La manufacture d’orgues Thomas est une institution dans le petit village de Ster, près de Francorchamps. Savez-vous qu’elle est tout aussi connue à Monaco? Incroyable, mais vrai. André, le père, et depuis quelques années, Dominique, le fils, ont donné à leur petite entreprise une renommée internationale, grâce à leur amour du beau et du travail bien fait.
Il a commencé modestement, André. Avec le soutien de son épouse, ce menuisier-ébéniste, passionné de musique d’Église, est passé tout naturellement de la construction de meubles à la construction d’orgues. Après 47 ans, une douzaine de personnes travaillent à la manufacture Thomas, remplissant les diverses tâches spécifiques à cette discipline très exigeante. Construire des tuyaux en bois ou en étain-plomb, travailler la peau, restaurer des meubles, sculpter, dessiner, et puis surtout harmoniser; autant de métiers réunis pour, ensemble, sublimer cette musique d’orgue aussi appréciée par les plus grands musiciens que par les fidèles ouailles de la messe dominicale. Dominique Thomas a succédé à son père, qui n’en est pas peu fier, dans ce métier si difficile d’harmoniste. « L’harmoniste est un Monsieur très important », explique le facteur d’orgue à la retraite. « C’est lui qui va donner toute la couleur sonore à l’instrument. Je le compare d’ailleurs souvent à un peintre. Il n’y en a pas deux qui travaillent les jaunes ou les verts de la même façon. L’harmoniste va, lui aussi, travailler les sons à sa façon, selon sa sensibilité. »
L’âme de la musique
En 1979, la Maison Thomas prend un tournant décisif, alors qu’elle construit pour la première fois un grand orgue à trois claviers commandé par le Foyer de Charité de Châteauneuf-de-Galaure. C’est là que vivait Marthe Robin, fondatrice de ces Foyers présents aujourd’hui dans plus de 40 pays. André a pu rencontrer la jeune femme deux fois; des rencontres marquantes qui resteront à jamais gravées dans son cœur et son esprit: « J’ai l’impression qu’elle est toujours avec nous. » André Thomas n’en dira pas plus; les larmes ont envahi ses yeux. Après quelques secondes, il poursuit pourtant: « L’essentiel de mon métier peut se résumer en trois mots: ‘Soli Deo Gloria’, ‘À Dieu seul la gloire’. J’essaye de transmettre ces valeurs à mon fils. Toujours tenter de trouver pourquoi on fait cela et comment on doit le faire. Sans agressivité, mais avec beaucoup de poésie. On ne peut prétendre avoir un caractère absolu – À Dieu seul la gloire –, mais on peut aider les gens à prier et à découvrir le beau. C’est très important à notre époque, et si nos instruments peuvent y participer… »
Du beau, encore du beau, avec une des dernières réalisations de la manufacture Thomas: le grand orgue de la cathédrale de Monaco (voir photo ci-dessus). Un fameux défi pour la petite équipe de Ster dont l’œuvre s’est concrétisée après 26.000 heures de travail. Deux ans ont été nécessaires pour construire un instrument de 24 tonnes comptant 5.298 tuyaux, 74 jeux et 4 claviers. Cet orgue n’est pas seulement un bijou d’esthétique, il est aussi un modèle unique en son genre, terriblement moderne, oserais-je dire révolutionnaire? À voir absolument, au détour d’un voyage dans la principauté!
Ce qui frappe d’emblée en entrant dans les ateliers de la manufacture, c’est cette ambiance de calme et de sérénité qui se dégage d’une telle maison. La Maison Thomas perpétue cette tradition ancestrale de l’artisanat d’art quand, en regardant les gestes des artisans au travail, on fait connaissance avec la beauté et la paix intérieure.
Sylviane BIGARÉ
Manufacture d’orgues Thomas, Rue M. Nisen, 338 à 4970 Ster-Francorchamps. Tél: 087/27.50.68.
Site: www.orgues-thomas.com