« La famille est ressentie comme le lien indispensable parce qu’il subsiste après tous les autres. Mais il se transforme énormément, avec un basculement du lien de couple vers le lien de filiation, qui nous relie à nos parents et à nos enfants. Les liens de couple restent certes nécessaires, importants, mais on les sait désormais fragiles. »
Dans une interview au journal « La croix », la spécialiste du droit de la famille, et ancienne doyenne de la faculté de Droit de Lille II, Françoise Dekeuwer-Défossez, se penche sur la filiation, nouveau lien fondateur. Extraits ci-dessous.
F. D.-D. : C’est le lien de filiation qui fonde désormais la famille. Il est perçu, contrairement au lien de couple, comme très solide. Dans un monde mouvant, la filiation est perçue comme immuable. Entre la stabilité des liens de filiation et la fugacité des liens de couple, il existe une contradiction. Les séparations vont écarteler le lien de filiation entre deux personnes qui vont contracter de nouvelles unions.
Ecarteler?
F. D.-D. : Il faut oser écrire ce mot. L’enfant est toujours devant une division. Il n’échappe pas aux conflits de loyauté, d’autant que rares sont les parents qui résistent à la tentation d’impliquer l’enfant dans leur contentieux.
La notion d’engagement à vie disparaîtrait-elle?
F. D.-D. : Cette notion a existé en Europe catholique du XIIe au XXe siècle. Partout ailleurs dans le monde, elle n’existe pas. Toutes les sociétés connaissent des formes de divorce, très diverses. Seule l’Eglise catholique a cru, à un moment donné, pouvoir imposer un autre système. En théorie, cela a fonctionné. Pratiquement, il y a eu beaucoup d’accommodements avec la règle.
L’engagement à vie serait une singularité catholique?
F. D.-D. : Absolument. Cela correspond à un moment de l’histoire, soutenu par une théologie particulière. Cette vision du monde est aujourd’hui questionnée. Un fondement théologique a imprégné la société, et aujourd’hui, il ne fonctionne plus dans la société occidentale, ni même chez les catholiques. Sauf chez les plus engagés. C’est pour moi la fin d’un cycle.
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