison de Namur, interrogé par la RTBF radio ce lundi 2 mai, a dit craindre d’ailleurs qu'elle ne dégénère si la rencontre entre les syndicats et le ministre Geens n'aboutit pas. Du côté de la police aussi, appelée à remplacer les gardiens en grève, le ras-le-bol est réel.
La rencontre a bien eu lieu ce lundi en début d'après-midi, entre le ministre de la Justice, l'administration pénitentiaire et les représentants syndicaux du secteur des prisons. Plusieurs propositions ont été avancées, dont le remplacement, pour le reste de l'année 2016, de chaque membre du personnel qui part et le paiement d'une prime de flexibilité. Insuffisant, ont estimé les organisations syndicales. Pour les agents pénitentiaires en grève, c'est simple, il faut plus de personnel.
Pour la FGTB, le gouvernement "persiste dans la rationalisation" tandis que la CSC Services publics pointe le "problème de la sécurité, estimant que plutôt que de remplacer le personnel, il faut engager".
Le protocole d'accord sera envoyé à tous les délégués et des assemblées générales seront organisées mardi dans les prisons bruxelloises et wallonnes pour décider des suites à donner au mouvement de grève. Une nouvelle réunion aura lieu demain après-midi entre les syndicats des prisons et le ministre de la Justice Koen Geens pour tenter de trouver un terrain d'entente.
Une décision de justice
Par ailleurs, ce mardi 3 mai, la présidente du tribunal de première instance de Nivelles a rendu une ordonnance de référé condamnant l'Etat belge à améliorer le régime de détention des détenus des prisons d'Ittre et de Nivelles. L'Etat doit fournir aux détenus des deux prisons, qui ont entrepris des actions de grève, trois repas par jour dont un repas chaud, l'accès aux douches un jour sur deux, l'accès au téléphone un jour sur deux, et deux visites familiales par semaine.
L'ordonnance prévoit aussi deux jours de visite par semaine pour les avocats ainsi que pour la commission de surveillance. Si ces services ne sont pas instaurés dans les 24 heures qui suivent la signification de cette ordonnance, l'Etat belge devra s'acquitter d'une astreinte fixée par la justice à 10000 euros par infraction.
Présidente du conseil central de surveillance pénitentiaire, Véronique Laurent tire la sonnette d'alarme. A la prison d'Ittre, la nourriture pour les détenus était bloquée, s'indigne-t-elle. Dans la prison de Forest, la situation est également intenable, à tel point que le bourgmestre de la commune, Marc-Jean Gyssels (PS) a menacé de fermer la prison, si la situation ne s'améliorait pas très vite. Il a d'ores et déjà pris un arrêté prévoyant l'interdiction des "trios de détenus" dans les cellules à partir du 10. Arrêté qu'il envisage d'appliquer à la lettre. En cas de surpopulation carcérale, les policiers empêcheront l'entrée de nouveaux détenus à compter du 10 mai.
Des rapports plus détaillés seront ensuite demandés à des experts et aux pompiers. En fonction de leurs conclusions, le bourgmestre de Forest décidera de fermer ou non la prison. "J'espère que d'ici-là le ministre de la Justice et le ministre de l'Intérieur, qui a la charge de la Régie des bâtiments, prendront leurs responsabilités", a déclaré Marc-Jean Ghyssels. "Mais le Premier ministre, le ministre de l'Intérieur et le ministre de la Justice sont totalement informés de la gravité de la situation pour Forest. La prison a de plus une aile psychiatrique, avec des malades qui ne sont plus suivis quotidiennement depuis le déclenchement de la grève".
Souvent montrée du doigt par des ONG, la situation dans les prisons belges pose de sérieuses questions en termes de droits humains, et ce depuis plusieurs années. La situation ne cesse de se détériorer, notamment à l'occasion des grèves à répétition, signe que les conditions de travail de personnel pénitentiaire ne cessent également de se dégrader. Si des aménagements ont été effectués ces dernières années, et de nouvelles prisons construites, la situation demeure extrêmement tendue, en raison d'un manque criant de moyens. Une situation indigne de notre démocratie, l'état des prisons dans un pays donné étant d'ailleurs révélateur du niveau de respect des droits de l'homme dans celui-ci.
D'après Belga et et lalibre.be