L'Eglise catholique philippine était à l'avant-garde des près de 100.000 manifestants qui ont protesté le 26 août 2013, dans les rues de la capitale Manille, contre la corruption dans le gouvernement. Le cardinal philippin Luis Antonio Tagle, qui a pris part au rassemblement, a appelé ses concitoyens à "aimer comme des frères et sœurs les pauvres et les exploités".
Les protestataires ont dénoncé la corruption qui règne dans le pays et en particulier la pratique d’une forme de clientélisme connu sous le nom de "pork barrel" (le tonneau de porc), rapporte le 27 août 2013 Eglises d'Asie (EDA), l'agence d'information des Missions Etrangères de Paris. Appelé officiellement "Priority Development Assistance Fund" (PDAF), ce système, dénoncé depuis des années, consiste en des subventions d’Etat versées aux députés pour les "projets de développement" de leur circonscription. La plupart du temps, ces fonds sont en réalité alloués au financement de leurs campagnes électorales, quand ils ne sont pas détournés à des fins personnelles ou pour l’entretien de réseaux mafieux.
Tous les milieux unis contre la corruption
Organisée en quelques heures grâce aux réseaux sociaux, la "Million People March" a surpris par son ampleur et la diversité de ses participants. A Manille, la foule comptait notamment des prêtres en soutane marchant aux côtés de militants déguisés en cochons, tandis que des organisations musulmanes portaient avec des religieuses catholiques des panneaux où l’on pouvait lire "abolissons le 'pork barrel'!". La manifestation s’est déroulée totalement pacifiquement.
"Ce fut la manifestation de tous les records, le plus grand rassemblement depuis l’élection de Benigno Aquino en 2010, et le premier meeting sans leader ou couleur politique", a précisé le quotidien philippin "Daily Inquirer".
Promesses électorales non tenues
L’ensemble du pays s’accorde en effet à dire que l’ampleur de la manifestation est à la mesure de la déception des électeurs de Benigno Aquino. L'actuel président avait placé la lutte contre la corruption, et spécialement contre le clientélisme, au coeur de sa campagne, il y a trois ans. Mais, depuis l’élection de Benigno Aquino, une série de scandales, ainsi que le récent audit d'une commission gouvernementale, ont révélé que le système du "pork barrel" était toujours aussi florissant.
"C'est une première victoire, mais c'est surtout le commencement d’une lutte qui ne doit pas se relâcher", a déclaré Mgr Oscar Cruz, archevêque émérite de Lingayen-Dagupan, au nord du pays. Mgr Cruz a affirmé qu’il était impossible de croire aux promesses du président tant que ce dernier n’obligerait pas les hauts représentants de l’Etat convaincus de corruption à démissionner.
Apic