Il n’est un secret pour personne que la crise économique a des répercussions à différents niveaux de notre société. Et, en période économique difficile, les budgets consacrés à l’aide au développement n’échappent pas aux restrictions de tout ordre. C’est que signale le CNCD-11.11.11 dans son rapport 2012, présenté à l’occasion de la rentrée politique. En pointant aussi la banque BIO, dont l’organisme estime qu’il faut remettre en question l’organisation.
Ainsi, 2011 a été marqué par une baisse de la quantité de l’aide au développement. La crise économique dans les pays industrialisés a entraîné la mise en route de plans d’austérité et des réductions budgétaires qui n’épargnent hélas pas l’aide au développement. Celle-ci a baissé tant au niveau mondial qu’européen et belge. En Belgique, elle a diminué de près de 10% entre 2010 et 2012, tandis que le budget de l’aide a été gelé jusqu’en 2014. Elle a représenté seulement 0,53% du revenu national brut en 2011 : la Belgique s’est ainsi éloignée de l’objectif de 0,7% qu’elle s’était pourtant fixé pour 2010.
Les défis belges
Rappelons que le sommet sur l’efficacité de l’aide au développement, tenu à Busan en Corée du Sud, l’an dernier, a débouché sur une déclaration actualisant le cadre international de l’efficacité de l’aide. Ce cadre a été élargi à l’efficacité du développement et a intégré de nouveaux acteurs de manière «différenciée»: les pays émergents du Sud, le secteur privé et la société civile. Le sommet de Busan avait dressé le bilan de l’état d’avancement de l’agenda de l’efficacité de l’aide adopté en 2005. Il n’était guère réjouissant, puisque seules deux cibles sur treize ont été atteintes entre 2005 et 2010, car les pays donateurs n’ont guère été enclins à modifier leurs pratiques.
Pour la Belgique, plusieurs défis découlent du sommet : la définition de stratégies spécifiques d’intervention dans les États fragiles et les pays à revenu intermédiaire, l’amélioration des différents canaux de la coopération gouvernementale (DGD, CTB et BIO), la mise en œuvre effective de l’aide budgétaire, et l’amélioration des pratiques en matière d’aide au commerce, de soutien au secteur privé dans les pays en développement et de cohérence de ses politiques en faveur du développement.
Au niveau de la cohérence des politiques belges en faveur du développement, le CNCD-11.11.11 estime que la Belgique avait enregistré un retard par rapport à ses voisins européens et avait été épinglée à ce sujet en 2010 par l’OCDE. « C’est pourquoi le nouveau ministre de la Coopération belge au développement, Paul Magnette, a organisé en mai 2012 les Assises de la coopération belge sur ce thème. Elles ont permis de lancer le débat en Belgique sur la mise en œuvre d’un dispositif légal permettant de s’assurer que les politiques belges de coopération au développement ne soient pas contrecarrées par d’autres politiques belges ayant un impact dans les pays en développement. La question a ainsi été intégrée dans l’avant-projet de loi sur la coopération belge au développement, adopté par le conseil des ministres du 13 juillet 2012 et qui est appelé à remplacer la loi de 1999 en la matière », précise l’organisation.
BIO dans le collimateur
Enfin, la Belgique doit réformer en profondeur tant sa stratégie de soutien au secteur privé dans le Sud, que l’institution belge qui est chargée de cette tâche, à savoir la banque BIO, estime le rapport du CNCD-11.11.11. « Cette institution s’est en effet retrouvée dans la tourmente au moment où elle fêtait son dixième anniversaire. Elle a été accusée de poursuivre des stratégies de rentabilité financière à court terme plutôt que des objectifs de développement. Il en a résulté une évaluation externe censée déboucher à terme sur une réforme des objectifs et de l’organisation de cette institution », peut-on lire.
En conclusion, pour le CNCD-11.11.11, l’année écoulée a été négative en termes de quantité de l’aide, mais riche en débats concernant l’amélioration de la qualité de l’aide et de la cohérence des politiques en faveur du développement, dans le contexte de l’émergence de nouveaux bailleurs du Sud. « Toutefois, il est nécessaire de traduire ces débats en mesures concrètes et de s’assurer qu’ils ne servent pas d’alibi pour abandonner les engagements en termes quantitatifs. Sans quoi, le risque est grand pour l’aide au développement de perdre sur les trois tableaux de la quantité, de la qualité et de la cohérence », conclut le rapport.
JJD/cp