Chaque année, 5% des élèves sont orientés vers l’enseignement spécialisé. Une proportion qui ne cesse d’augmenter... Mais la diversité sociale des familles est déformée, les enfants défavorisés sont vite orientés vers cet enseignement spécial.
L'observatoire belge des inégalités constate que les enfants les plus défavorisés sont les plus représentés dans l'enseignement spécialisé. La géographe Alice Romainville de l'ULB, membre de l'observatoire, a fait ce triste constat en épluchant les statistiques des écoles spécialisées en fonction de l’origine sociale des élèves. Le pourcentage d'enfants venus des quartiers défavorisés est systématiquement supérieur à la proportion d'enfants de classes sociales élevées.
Qui plus est, cette surreprésentation des élèves pauvres se vérifie dans tous les types d'enseignement spécialisé. Rappelons que l'enseignement spécial qui a pour but de «rencontrer les besoins éducatifs spécifiques des élèves en difficulté», concerne à la fois des enfants souffrant d’un handicap, de déficiences auditives ou visuelles, de troubles comportementaux ou de troubles de l’apprentissage (dyslexie, dyscalculie, dysorthographie, etc.). Ils sont un peu plus de 35.000 à être scolarisés dans ces écoles primaires ou secondaires.
L'observatoire belge des inégalités estime ce constat surprenant "car l’enseignement spécialisé n’a clairement pas pour objectif de résoudre des difficultés d’apprentissage liées à l’environnement social des enfants. Ces difficultés devraient être prises en charge dans le cadre de l’enseignement ordinaire, avec les moyens adaptés."
L’Observatoire des inégalités pointe donc du doigt le système en lui-même: les enfants sont orientés trop tôt. Ce choix se fonde sur des tests, notamment sur le quotient intellectuel, qui favorisent davantage les élèves de familles plus aisées: "par le biais de l’orientation vers le spécialisé, l’école ordinaire exclut des enfants qu’elle ne devrait pas exclure. Beaucoup d’enfants sont jugés inadaptés à l’enseignement ordinaire pour des raisons culturelles, sociales, affectives."
Il reste à espérer que ce fait soit pris en compte par la ministre Joëlle Milquet qui prépare actuellement une note d'orientation sur l'enseignement spécialisé.
A.-F. de Beaudrap (le Soir / Observatoire des inégalités)