Deux camps s’affrontent au Liban. D’un côté, le chrétien maronite Michel Sleiman, président de la République libanaise, qui plaide pour la reconnaissance du mariage civil dans le cadre de la mise en place d’un « Etat laïc moderne ». De l’autre, le cheikh sunnite Mohammad Rachid Kabbani, mufti de la République, qui fulmine contre une telle idée.
Le soutien populaire grandissant pour la légalisation du mariage civil, s’exprime surtout parmi les jeunes Libanais. Selon certaines sources, quelque 10% des nouveaux mariés libanais se rendent chaque année à l’étranger pour se marier civilement. En effet, le Liban ne connaît, en droit interne, que le mariage religieux, qui produit tous ses effets civils aux yeux de l’Etat. Le législateur libanais autorise cependant les Libanais qui contractent des unions à l’étranger à adopter les formes civiles de la loi étrangère.
Kabbani qualifie le mariage civil de « microbe »
Le mufti de la République a fait connaître, sans détour, la position officielle de l’autorité sunnite: « Tout responsable musulman qui approuve la légalisation du mariage civil est considéré comme apostat et traître à la religion musulmane! »
Qualifiant le mariage civil de « microbe », Kabbani poursuit: « Il ne sera ni lavé, ni mis dans un linceul et ne recevra pas les prières à sa mort, ni ne sera enterré dans les tombes des musulmans ». « Il est de notre devoir de nous opposer à ces tentatives de nous éloigner de notre religion par le biais de slogans qui prônent la réforme », a-t-il déclaré. Les propos polémiques du mufti suscitent des réactions enflammées sur internet et les réseaux sociaux.
Sleiman vise la modernité
« Des dignitaires s’opposent au mariage civil, mais cela ne change rien à mes convictions et à ma quête pour aiguiller le train sur les bons rails », a expliqué Michel Sleiman sur son compte Twitter. Mais c’est un « oui » du ministre de l’Intérieur, Marwan Charbel, qui ferait jurisprudence. La balle est donc dans le camp ministériel.
L’ancien président libanais, Elias Hraoui, avait déjà proposé en 1998 une loi similaire qui avait été acceptée par le gouvernement, mais retirée devant une levée de boucliers des autorités religieuses. Les autorités chrétiennes ne se sont pas encore officiellement prononcées sur cette question qui agite un pays régi par le « confessionnalisme ». Au Liban, ce sont les chefs des 18 communautés religieuses qui régissent les questions relatives au mariage, au divorce, à la succession, à la garde parentale et à d’autres aspects de la vie d’une personne.
Apic/SB