Namur: Les Sauverdias ont déménagé pour mieux accueillir les hôtes


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Namur: Les Sauverdias ont déménagé pour mieux accueillir les hôtes
Par Jean-Jacques Durré
Publié le - Modifié le
6 min

Sauverdias 2014 7« Je me sens bien ici. J'ai l'impression d'y être comme je serai dans le ciel ». Le frère Henri déborde d'enthousiasme en parcourant la nouvelle implantation des Sauverdias.

Le stress des dernières semaines est presque oublié chez frère Henri comme chez les bénévoles qui font vivre les ''Sauverdias''. Cette maison d'accueil permet, sept jours sur sept, à plusieurs dizaines de personnes, en difficultés, de se restaurer, de prendre une douche... Pour répondre à une demande toujours plus grande, les Sauverdias ont quitté la chaussée de Liège pour le 327 de la rue de Dave, toujours à Jambes. Visite guidée.

Les ''Sauverdias'' ont investi une ancienne surface commerciale. Pour lui donner une âme, d'importants travaux ont été nécessaires. Ils ont pu être réalisés grâce à des dons mais aussi à un soutien des Frères de la Charité qui gèrent, depuis des années, cette maison d'accueil. Et le résultat est vraiment plaisant.
Une première porte vitrée franchie et le visiteur se trouve dans un sas, un espace où sont entreposés des pâtisseries, des fruits... Le tout a été apporté un peu plus tôt par des commerçants. Les produits sont en trop faible quantité pour une utilisation en cuisine. Chacun des hôtes peut se servir, un en-cas souvent le bienvenu en attendant le repas. ''Accueillir, c'est ouvrir les mains'', le message collé sur la porte a été écrit sur des mains découpées dans du papier coloré. Cette porte également vitrée ouvre sur le nouvel espace des Sauverdias.

Autour d'une table basse sur laquelle des magazines sont proposés à la lecture, des fauteuils. Deux hommes y sont confortablement installés, l'un s'est endormi. Un peu plus loin, un bureau... c'est le domaine de Léon, un des deux bénévoles chargé de l'accueil. Léon, large sourire, a un petit mot pour chacun, l'accueil est résolument chaleureux. C'est encore Léon qui encaisse les 2 euros demandés, par exemple, pour le repas de midi.

Lumineux et coloré

L'espace dédié aux hôtes est très lumineux. Cela vient des couleurs choisies pour donner vie aux murs: du gris clair et du jaune mais aussi de la nouvelle toiture largement vitrée. Philippe, l'un des bénévoles: ''Avant le déménagement, nous fonctionnions dans une maison de la chaussée de Liège. Les hôtes appréciaient le côté familial. Nous avons veillé à ce que nouveau lieu soit tout aussi convivial.'' Et on peut le dire, le pari est réussi. Des tables occupent tout l'espace. Dans quelques heures, elles seront joliment dressées. Les hôtes pourront y prendre leur repas confortablement installés. La nouvelle adresse permet d'accueillir 90 personnes. En cas de nécessité, on pourrait même monter jusqu'à 100 convives.

La surface a été cloisonnée pour installer, à l'arrière du restaurant, des locaux techniques: la chaufferie, le matériel d'entretien, le stockage des vivres avec deux grandes chambres froides (dont une neuve), un lieu pour éplucher et laver les légumes... et puis une cuisine. Ce jour-là, c'est Michel qui est aux fourneaux. Tout est neuf et en inox pour répondre aux exigences de l'AFSCA. La taille des cuisinières est imposante. Michel est heureux dans son nouveau domaine. Ils sont cinq cuisiniers à se relayer car, outre la préparation des repas 7 jours sur 7, il faut encore gérer les stocks.

Des cuisiniers, difficulté supplémentaire, qui travaillent toujours un peu dans l'inconnu: ils ne connaissent jamais le nombre d'hôtes qui se retrouveront autour de la table. Depuis le mois de janvier cela fluctue: entre 47 et 85 repas sont pris chaque jour. En 2014, l'équipe a servi 22.237 repas, un nombre qui va sans cesse en augmentant. Cela représente une moyenne, par jour, de 70 repas. Cette augmentation de la fréquentation a poussé la congrégation des Frères de la Charité à programmer ce déménagement. Et ce n'est pas demain que les choses devraient s'arranger. Les SDF font partie des habitués. Mais ils ne sont pas les seuls. De plus en plus de retraités ont choisi de venir s'y restaurer. Avec une faible pension, ils ne pourraient boucler leur budget.

La maison de la chaussée de Liège a rendu de bons services. Il était cependant nécessaire de tourner une page. Non seulement elle était devenue bien trop petite mais en plus elle était très fatigante pour tous les bénévoles. Une maison de plusieurs étages cela en fait des escaliers à monter et à descendre sur une journée! Dans la nouvelle infrastructure, plus une marche, tout est de plain-pied. Une toilette a été aménagée pour les moins valides. Aux Sauverdias, il est encore possible de prendre une douche et de laver son linge. Par contre, cette maison d'accueil n'est pas prévue pour héberger, la nuit, des personnes.

La solitude fait partie des pauvretés

Les Sauverdias ouvrent leurs portes, 7 jours sur 7, de 7h30 à 15h30. Les premiers sont là bien plus tôt. Quelques-uns ont passé la nuit, à deux pas delà, à la caserne du Génie qui, en hiver, transforme une pièce en abri de nuit. D'autres ont passé la nuit dehors ou dans le froid et n'aspirent qu'à une chose: se réchauffer. Frère Henri et le cuisinier de service n'ont bien sûr pas le coeur à les laisser patienter dehors. Ils peuvent prendre un petit déjeuner et puis partir ou rester. Rester, c'est le choix de cet homme qui a erré toute la nuit et qui s'est finalement endormi dans un des fauteuils.

Il n'est pas encore 10h et les premiers hôtes sont déjà là. Une dame est assise, seule, à une table. Deux hommes papotent. Très vite, ils seront rejoints par de nouveaux arrivants. Cette maison d'accueil est un lieu pour se restaurer, faire sa toilette... C'est aussi un lieu pour lutter contre la solitude. On parle, on lit le journal... Bientôt comme c'était le cas dans la précédente implantation, des activités seront programmées l'après-midi. La télévision accrochée au mur n'est pas encore raccordée. Lorsqu'elle le sera, elle fonctionnera bien sûr mais pas pendant les repas. Le temps passé à table devant être un moment de convivialité, d'échange, de partage.

Dieu, dans les projets

Impossible de ne pas le voir: un crucifix occupe la place centrale d'un des murs. ''Nous ne voulons pas faire de la propagande, explique Frère Henri. Mais juste marquer une certaine identité. Généralement, les hôtes le comprennent bien. Si certains n'apprécient pas, je me contente de leur dire: 'je suis chrétien, c'est ma conviction. Vous avez votre conviction et je vous demande de me respecter.''' Frère Henri de poursuivre: ''J'écoute beaucoup les gens. Ils me parlent de leurs difficultés et ils sont ainsi soulagés. Je conclus régulièrement une rencontre en leur disant: 'Ce soir, je célébrerai la messe à votre intention, je prierai pour vous.' Beaucoup sont émus. Au fil des discussions, j'ai bien compris que plusieurs sont catholiques et pas opposés à des moments pour prier Dieu. Je ne sais pas encore comment je vais les organiser mais en 2015 je suis bien décidé à inviter, ceux qui le désirent, à se retirer dans la chapelle. Ils ne sont pas prêts pour une célébration, je veux commencer timidement.''

Même si les dernières semaines ont été très lourdes, le frère Henri n'a rien perdu de son enthousiasme et de son envie de développer la maison. Il voulait que les Sauverdias soient installés dans leur nouveau bâtiment avant Noël. Les pros de la construction qui sont intervenus avaient bien tenté de le convaincre que ce ne serait impossible. Frère Henri y a cru et il a eu raison. Même s'il reconnaît aujourd'hui que durant quelques jours, tout cela a été difficile à mener. Une nouvelle implantation, ce sont de nouvelles marques à trouver. Il y a eu des tensions vite oubliées. L'équipe des bénévoles est soudée et les hôtes sont heureux. Que demander de plus?

Christine Bolinne (Diocèse de Namur)

Catégorie : Belgique

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