Le 11 mars dernier, l’astrophysicien de renommée internationale Trinh Xuan Thuan était l’invité des Grandes Conférences catholiques. Venu spécialement des Etats-Unis, ce brillant intellectuel a accepté de répondre à nos questions concernant le sens de la vie et la place de l’être humain dans l’univers.
– A quand remonte votre intérêt pour l’astrophysique ?
– J’ai eu la chance de faire mes études universitaires au California Institute of Technology, à la fin des années soixante. L’université possédait alors le plus grand télescope du monde, celui du mont Palomar, de 5 mètres de diamètre. Avoir accès au télescope qui regardait le plus loin dans l’univers, et donc qui remontait le plus loin dans le passé de l’univers, ne pouvait qu’impressionner un jeune esprit. D’autre part, les années soixante ont été l’âge d’or de l’astrophysique. Le rayonnement fossile, les quasars et les pulsars venaient d’être découverts. L’exploration du système solaire battait son plein. Au milieu de cette fermentation intellectuelle, il était inévitable que je devienne astrophysicien.
– L’émerveillement est-il le moteur de votre vie ?
– Dans l’esprit populaire, l’activité scientifique est souvent considérée comme une entreprise purement rationnelle, basée sur la seule logique et dénuée de toute émotion, et la physique comme une science d’où toute contemplation esthétique est bannie. Pourtant, le scientifique que je suis est tout autant sensible à la beauté et à l’harmonie de la nature qu’un artiste ou un poète. Dans mon travail, je me laisse souvent guider par des considérations d’esthétique, qui viennent s’ajouter à celles d’ordre rationnel. L’idée d’un travail scientifique dépourvu de tout sentiment est donc tout à fait erronée.
– Vous êtes l’un des rares astrophysiciens à vous poser la question du sens. Pourquoi ?
– Parce que, quand je vois la beauté et l’harmonie de l’univers, je me dis qu’il est impossible que tout cela n’ait aucun sens. L’univers semble être réglé pour qu’un observateur capable d’apprécier son organisation et son harmonie apparaisse. Cela s’appelle le principe anthropique, et c’est le pari que je fais. (…)
Pascal ANDRE
Retrouvez la suite de cette interview dans le journal « Dimanche » du 31 mars 2013, également disponible via la boutique en ligne