A un jet de pierre de la place Saint-Lambert, derrière la gare de Liège-Palais, l’église Saint Servais accueille durant toute la période du Carême un Chemin de Croix époustouflant que l’on doit au peintre André Simar.
«Depuis mon enfance, j’ai toujours aimé la couleur, reconnait André Simar. Et je crois que le public aussi ! ». C’est un peu près la seule indication personnelle, la seule piste d’approche de son œuvre que suggère l’artiste lorsqu’il consent à commenter ses tableaux. Et c’est un fait que sa peinture regorge de nuances et de tons différents. Mais, à y regarder de plus près, c’est l’ensemble de son travail qui est placé sous le signe de la multiplicité, du foisonnement.
Impossible en effet d’enfermer le style du peintre liégeois dans une école particulière de peinture. Certes, la figure humaine y est partout présente, ce qui ferait de lui un figuratif. Mais des éléments abstraits, des formes, semblables à des enluminures, viennent aussi découper l’espace de ces grands tableaux à la manière d’une planche de B.D. « Il faut être moderne », lance André Simar, du haut de ses presque 86 ans, lorsqu’on lui fait remarquer cette pluralité des influences que l’on retrouve dans sa peinture.
Mais ce que produisent avant tout les grands tableaux d’André Simar, c’est le sentiment de profusion, d’énergie, de vie bouillonnante. Dans chacun des espaces, des corps et des visages, des fleurs, des paysages se pressent, se bousculent, ou, mieux encore, se superposent en couche. Toutes les époques sont présentes autour de la Croix. Les plus anciennes, avec des personnages issus de l’Histoire Sainte. Mais notre temps également, personnifié par des inconnus, des stars de cinéma, des sportifs, des soldats, des politiques, des grandes figures chrétiennes aussi telles que celle de Mère Térésa …
Eclats d’espaces, fragments de temps. On se presse dans les cases, on s’y bouscule. Pour voir la Croix ? Peut-être, mais aussi pour interpeller les spectateurs. Les tableaux d’André Simar nous observent autant qu’on les regarde. De chacun des recoins, des regards nous interrogent, nous posent question. Qui sommes-nous ? Qui êtes-vous ? Et qui était-il ?
Car où est le Crucifié ? Où est celui qui convie toute cette humanité ? La peinture d’André Simar se donne toute entière, et pourtant, à la manière du « Portement de la Croix » de Bruegel l’Ancien, le Christ, pourtant au centre, ne se laisse pas découvrir au premier regard. Ici, un visage de face, semble nous inviter à la méditation. Un autre, de profil, délaisse le spectateur pour se tourner vers un groupe de femmes. Là, ce visage, celui d’un corps écrasé, est défiguré par la douleur. Certes, ce visage est à chaque fois différent mais sa présence, elle, demeure, au milieu de ce kaléidoscope humain. C’est lui qui en est le centre, qui relie ces univers.
Laurent Verpoorten, RCF Liège
L’exposition « André Simar- Autour de la Passion » est visible jusqu’au 31 mars 2013, en l’Église Saint Servais, rue Fond-Saint-Servais 4000 Liège, du mercredi au vendredi de 11h30 à 17h00 et les week-ends de 12h30 à 16h00.