Le Prix Goldman pour l’environnement vient d’être décerné au Père Edwin Gariguez, des Philippines, pour son action en faveur des aborigènes et de la protection de leur environnement sur l’île de Mindoro.
Le prix Goldman pour l’environnement, créé en 1990, récompense chaque année 6 défenseurs de l’environnement dans chaque région continentale. Ce « Prix Nobel Vert », outre d’une reconnaissance internationale, s’accompagne d’un chèque d’un montant de 150 000 dollars.
Le combat du prêtre catholique, qui est également Secrétaire exécutif de la Caritas des Philippines depuis 2010, a commencé dans les années 1990, lorsque l’entreprise Norway’s Intex a reçu l’autorisation du gouvernement philippin d’exploiter le nickel dans la partie orientale de l’île de Mindoro.
Mine de nickel à ciel ouvert
La mine à ciel ouvert devait être exploitée selon une méthode d’extraction à l’acide, qui aurait produit des millions de tonnes de déchets toxiques. L’installation du gigantesque chantier (plus de 11 000 ha), prévue au coeur d’une réserve naturelle à la biodiversité unique, et à la confluence de quatre fleuves irriguant villages et rizières, aurait irrémédiablement détruit l’environnement et menacé gravement la survie des populations locales vivant de la pêche et de la culture, en particulier celle des aborigène mangyans qui auraient été contraints de quitter leurs terres ancestrales.
Face aux autorités locales qui soutenaient le projet minier malgré les dénonciations vigoureuses des habitants et des associations, le Père Edwin Gariguez co-fonda l’Alliance Against Mining (Alamin). L’organisation ne s’opposait pas au principe de l’activité minière mais voulait s’assurer que celle-ci serait encadrée par des mesures protégeant l’environnement, les droits des habitants et la répartition équitable des bénéfices de l’exploitation auprès des populations locales.
Malgré cette prise de position modérée, les membres d’Alamin ne cessèrent de subir le harcèlement et même les menaces de mort des exploitants miniers ainsi que des militaires. L’un des militants, Ricardo Ganad, président de l’association des chefs de village de Victoria, fut assassiné en 2010.
Un combat de longue haleine
Après de longues années de manifestations, Alamin obtint en 2002 des autorités locales un moratoire de 25 ans sur l’exploitation minière dans l’île de Mindoro. Mais les activités de l’entreprise norvégienne se poursuivant malgré l’interdiction officielle, le prêtre philippin se rendit alors à Oslo afin de sensibiliser le parlement ainsi que les actionnaires de la Norway’s Intex, aux risques que le projet minier faisaient courir aux habitants de Mindoro. Parallèlement, il déposa une plainte auprès de l’OCDE.
En dernier recours enfin, le P. Gariguez entreprit en 2009 une grève de la faim avec une vingtaine d’autres militants, jusqu’à ce que le Ministère philippin de l’environnement et des ressources naturelles (DENR), qui avait accordé un certificat de conformité environnementale à Intex, malgré le moratoire, accepte d’enquêter sur les dégradations écologiques et les violations des droits des aborigènes par l’entreprise minière. De nombreux investisseurs étrangers se retirèrent alors du projet du groupe norvégien et en 2010 le gouvernement philippin suspendit pour une durée illimitée les activités d’Intex à Mindoro.
Mais le combat du P. Gariguez ne semble pas terminé. Ce 20 avril, la société Intex a annoncé sur son site internet, avoir signé un accord avec le groupe chinois MCC8 lequel a amené la très puissante CITIC-GEM Fund à proposer un investissement de 800 millions de couronnes (soit 106 millions d’euros), dans le projet de Mindoro. Le président de l’entreprise norvégienne, Jan Vestrum, s’est félicité de cette coopération qui « lui permettra de réaliser enfin le projet d’extraction le plus grand du monde, un objectif poursuivi par Intex depuis des années ». La mine de nickel de Mindoro devrait pouvoir commencer sa production dès 2015, a annoncé toujours ce vendredi, le groupe Norway’s Intex.
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